The Haunted – The Dead Eye

Bon, voilà, The Haunted, c’est un groupe que j’apprécie tout particulièrement, qui me fascine presque, et ce pour de nombreuses raisons. Tout d’abord parce qu’il y a dans cette formation certains des musiciens que j’admire le plus, les frères Björler, pour ne pas les nommer, qui sont pour moi à l’origine de certains des plus beaux riffs issus de toute la scène de Göteborg de ses débuts à nos jours. Mais j’aime encore plus ce groupe pour l’évolution et le chemin qu’a parcouru sa musique à travers ‘seulement’ cinq albums en comptant le petit dernier dont nous allons parler tout de suite, ‘The Dead Eye‘. On est passé d’un thrash oldschool et enragé à du death mélodique pour revenir aux sources sur ‘rEVOLVEr‘… Alors oui, c’est sûr qu’avec un line-up plutôt instable, le style change forcément. Mais malgré les va et viens de certains membres, il est difficile de nier que ce groupe a toujours su garder une vraie personnalité, un petit plus qui le démarque de la masse. Comme dirait Richard Cocchiante, ‘c’est une question de feeling’.

Alors vu que les fans étaient déjà divisés entre les pro-Marco Aro et les pro-Peter Dolving depuis le retour de ce dernier au chant, ‘The Dead Eye‘ risque bien d’ajouter un schisme supplémentaire à tout ça puisque pour faire simple, il pousse encore plus loin l’évolution amorcée par ‘rEVOLVEr‘ qui laissait déjà la part belle aux mélodies envoûtantes et tempos plus modérés entre deux syncopes thrash débitées dans les règles de l’art. Disons que les proportions se sont tout simplement inversées et désormais on a droit à deux doses de mélodies planantes pour une dose de bourinnage.

Après une petite intro dont personellement je ne vois pas bien l’utilité, c’est ‘The Flood‘ qui ouvre le bal. Et là quel bonheur de retrouver la pêche de l’opus précédent sur un titre qui rappelle beaucoup l’excellentissime ‘All Against All‘, que ce soit de par sa structure, ses rythmiques rock très classiques mais très efficaces ou ses enchainements de riffs. Et ce titre est loin d’être le seul parmis les treizes que contient cette galette à avoir une telle patate. ‘The Medication‘, sûrement le titre le plus brutal de l’album, nous offre un aperçu des talents d’Anders Björler avec des riffs tout en contre-temps à la précision sans faille. Plus basique rythmiquement, les couplets de ‘The Prosecution‘ laisseront apprécier sa vitesse impressionante. Mais après une petite moitié d’album faite de compositions qui pourraient laisser présager d’un ‘rEVOLVEr‘ bis, on passe à tout autre chose.

Les tempos baissent de manière drastique, la batterie prend beaucoup moins de place dans le son, parfois même remplacée par des percussions plus discrètes ou des des beats électroniques et le chant clair règne sans partage. Et oui, les ballades à la ‘My Shadow‘, ‘Abysmal‘ ou les passages de chant presque heavy à la ‘Burnt To A Shell‘ qui avaient tellement fait débat sur le précédent volet on fait des petits. Alors soit on peut se la jouer intégriste du thrash et se dire que non, on aime pas, ça n’a plus rien à voir avec ce qu’était la musique du groupe il y a quelques années, ce qui n’est pas complètement faux, soit on peut embrasser l’évolution d’un groupe qui propose quelque chose de vraiment nouveau et innovant et qui vaut la peine qu’on s’y attarde.

Car oui, comme je le disais au début, The Haunted possède une vraie personnalité, un vrai univers et chacun de ces titres plus calmes peut sonner comme une invitation à s’y plonger pour peu qu’on se laisse entraîner. Il y a quelque chose d’agréablement dérangeant dans le chant de ‘The Reflection‘, quelque chose de touchant dans la mélodie de ‘The Fallout‘ ou encore quelque chose de presque festif dans les rythmiques ternaires et la montée en puissance finale de ‘The Medusa‘. Ce qui pourrait ici passer pour du simple rock basique et facile se révèle souvent être d’une richesse et d’une profondeur innatendue après de nombreuses écoutes.

Alors bon, ‘The Dead Eye‘ ne plaira pas à tout le monde, c’est évident, et ceux qui n’avaient déjà pas apprécié ‘rEVOLVEr‘ ou l’éponyme n’aimeront peut-être que difficilement ou partiellement celui-ci. Ce n’est pas non plus un album qui s’écoute à la va vite mais plutôt un de ceux qui jouent beaucoup sur l’ambiance et requiert donc un minimum d’immersion. Pour preuve le petit cadeau à ceux qui auront eu la patience d’écouter juqu’à la dernière seconde du titre de clôture, un bonus track caché surprenant, court, mais qui vaut vraiment la peine. Il y aurait bien des choses à dire encore, sur les capacités vocales de Peter Dolving par exemple, plus puissant, varié et spontané que jamais ou encore sur la production qui ajoute une bonne dose de percutant ou une petite couche de douceur là où c’est nécessaire, mais la meilleure chose à faire est encore d’aller l’écouter, cet album. Quelques soit vos goûts, il y a vraiment quelque chose à en tirer.