Protomartyr ✖︎ Formal Growth in The Desert

Sixième round pour les Protomartyr, sommité du rock américain depuis une dizaine d’années. Âpre et rugueux, le groupe nous revient avec un disque surprenant et captivant.

A ce stade, il n’y a plus aucun secret. Passé progressivement de succès d’estime et critique à adresse incontournable d’une musique sérieuse et appliquée, les Protomartyr ont évolué pour varier leur formule avec Ultimate Success Today. Cuivres, collaborations et ambiance plus jazzy avaient offert au groupe une vraie alternative avec pour cerise sur le gâteau l’ajout de Kelley Deal des Breeders comme membre de leur tournée. Un disque malheureusement sacrifié par le COVID avec des concerts décalés de plus d’une année.  Formal Growth In The Desert est leur premier album co-produit avec le guitariste Greg Ahee, officiellement reconnu comme le grand manitou aux manettes de leur musique. Une décision logique et récompensée de succès puisque l’emballage sonore rend entièrement justice à la grande qualité des compositions.

Ayant pris le micro sur le tard et parce que personne d’autre ne le faisait, Joe Casey a toujours argué ne pas avoir de grandes prétentions au chant. Un excès de modestie après une décennie à ne pas faire semblant couronnée par cette prestation 2023 qui est de loin la meilleure. Les notes se font plus longues, son interprétation plus incisive et ce changement est palpable dès la première écoute. Arrivé plus tôt dans la composition et parfois à poser sa voix sur des maquettes, sa place est ici différente. Sa performance, comme celles de ses compères fleurent bon le groupe revigoré et en pleine démonstration de ses capacités. Récemment marié, l’homme laisse place à l’optimisme et on sent que l’amour change la donne au sein des titres. Pas seulement une impression puisque le chanteur nous l’a confirmé en interview.

Derrière les fûts, Alex Leonard n’a jamais laissé tomber ses potes et encore une fois, il délivre des partitions toutes en nuances. ‘Elimination Dances’ est par exemple l’un des beats les plus entêtants. Les guitares de Protomartyr ont parfois eu des airs de Strokes et ça en dit long sur leurs mélodies et leurs attractions. C’est par elles que passent la lumière dans le son du groupe et ce sixième disque ne fait pas exception. Et cet album regorge de nouveautés : ‘Let’s Tip The Creator‘ et son incroyable pont, les percussions et le chant menaçant de ‘Fun In Hi School’, la cinématographique ‘Grant VS. Host’ ou la dansante et blagueuse ‘Fulfillment Center’.

A la sortie de sa Maroquinerie en septembre dernier, le groupe nous avait confié que c’était le meilleur disque d’un Protomartyr heureux. Une confiance que l’on ressent fortement et qui fait plaisir à entendre comme à voir. Au bord de la séparation, ils ont su se ressourcer pour aller plus loin créativement et on espère pour encore longtemps. Avec pour résultat, le disque le plus diversifié et abordable de leur carrière, belle épopée d’artistes attachants et sincères.

 

NOTE FINALE
Retrouver Protomartyr est toujours un plaisir, les entendre de cette manière est un bonheur. C’est au bord du split qu’ils ont réussi à sublimer leur formule. Avec une confiance retrouvée, en ouvrant encore leurs compositions et avec plus de liberté et de lumière, les voici encore une fois en possession d’un joli tour de force.
Le chant de Joe Casey, en pleine confiance
Plus d’ampleur dans les compos
4.5