Beauregard

Oh Beauregard, Beauregard, pourquoi est-ce que je t’apprécie tant ? Je ne saurais le dire en entamant ce document mais j’ai bon espoir qu’en y réfléchissant quelques théories viennent illuminer cet esprit encore sous le charme des trois excellents jours passés en ta compagnie. Serait-ce ton cadre quasi idyllique ? Franchement ce château et cette bonne idée si simple d’y projeter les vidéos de concerts… Voir cette demeure hantée par le sombre et vénéneux Nick Cave ou par le Nosferatu Billy Corgan ne pouvait qu’ensorceler. « L’alcool est interdit dans le camping » ai-je entendu mais qu’importe, je ne suis pas campeur et j’ai tout de même trouvé le moyen de me faire alpaguer par des énergumènes ayant besoin d’une confirmation : « elle est bonne Olivia Ruiz, hein ? ». Oui, elle a même plutôt rempli son cahier des charges mais elle demeure un peu maniérée pour mon goût rock ‘n’roll surtout quand 48 heures plus tôt New Order débarquait au soleil couchant sur la même scène. « Crystal« , l’incroyable « Bizarre Love Triangle« , le tube « Blue Monday » et « Love will tear us apart » pour finir. Mince Peter Hook, il ne manquait que toi… Ce même jour The Vaccines a plutôt plu quand Alt-J a plutôt déçu mais est-ce une surprise ? En parlant de surprise Half moon run, canadiens tout droit évadés d’un trip Point Break, ont promis de belles choses musicales et même de la rigolade si l’on se fie aux poses bouleversantes et comiques de son guitariste. A suivre. Tout le monde a aimé M ce soir-là mais pas nous. Pourquoi ? Parce qu’à l’efficacité de ses tubes bien forma-torchés le garçon a préféré nous faire croire qu’il fallait vivre une communion, là, tous ensemble. Mais non, l’émotion ne se commande pas, sans rancune Matthieu Chédid mais je crois que tu fais de la musique pour les gens n’aimant pas vraiment la musique.

Beauregard, il a fait beau et chaud mais parce que tu n’es pas encore assez cool (rien de mal, je ne le suis pas non plus) tu n’attires pas les djeunes, les sales djeunes. Beauregard tu es une sortie dominicale raffinée et c’est aussi pour ça que je t’ai apprécié. Le jeune Jake Bugg et ses 40 kilos tout mouillé ne se sont pas laissés impressionner mais lorsqu’on a « Two Lovers » et « Broken » plus une poignée de nouvelles chansons bluesy dans sa besace, on n’a rien à craindre. Ce garçon, il faut le surveiller. The Lumineers a enchanté la foule grâce à leur tube, c’est ce qu’on attendait d’eux, mission accomplie. Cet après midi-là Beauregard tu as envoyé près de moi des cadres à la quarantaine sportive pendant Bloc Party. Ceux-ci n’avaient d’yeux que pour Sarah Jones à la frappe sèche mais académique. Pose oblige, toutes les conversations de mes amis du jour tournaient autour d’elle. Et le groupe ? Comme un groupe en pleine désintégration, là, sous vos yeux mesdames et messieurs. Honnête mais les coutures se voyaient. N’aie crainte Beauregard, à chaque fête si des couples se font d’autres se défont… Il était aussi fort sympathique de croiser Miles Kane que d’entendre Bat for lashes mais mon esprit était encore et déjà avec les Smashing Pumpkins, les navrants Smashing Pumpkins selon Libération qui pourtant avaient la foi. Billy était en mode guitar hero –ce qui n’était pas le cas 48 h plus tôt à Lille- et les tubes se sont enchainés jusqu’à un « 1979 » toujours aussi parfait.

Beauregard si tes deux premiers jours étaient parfaits, le troisième m’a laissé plus circonspect car il y avait peut être trop de français… Juveniles et son electro pop m’ont fatigué, Olivia Ruiz je t’en ai déjà parlé mais la palme est pour Benjamin Biolay. Mais tout compte fait laisse-moi te reparler d’Olivia. A quelques bricoles près, ces deux-là sortent du même panier et c’est le même public que tu visais. Sauf que l’une était généreuse quand l’autre se croyait arrivé. Serait-ce la simple différence entre un bon concert et une atrocité ? De ce dimanche, bizarrement ce sont les Hives qui m‘ont retourné. Générosité, quand tu nous tiens. Jamais je n’écoute ce groupe mais chaque fois que je les ai croisé j’ai adoré. Ils étaient une sorte de providence rock ‘n’roll, un oasis dans l’océan un peu formaté de ce premier dimanche de juillet. Le bon pote qui arrive, vole la vedette a tout le monde et ensuite disparait laissant place à l’âme torturée de Nick Cave. J’avoue j’étais fatigué et je suis parti sans trop en profiter mais Beauregard que cela soit à jamais gravé : tu es mon festival préféré.