Je vais être honnête, j’ai toujours eu un a priori négatif sur le Connexion. En passant devant, le lieu ne m’a jamais inspiré. Alors quand j’ai vu que Red Fang avait choisi cette salle pour revenir sur Toulouse, la première réaction a été mitigée. Mais je n’allais pas non plus bouder mon plaisir et zapper les barbus. Une date locale dans une petite salle, ça s’annonçait encore mieux qu’un Hellfest et plus adapté au caractère du groupe.
Le « Red Fang complet » écrit à la main sur un A4 collé à l’entrée a laissé peu de chances à Nidri. C’est même complet complet, comme me l’a confirmé le gars de chez Noiser à l’entrée. Effectivement, il y a du chevelu, du barbu, du mâle prêt à s’agiter et le tout avec une sacré densité. Lord Dying officie déjà à mon arrivée et je reste donc bloqué au fond. L’architecture de la salle est pour le moins étrange : le balcon avance sur la majorité de la fosse, mais le pécore moyen n’y a pas accès. Donc passé les 10 premiers rangs, le plafond est relativement bas. Ce n’est pas réellement gênant pour la vue (la scène n’est pas assez haute pour que les bonhommes qui s’y agitent soient coupés), mais côté son je n’ai pas été convaincu par Lord Dying. Louper la moitié du set n’a évidemment pas aidé à se mettre dedans, mais j’étais bien plus emballé sur album. Je n’ai pas retrouvé le groove qu’ils insufflent dans leurs titres pourtant bien métal. La prestation a en plus été chaotique, avec un chanteur/guitariste qui se barre sans prévenir (corde cassée ?): les trois autres comparses ont réussi à meubler avec succès quelques minutes, mais quand un autre gratouilleur de manche s’est éclipsé, le duo restant était dubitatif. Bref, Lord Dying c’est une moyenne de 11/20 : bien, mais pas top.
Je profite de l’attente entre Lord Dying et The Shrine pour me rapprocher. Dans les premiers rangs, j’atterri alors à côté d’un dreadeux défoncé en grande tentative de discussion avec une demoiselle, à base de « je suis désolé, je te parle alors que je pue l’alcool ». Une approche subtile. Mais le bougre n’est pas méchant et a la conversion facile, je me retrouve donc dans le débat qui vise à savoir qui est en portrait à côté de la scène. Ma mise est sur Jean Jaurès, mais à Toulouse, à deux minutes de la station de métro du même nom et avec de tels attributs pilaires, le doute n’est pas permis. La nana s’absente et revient cinq minutes plus tard avec trois bières : bière offerte, merci madame !
The Shrine débarque avec une pêche d’enfer, à côté Lord Dying était sous valium. Les gars de Venice Beach sont vraiment motivés, principalement le leader/guitar-hero. Car c’est ça The Shrine, un power trio en mode guitar-hero. Plutôt plaisant avec un son à la Ramones, même si les soli tendent parfois vers la branlette. Ce qui n’enchante apparemment pas mon nouveau copain, aussi expressif en négatif qu’en positif. Les titres s’enchainent vite, avec un tempo toujours enlevé et une énergie qui ne faiblit pas. Du tout bon.
Pendant la dernière attente, Johnny la dread a le temps de me parler d’Inde, de Shiva, de Kyuss en Californie à la grande époque (sous acide, forcément) et de sa préférence pour le rock par rapport au sexe. L’orga fait une courte apparition pour annoncer le vainqueur de la tombola permettant de gagner une grande affiche dédicacée par les groupes de la soirée et c’est enfin parti pour Red Fang. Ça a été très vite : + 10°C d’un coup, passage du mode sec au mode rinçage avec un degré d’hygrométrie proche du concert des Hives au Bikini pendant les jours chauds de juillet dernier. La set-list brasse sur les trois albums, et avec très peu (voire aucun) titre à jeter sur chaque, il n’y a aucune relâche, aucun répit. Par contre, carton rouge aux mecs qui gardent leur veste en cuir sur le dos dans la foule (je ne sais pas si la mode revient mais il y en a de plus en plus) : le contact du cuir bouillant et détrempé est encore plus déplaisant que celui du dos nu et ruisselant des mecs sans T-shirt. Les têtes s’agitent et ça se bouscule gentiment, tout le monde est dedans.
Pour le rappel, l’orga a la gentillesse de ramener bière et eau pour le groupe et en offre également au public (bière gratuite bis). C’est un sans-faute de bout en bout pour Red Fang, très à l’aise et souriants, tout en balançant des riffs impeccables. Fin de rappel, John Sherman en profite pour se lancer dans la foule, annonçant le départ du groupe. Le monsieur social du groupe reviendra une petite demi-heure plus tard serrer des mains et poser pour les photos. Il aura brisé mon petit cœur innocent de fan, qui espérait naïvement qu’il me reconnaitrait suite à notre discussion au dernier Hellfest.
Je sors détrempé du Connexion. La pluie rend la chose normale dans le métro, mais l’odeur d’homme en rut me démasque. Avec des bières offertes, des échanges très marrants et des concerts crescendo en qualité, c’est le genre de soirée qu’on voudrait tous les soirs. Surtout en se payant le luxe de rentrer avant minuit (grâce au très bon timing de l’orga), histoire de rester frais pour le boulot le lendemain. Les douleurs au cou pendant les trois jours qui ont suivi sont les seuls mauvais souvenirs.
Merci à Frank de Petting Zoo, aux équipes de Noiser et du Connexion et aux trois groupes pour la soirée parfaite.
