Foo Fighters – In Your Honor

A la sortie de leur troisième album, ‘There Is Nothing Left To Lose‘, les Foo Fighters en avaient pris pour leur grade. Abandonner les grosses disto, les fûts lourdement frappés et autres hurlements de ‘The Colour and the Shape‘ pour sauter sur un wagon power pop aseptisé, ça choque forcément. Et bien qu’ayant été capable de pondre des titres toutefois respectables, les Foos étaient descendus de plusieurs crans dans l’estime de nombre de leurs fans. Il aura fallu attendre l’arrivée de ‘One by One‘ pour que leur style s’affirme sans pour autant avoir ce petit truc que possède ‘The Colour and the Shape‘ qui restera sans doute leur Album, avec un grand A… jusqu’à ce qu’arrive ‘In Your Honor‘.

C’est un fait : Dave Grohl (leader des Foos pour les deux du fond qui auraient dormi pendant une décennie) est un homme remarquable. Une sorte de superman du rock capable d’endosser le rôle de batteur surdoué dans milles et un projets, d’enchaîner les riffs à tout va en compagnie de ses idoles, d’enregistrer en studio pour tous ses copains inaccessibles du show business et même de construire son propre studio pendant les moments creux. Au point qu’on pouvait se demander s’il allait prendre le temps de s’appliquer pour son propre groupe : on connait tous cette maxime populaire qui veut que ce sont les cordonniers qui sont les plus mals chaussés. Mais non, l’ex-batteur de Nirvana ne fait pas partie de ces gens-là. D’ailleurs, on ne devrait même plus avoir le droit de l’appeler ‘‘ex-quoiquecesoit puisque avec ‘In Your Honor‘, sieur Grohl incrustera de son timbre son nom partout. Car ‘In Your Honor‘ est l’aboutissement de plusieurs années de compos : plus mature, plus riche, plus élaboré, plus pêchu.
L’introduction est faite par son titre éponyme. Effets de résonance, impression d’espace… On inspire un grand coup. En plein milieu d’une arène où nous attendent les quatres membres, instruments en main, veine sur la tempe palpitant au rythme cardiaque. Le tout prend de plus en plus d’ampleur, monte continuellement et s’arrête fatalement sur un break presque frustrant… pour une explosion soudaine de sons, de pogos, de guitares, d’énergie. Le genre de claque qu’on voudrait prendre tous les matins. Ce qui tombe bien puisque l’album en compte une dizaine pile poil comme ça : à commencer par ‘Hell‘, chanson composée dans la même logique, ou encore ‘The Last Song‘ simplissime et pourtant foutrement efficace, sans oublier ‘Free Me‘ défitivement calibré pour les ondes radios et paré à être bombardé sur MTV2 et consort. Mais attention, les Foo Fighters n’utilisent pas cette recette ‘magique’ du tube facile (peut-être déjà trop utilisée pour leur troisième opus) mais compte bien soigner chaque détails. Que dire de cette sombre ligne de basse sur ‘Free Me‘, d »End Over End‘ sorte de final roadtrip musical…

… faux final puisqu’en fin de compte, ‘In Your Honor‘ se veut double : une session electrique, une autre acoustique. Si d’un côté le premier volume a surtout pour ambition d’être rock et de faire bouger, le deuxième est lui largement plus posé mais plus risqué. On appréhende alors un peu mais le groupe évite les clichés larmoyants. Quoiqu’ils réussiront certainement à tirer quelques larmes de leurs fans les plus assidus grâce à ‘Friend Of Friend‘, déjà présent sur ‘Pocketwatch‘, la demotape enregistrée par sieur Dave Grohl au début des années 90. Un second volume montrant les talents de songwriters de Dave bien que le doute n’était plus permis. Entre croisements pop, folks, jazzy ou encore glam acoustique (Taylor Hawkins chante sur ‘Cold Day In The Sun‘), les Foos se mettent à explorer de nouvelles contrées. Jusqu’à tomber sur une certaine Norah Jones qu’on remarque à peine tant sa participation frôle l’anecdotique (‘Virginia Moon‘). Nous, on se met à genoux, le regard fixant le ciel à l’écoute de ‘Razor‘, point final de ce double album qu’on écoute dans un silence religieux.

Cinquième effort des Foo Fighters, ‘In Your Honor‘ est la sacralisation du groupe : définitivement l’un des albums rock de cette année 2005, voire de ces dernières années et l’album ultime pour le fanboy qui sommeille en moi. D’ailleurs, on est bien content qu’il nous soit dédié !