Après une bière pour l’attendre et une autre avec lui, on se retrouve rapidement à faire des actes d’une générosité digne d’une Lady Di. C’est ainsi qu'[team]Hilikkus[/team] a hérité d’une entrée gratos pour le festival The Hours au Bataclan ce soir-là.
Avec un peu de retard, les deux reporters de charme pénètrent donc le Bataclan alors que 49 Swimming Pools a déjà entamé son set. A chaque chanson, le regard échangé entre les deux esthètes visualiens en dit long : niveau lyrisme, on navigue entre Coldplay et Robbie Williams. Toutefois, la petite ambiance fait son chemin et on se met à regretter de ne pas pouvoir tenter d’apprécier les français dans une ambiance plus intime, avec un verre de bourbon en discutant économie et Terence Malick (à milles lieues donc de la discussion de terrasse sur Guns N’Roses et Colin Farrell autour d’une bière avec la circulation de l’avenue de la plage du Crotoy en fond sonore). On essaiera 49 Swimming Pools sur disque, promis, avec des bougies allumées s’il le faut.
Les lumières s’allument et on se rend compte que le Bataclan, s’il n’est pas rempli, n’est pas loin de l’être. Petite interrogation : le public est-il ici pour Elbow ou pour la hype naissante autour des Fires of Rome, groupe suivant sur l’affiche ? Ces derniers montent sur scène. Trio jouant à quatre, le groupe attend cinq minutes avant de débuter (problème de synthé visiblement) sans daigner jeter un œil au public. Cependant, nous, on les observe : batteur au look metalleux, bassiste gay-friendly à droite, nain sorti du Stonehenge de Spinal Tap à la guitare lead à gauche et au centre, le chanteur beau gosse, croisement entre Julian Casablancas et le héros de Lost. Ils débutent. Fires of Rome est visiblement un groupe très doué. Aussi bien pour dénicher un nombre impressionnant de bons plans piqués un peu partout (en vrac QOTSA, Franz Ferdinand, The Arcade Fire, Joy Division, hum, Muse…) que pour systématiquement, donc à chaque fois, tout le temps, flinguer ses chansons avec un passage pénible. Le groupe n’a aucun sens de la concision et se tire une balle dans le pied à tous les niveaux. Pour chaque bonne chose, il y a deux passages soit chiants, soit prog, parfois pénibles, souvent ineptes. Et surtout pas de chansons. « Un groupe frustrant » glisse sensuellement [team]Hilikkus[/team] à l’oreille. Cependant, Fires of Rome a prévu du show. En plus de manquer de l’essentiel, le groupe s’est paré de ses plus beaux habits de frime. Le chanteur ne nous épargne aucun cliché. Le petit déhanché, les poses et regards chauds comme la braise sur le côté de la scène (des groupies ? Non ! Des photographes…), les passages joués au synthé d’une main mais le sommet reste ces fantastiques moments où il se contente de chanter. La main qui passe dans les cheveux, le jeu avec le pied de micro (qu’il fait d’ailleurs tomber plusieurs fois…) mais surtout, l’imparable « je tourne le dos au public et me retourne d’un coup lorsque je commence à chanter ». Comme Daniel Balavoine il y a 25 ans. On a envie de leur conseiller un peu d’humilité et surtout de la concision, par pitié. Toutefois, le public semble majoritairement conquis et applaudit sans se faire prier.
Quand Elbow monte sur scène avec l’aide d’un quatuor à cordes, l’ovation du public ne laisse aucun doute sur la raison de sa présence. C’est bien le groupe de Manchester qui a attiré la foule composée d’une bonne partie d’anglais. C’est « Starlings » et son ambiance éthérée qui se fait entendre. Guy Garvey débute et l’entendre file la frousse. Là, on se dit que les comparaisons avec Chris Martin n’ont pas lieu d’être tant les intonations du mancunien ne virent jamais dans l’excès sentimental de l’autre chèvre lyrique. Comme sur « The Seldom Seen Kid« , le groupe enchaîne avec « The bones of you » et un très beau « Mirrorball » pour nous consoler du départ d'[team]Hilikkus[/team]. Le son est plutôt bon, le groupe retranscrit assez fidèlement son disque et Guy se révèle fort charismatique. « Depuis l’élection d’Obama, cette chanson a perdu de sa pertinence » annonce le chanteur nounours avant le brûlot anti-Bush « The leaders of the free world« , accueilli par une ovation. Entendre la balade « The Stops » est pénible. Oh la chanson est excellente, le souci provient du public qui hurle ses conversations sans aucune considération pour le groupe… Arrivent « Station approach » et surtout « Grounds for divorce« , l’un des grands moments de la soirée. Le final emballant de la première enchaîné à la rage de l’autre transcendent littéralement la foule. Sur scène, les moments d’intensité ne virent presque jamais au pénible grandiloquent, au contraire, le final de « Some Riot » prend une dimension presque terrifiante tout comme « The loneliness of a tower crane driver« . Invariablement, un concert propose un moment d’ennuie et Elbow n’échappe pas à la règle : « Newborn » nous rappelle pourquoi on ne met pas plus souvent l’album « Asleep in the back » sur la platine.
Le final est superbe. Les anglais enchaînent un épiphanique « Weather to fly » à « One day like this » et son final à la « Hey Jude« , le genre de chansons qu’on entonne en souriant sans avoir l’impression toute Coldplay-esque/U2-esque qu’on nous enfonce un doigt dans l’œil pour bien chialer.
Pas de rappel, couvre-feu oblige, mais un beau moment passé avec un groupe généreux en live, un chanteur charismatique et surtout une musique moins lisse qu’elle ne parait : Elbow ne sait probablement pas composer de hit singles mais parvient à toucher avec ses mélodies compliquées (le refrain à une phrase de « Grounds for divorce » est tout ce qu’il y a de plus poussif) et sa musique qui parvient à parler à tous. A croire qu’il suffit que la musique soit bonne. Ce n’est pas plus compliqué que ça. Bonne soirée.
