Hellfest ✖︎ Plein Air ✖︎ Clisson

vm5
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Le réveil du dimanche fut un peu plus tardif, du fait du peu d’heures de sommeil laissées par les activités festives du camping et d’autre part parce que la journée de la veille nous a démontré que courir de scène en scène de dix heures du mat à deux heures (du mat aussi) ça laisse des marques.

Après la pluie le désert

Après une grasse mat bien méritée on se dirige vers le festival vers onze heures et demie pour assister au set de Truckfighters, que j’avais bien trop souvent loupé en territoire parisien. La journée commence bien. Le soleil brille et les trois suédois le saluent comme il se doit avec un « Desert Cruiser » aussi aride qu’efficace. Ils avaient exactement trente minutes pour faire leurs preuves et on peut dire qu’ils ne les ont pas gaspillées.

On reste sur la même scène pour My Sleeping Karma. Si les quatre allemands se distinguent par leur physique de guerriers teutons, leur musique est elle beaucoup plus pacifique. Mélodies envoutantes et riffs brahmaniques, la Valley se trouve entièrement immergée dans leur rêverie et le public est aux anges, enfin peut être pas autant que le groupe qui parait surpris de cet accueil et ne cessera de remercier les spectateurs entre les morceaux.

Valse et rock n’ roll

La séance de méditation est à peine terminée qu’on file déjà vers la Warzone pour aller valser au Bal des Enragés. Et c’est bien de cela qu’il s’agit, un bal. On a tous un grand père (ou arrière grand père, c’est selon) qui dans sa jeunesse aimait à prendre son vélo pour aller choper au bal du patelin d’à côté au son de l’orchestre local qui reprenait les classiques de l’époque. Ici c’est la même chose, sauf que l’orchestre est un all star punks à chiens composé des plus belles gueules cassées de la scène française, entre autres Lofofora, Tagada Jones, Punish Yourself, Black Bomb A, Parabellum… Quant aux chansons ce sont les classiques alternatifs de notre époque, ceux que tout le monde connait, qu’on peut tous beugler en cœur parce qu’on connait tous les paroles et rien à foutre qu’il s’agisse de punk ou de metal, le but c’est de passer un bon moment. « The Beautiful People« , « Enter Sandman« , « Killing In The Name« , « Refuse/Resist« , « If The Kids Are United » et leur fameuse reprise de « Vive le Feu » des Bérus en fermeture qui colle parfaitement au beau bordel qui règne sur scène et dans la fosse à ce moment-là

Après une brève interruption il est temps de se rendre à la mainstage pour saluer Danko Jones, le roi du rock n’ roll. On arrivait déjà conquis et on a pu apprécier ce qui restera il faut le dire un set en demi-teinte si on le compare à ce qu’on connait de l’animal. La scène était peut-être trop grande, il faisait peut être trop jour et la setlist n’était peut-être pas adaptée à un festival de cette ampleur. Même les blagues de Danko tombent à plat. A croire que c’était pas un bon jour. La chose n’est pas si grave puis qu’on l’a déjà vu et qu’on le reverra surement en salle, plus en forme qu’aujourd’hui.

Avant de quitter la mainstage on nous apprend que les horaires de Ghost et Danzig ont été échangés. L’explication vint de Ben Barbaud lors de sa conférence : Danzig fait partie de ces groupes qui ne regardent la doc envoyée par le festival que le jour j. Ils ont donc réalisé le matin même qu’en finissant à deux heures du matin il leur serait difficile d’être prêts le lendemain à Londres. Ghost a alors gracieusement offert d’échanger sa place à 21h45 dans la plus petite tente contre un concert en fermeture du festival. Pour un groupe comme Ghost dont la hype n’a vraiment pris que cette année c’était l’opportunité rêvée et il y a fort à parier que si la robe de Papa Emeritus II était de bronze on aurait entendu sonner le tocsin.

Beggars can’t be choosars

Retour sous la Valley pour voir Spiritual Beggars qui qualifiés de stoner à leurs débuts sonnent aujourd’hui plutôt comme un groupe hard rock classique. Le tout est bien exécuté mais je m’éclipserai avant la fin pour aller voir le final de Mass Hysteria sur la mainstage où « Contraddiction » et « Furia » soulèvent la foule. En salle comme en festival Mass Hysteria dompte le public avec une aisance incroyable.

