Deftones – Koi No Yokan

En 2012, les idoles du néo-métal des années 2000 sont rares. Korn n’en finit plus de mourir avec un album dubstep et des membres qui vont et viennent. Fred Durst a maigri, son bouc est gris, sa casquette en berne et après des tentatives de come-back ratés, il tente de faire revivre Limp Bizkit une nouvelle fois avec une soupe qui reste sans réponse. Au milieu de cet océan de misère, les Deftones font figure d’exception et ont toujours refusé l’étiquette du genre. Avec son chanteur prônant ses influences eighties comme les Cure, Depeche Mode et Duran Duran, ils ont toujours su marier les codes du métal avec un sens de la mélodie bien au-dessus de leurs concurrents.

La bande de potes a connu un gros coup dur avec la perte de leur bassiste, Chi, lors d’un accident de voiture en 2008. Ce dernier n’est toujours pas capable de parler après un coma de 2 ans et un album quasi-fini nommé Eros n’a jamais vu le jour. Après 2 ans d’inactivité, Diamond Eyes avait pointé le bout de son nez avec un nouveau membre à la clé. Proche d’Around the Fur, il est considéré comme un retour aux sources, un grand marronnier de la presse musicale, il a été plutôt bien accueilli et a permis aux groupes de tourner à nouveau en festival et dans des salles plus petites.

Koi No Yokan n’est pas le menu du midi du jap’ du coin mais le fils caché de White Pony et de leur éponyme. Il est efficace, sonne plus que familier et ne cherche jamais à changer une formule qui marche. Certains crieront à l’ennui et à un groupe qui tourne en rond. J’y vois un album équilibré, qui fait plaisir, carrément jouissif par moments et assez addictif, chose qui n’était pas arrivée depuis Saturday Night Wrist. La question en suspens est de savoir si comme ce dernier, il ne va pas s’étioler avec les écoutes répétées et montrer ses limites avec le temps. A signer un album aussi cohérent, les Deftones ont peut-être joués la carte de l’immédiateté en dépit de classiques. Pas un grand mal puisque leur discographie n’en manque pas. Plus que ça, ce petit dernier paye sûrement un démarrage pied au plancher. Les deux titres dévoilés en premier Tempest et Leathers figurent dans les meilleurs et l’introductive Swerve City chope son auditeur à la gorge.

Parfois les mecs s’amusent à piocher dans leurs différents styles pour calmer le jeu avec l’ambiante Entombed. Ou font un clin d’oeil à leurs premiers fans avec Poltergeist évoquant Around the Fur par ses passages bourrins. Au rayon des réussites qui paraissent déjà entendu Romantic Dreams et Graphic Nature illustre avec efficacité la maîtrise du métal mélodique et aérien dont le groupe a été le créateur. Par contre, What Happened to You? qui t sonne comme une face B de Saturday Night Wrist ferme le bal platement et semble être mise là pour remettre en perspective l’ensemble de l’album.

Seul le temps nous permettra de dire si 2012 était un bon cru pour les Deftones mais en l’état, difficile de leur reprocher une exécution aussi parfaite de leur répertoire, un constat déjà assez rare pour un septième album. Toujours prêt à servir son fan au bon moment avec des murs de guitares, une section rythmique carrée et un Chino à la fois diaboliquement juste et agressif, ils nous montrent qu’ils sont aujourd’hui seuls dans leur style et surtout qu’ils l’ont toujours été.