And So I Watch You From Afar – And So I Watch You From Afar

Oyé, étranger ! Toi qui a l’air vif et curieux, je m’en vais te narrer la légende d’And So I Watch You From Afar

Il était une fois, dans le royaume de Post-Rock, qui naquit il y a une vingtaine d’années après les tribulations des divins Talk Talk et Slint puis de leur descendance (Godspeed You! Black Emperor, Tortoise, Mogwai, …), une bande de quatre guerriers nord-irlandais, déjà aperçus dans les parages après de petits assauts remarqués (‘Tonight The City Burns‘, ‘This Is Our Machine And Nothing Can Stop It‘) et menés contre l’occupant. Dirigé et représenté depuis une décennie par de trop nombreux groupes se parodiant entre eux en servant une musique illégitimement appelée post-rock, teintée de reverb et d’écho, bourrée de clichés de composition et ressemblant plus à un vulgaire rock atmosphérique (à peine aérien, en fait) larmoyant comme une séquence émotion d’une série ado, le royaume autrefois admiré est tombé dans l’oubli et le sommeil profond… Cette histoire est celle de la reconquête du genre par ces quatre hommes.

Fils spirituels de Fugazi et autres postcoreux, les compères viennent défier les soporifiques imposteurs. Par un cri de guerre guitaristique, la charge commence et distribue claques et pains. Ils savent se servir de leurs armes, réglées pour tuer (‘Set Guitars To Kill‘) et formant un véritable mur de son qui ne peut être brisé que par un magnifique break groovy comme l’enfer. La foule est d’emblée conquise et accepte avec joie le secours de ces vaillants combattants. La confiance est de mise face au quatuor et leurs mélodies entêtantes (‘A Little Solidarity Goes a Long Way‘). Bonne idée que celle de s’allier à la populace, car grâce à leur discours instrumental ou l’épique se fait ressentir sans rendre le tout ridicule (il était une fois Rhapsody Of Fire…), tous serrent les poings en comprenant qu’ils ont été bernés si longtemps… La révolte gronde, l’orage éclate, la peur et l’admiration à la fois s’emparent des illégitimes résidents de la citadelle (‘Clench Fists, Grit Teeth… GO!‘). Un instant de calme s’immisce, puis la tempête s’abat sur le château, réduisant à néant les maigres espoirs de crédibilité du pouvoir en place (‘I Capture Castles‘). L’ennemi capitule sans demander son reste mais plutôt la pitié de ses conquérants, désormais maitres incontestés. C’est là que prend fin la première partie de mon récit…

Plus tard, un gigantesque banquet est organisé en l’honneur des braves libérateurs, qui finissent par se résoudre à satisfaire la curiosité de la populace. Ils content leur histoire, du début où ils étaient encore timides mais passionnés jusqu’à ce que la fougue s’empare pour de bon de leur créativité (‘Start a Band‘), et font même preuve d’espièglerie en racontant comment ils ont tabassé Mario au point de le rendre difforme (‘Tip Of The Hat, Punch In The Face‘). Leur philosophie se veut révolutionnaire: Mettre en désordre ce qui était si bien établi dans les codes du royaume, faire partir les structures dans tous les sens, changer brusquement de caractère quand il leur plait (‘If It Ain’t Broke, Break It‘). Puis, le ton se fait plus grave lorsque la bande prononce le discours de prise de pouvoir. Après une époque où le peuple a chié dans la colle en laissant s’installer chez eux la somnolence, il faut changer. Plus jamais ça. Il va maintenant falloir vivre et se donner à fond, car cette guerre contre l’ennui ne fait que commencer (‘These Riots Are Just The Beginning‘)… Mais trêve de bavardages, il est temps de faire la fête et de manifester sa joie pour célébrer la libération. Les hymnes s’enchainent et sont toujours plus festifs, le royaume s’embrase lorsque tout le monde se met à chanter la gloire des nouveaux héros (‘Don’t Waste Time Doing Things You Hate‘). Ceux-ci montrent leur maitrise en reprenant les vaincus par le schéma musical typique de ces derniers et réussissent ce que peu ou prou d’entre eux ont fait: captiver l’auditoire (‘The Voiceless‘).
Alors que ce jour mémorable touche à sa fin, les quatres amis se retrouvent pour conclure le premier acte de leur effort. Sous un soleil couchant d’été, force est de constater qu’ils n’ont fait qu’une bouchée de leurs opposants (‘Eat The City, Eat It Whole‘).

Mon récit s’achève, et je n’aurais qu’une seule et unique phrase en conclusion.
Justice est faite.