Petite pause en attendant la conférence de Ben Barbaud. Un rap sort des enceintes de la mainstage « you gaaay, you gaaay motherfucker you gaaaay« . Ben tiens, c’est pas politiquement correct ça, surtout cette année. Rapide coup d’œil sur la programme, ah non, ok, « Newsteeeed motherfucker, Newsteeed« . Pas grand-chose à dire sur ce début de set sinon que Newsted nous sert un thrash très convenu. Les admirateurs du bonhomme sont ravis, les autres s’en foutent poliment. Ah si, il parait qu’à la fin ils ont joué « Whiplash« . Voilà.

La conférence a un peu trainé en longueur et c’est en courant qu’on arrive vers la fin du concert de The Sword. Leur stoner de l’espace est convainquant mais on attendra de les revoir en salle dans de meilleures conditions si ils ne font pas de première partie inaudible, si leur batteur ne se pète pas une jambe et s’ils ne décident pas de nous snober.

Concerts entre potes

Je laisserai Boris parler de Gojira puisque les ayant déjà vus, je filai après quelques morceaux pour aller voir les Buzzcocks chez les punks de la Warzone. L’ambiance y est bien paisible, beaucoup de têtes blanches à l’air nostalgique, des gens allongés dans l’herbe. Godzilla a peut être mangé la moitié du public, ça ne fait rien les papys punks ont toujours l’air de prendre leur pied et ça fait plaisir à voir.

Enfin vient l’heure du concert annulé de Clutch que beaucoup attendaient parce qu’il était remplacé par un set spécial de Down. Hellyeah étant passé vendredi, certains avaient commencé à se faire des idées, mais non ce « concert de reprises » n’était pas un prétexte pour une éventuelle reformation de Pantera. Il se terminera par un « Walk » repris en cœur par toute la tente mais c’est tout. La tente justement, Clutch devait jouer sous la Valley et c’est logiquement au même endroit que s’est tenu le concert de remplacement. Le chapiteau dégueule de monde et il faut faire preuve de souplesse et de diplomatie pour arriver à se glisser à l’intérieur.
Sur scène Phil Anselmo est toujours « bien ». Il est accompagné pour l’occasion de membres de Crowbar, Corrosion Of Conformity et d’Eyehategod dont ils feront des reprises après avoir fait plaisir aux fans de Down avec les peu joués « Rehab » et « Swan Song« . Tout ce beau monde va et vient, picole un peu et se concerte vite fait avant chaque chanson. Jason Newsted passera même la tête pour la reprise de « Clean My Wounds« . Le tout donne une sympathique impression de concert à l’arrache entre copains, de jam à la maison.

Le beau et les bêtes

Retour sur la mainstage pour un concert autrement plus préparé, celui de Stone Sour. Corey a sorti sa plus belle chemise de lover. Stone Sour c’est la face respectable de Corey Taylor, celle que tu peux présenter à ta mère mais que tu oseras jamais faire écouter à ton pote métalleux. Évitons de tourner autour du pot : c’est [s]très[/s] trop propre, mais si beaucoup de chansons prêtent à sourire tellement elles sont mielleuses et formatées (« Say You’ll Haunt Me » sérieusement ? Même Avenged Sevenfold en voudrait pas) il faut reconnaître que certaines autres chansons un peu plus violentes passent un peu mieux, et que quand ils jouent leur rôle à fond on peut avoir droit à un résultat cohérent (« Through Glass » évidemment).
Bref, c’était leur troisième fois au Hellfest et Corey a promis qu’il reviendrait. A ce moment-là on a probablement été beaucoup à espérer que ce soit avec Slipknot.

Place à présent au shock rock monstrueux de Lordi, qu’on connait tous pour leur passage à l’eurovision. On pouvait s’attendre à un spectacle grand guignol comme celui de la veille et ce fut le cas, mais un élément inattendu a complètement changé la donne : le second degré.
Lordi c’est du shock rock avec peu de moyens mais beaucoup d’humour. Équipés [s]d’un système pyrotechnique[/s] de pétards prévus pour les petites salles et de nombreux accessoires pour chaque chanson, on a un peu de peine pour eux mais on rit de bon cœur puisque c’est le but recherché. Un bonnet et un gros sac pour « Blood Red Sandman« , une tiare et une écharpe « Mister Lordi 2013 » sur « I’m The Best« , le plus drôle étant quand même les nombreux passages où leur roadie court après Mister Lordi pour lui tendre l’accessoire de la chanson et que celui-ci continue sans le voir, tout engoncé qu’il est dans son énorme costume. Jay Jay French (Twisted Sister) qui s’y connait en déguisements viendra même leur prêter main forte sur « It Snows In Hell« .
Pour résumer, Lordi est ridicule et c’est ce qui les rend géniaux.

