Un disque obsédant. S’il fallait résumer ce disque en une phrase, celle-ci ferait peut être l’affaire. On adorerait trouver une formule parfaite pour décrire la beauté, la puissance émotionnelle, la sincérité et la fascination qui émanent de cet album mais c’est peine perdu tant ‘Album‘ (eux ont trouvé le concept simple) est de ces disques où les mots qu’on y accole ne font que minimiser la sensation. Toutes les bonnes influences sont là : du surf rock 50’s dans l’âme menant logiquement aux Beach Boys vers Phil Spector avec la voix d’Elvis Costello sur des guitares de Jesus & Mary Chain se découvrant un coeur avec une prod lo-fi. Les chansons comptent parmi les plus belles entendues depuis des lustres, ‘Ghost Mouth‘ est renversante, ‘Morning light‘ et son chant en apesanteur sonnent comme un saut en chute libre sans parachute, quasi impossible de définir si ce sont des anglais avec des influences ricaines ou l’inverse, le chant frise le sublime en permanence, l’attitude je m’en foutiste donne à Girls et ses chansons adolescentes un sentiment d’abandon total, de romantisme au sens littéraire du terme. La première moitié du disque est une petite perfection. Les longueurs et quelques bâillements éprouvés lors de la seconde moitié rassurent d’emblée : ils peuvent faire mieux. Les textes sont d’une rare simplicité qui va droit au coeur, touchants comme du Eels, adolescents comme du Shangri-Las. Le chant semble en permanence au bord de la rupture (encore une fois, ‘Ghost mouth‘), c’est prenant comme du Daniel Johnston, c’est obsédant…
Et nous revoilà au point de départ. Ce très grand disque se révèle à la défloraison mais chaque écoute fait qu’on le vénère un peu plus. Des moments, on se perd : est-ce sublime ou insupportable ? Les balades sont-elles simples ou faciles ? A-t-on envie de s’agenouiller devant ce duo ou de les mépriser ? Ce Christopher Owens est-il celui qu’on rêverait d’être ou un de ces imbuvables branleurs qu’on a toujours détesté ? Toutes ces interrogations font qu’on n’a pas fini d’écouter (l’album, fait personnellement rarissime, passe sur la platine trois voire quatre fois par jour), ni d’entendre parler (le Grand Journal s’en est emparé cette semaine) de Girls et de leur ‘Album‘. De l’année.