Coups de beats

Les monstres ont beau être rigolos, la fin de leur set empiète sur celui de Punish Yourself. La recette on la connait, mais elle reste toujours aussi efficace. Un beat à tuer des lapins, des refrains qui rentrent dans le crane et un show à faire pâmer Juan Carlos. Les danseurs nus comme des vers luisants se déhanchent sous la lumière noire pour une fin du monde d’une heure tout rond. Le public hurle les paroles et pallie ainsi au léger problème de voix du chanteur ce soir-là. Un final sur « Gay boys in bondage » et c’est fini, les lumières se rallument.

Ghost se pose en grand gagnant de la soirée, s’étant fait promouvoir headliner à la dernière minute, ils se paient carrément le concert de clôture du festival. Le moins qu’on puisse dire c’est que le son est propre. On serait pas loin du sans faute si l’éclairagiste avait pas réglé les projos du bas pour brûler la rétine des spectateurs. Je laisserai Boris parler plus en détail de la messe puisque je suis parti après quarante-cinq minutes pour aller voir Atari Teenage Riot. Pas de regrets, Papa Emeritus II a même pas montré sa bite.

Le Hellfest 2013 se termine comme s’était terminé le festival de Dour l’an dernier : avec un passage à tabac signé Atari Teenage Riot. Composition : 0% groove 100% violence. Une belle leçon de révolte sonore idéale pour achever ce qui nous reste de cordes vocales après trois jours de rage concentrée.

Le dimanche de Boris

Premier instant de grâce de la journée, siroter un thé chaud devant My Sleeping Karma. Séance de relaxation pour un réveil en douceur, en ce dernier jour c’est très apprécié. Un dernier jour on se dit aussi qu’il serait temps d’aller traîner là où on n’a pas beaucoup piétiné. Rendez-vous sur la Warzone avec le Bal des enragés. C’est exactement ce qu’en a dit mon collègue, rien à ajouter. Même avis également pour Danko Jones, attendu avec appréhension sur une scène de Hellfest (« c’est quand même pas vraiment du métal, tu vois« ). Aucun souci de ce côté-là avec un bel accueil, il s’en sort donc avec les honneurs mais sans folie. La faute à un set où il manquait vraiment quelques gros titres.

Aucun soucis par contre pour Gojira qui se promène en pays conquis. Mais pas de repos quand même, avec un set très chargé et un plaisir partagé entre la scène et le public. Même en les ayant vus au Bikini deux mois plus tôt, aucune lassitude et une maîtrise de bout en bout pour assommer le public. A noter, la super idée de se placer sur la gaine électrique pour mieux voir : on est ainsi certain d’être idéalement placé lors du choc du premier wall of death…

Symphony X ou les maîtres du métal symphonique dixit un pote me laisseront de marbre. Pas plus d’entrain pour Stone Sour à part le petit plaisir d’apercevoir Corey Tailor. On s’en tiendra là, j’aurais préféré Slipknot. Petite surprise avec Lordi, qui assure avec la panoplie complète heavy/mise en scène/déguisements. Du gros son et de la déconne c’est exactement mon trip, surtout pendant ces trois jours de l’année.

La toute fin approche et je n’ai pas le courage de rester debout pour Volbeat, il faut reprendre des forces pour le dernier concert. Je rejoins donc les rangs de cette armée allongée qui jonche le sol.
On se réveille alors pour Ghost, LE concert de ce Hellfest. Ils héritent d’une Main Stage amplement méritée, mais écopes de quelques soucis techniques : un éclairage régulièrement aveuglant pour le public et une panne complète du son façade en milieu de set (ce qui n’empêchera pas le batteur de continuer à jouer, au loin). Le groupe revient finalement quelques minutes plus tard avec un Papa Emeritus II qui commente « Ah ! Miracles of technology« . L’ambiance est parfaite pour conclure un Hellfest, entre doom et passages pop, l’ensemble maquillé avec tout le folklore pseudo-sataniste qui fait le charme du groupe. « Con Clavi Con Dio« , « Year Zero« , « Elizabeth« , chaque titre comme un rituel pour une communion parfaite. Le rite de conclusion se faisant sur « Monstrance Clock » : “Come together, together as one, come together, for Lucifer’s son”. La messe est dite. Au revoir Hellfest, à l’année prochaine.

Un grand merci à Roger et à l’ensemble de l’équipe du festival, pour l’organisation comme toujours au poil, qui s’optimise d’année en année.

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