Melechesh – Emissaries

Comme je regrette de ne pas m’être intéressé plus en profondeur à ce groupe plus tôt… Cet ‘Emissaries‘ sur lequel nous allons tout de suite nous pencher est en effet déjà le troisième album de Melechesh, formation issue d’Israel, désormais basée aux Pays-Bas. Et pourrait-on imaginer meilleures origines pour un groupe de black que la terre même où est supposé avoir coulé le sang du messie ? Non, bien sûr. J’avais donc entendu ce nom à de nombreuses reprises et écouté à la va vite quelques titres sans trop chercher à rentrer dans le style si particulier que pratique ce quattuor. Mais depuis que leur dernier opus est sorti, j’en ai tout simplement lu et entendu tellement de bien qu’il fallait que je me fasse une opinion par moi-même.

D’abord, il faut préciser que qualifier cette musique de black tout court est sûrement une des façons les plus réductrices de définir le style de Melechesh. Eux-même ont d’ailleurs trouvé une apellation qui convient beaucoup mieux, le mesopotamian metal. Car oui, les influences des musiques traditionelles du moyen-orient sont partout sur cet album. Pas un riff qui ne sonne comme la douce complainte du oud sous un soleil de plomb, pas un blast qui n’amène à l’esprit des visions de véloces tempêtes de sables qui écorchent et malmènent de désertiques cités millénaires de la même manière qu’ils martèlent impitoyablement nos tympans. Oui, ‘Emissaries‘ est le genre d’album immersif qui entraîne dans son univers et réveille l’imagination.

Et ce dès les premières secondes. A la première écoute, on s’attend pour commencer à la conventionelle intro bien mystérieuse comme il faut sur fonds d’instruments traditionnels. Mais non, le furieusement inspiré ‘Rebirth Of The Nemesis‘ qui ouvre le bal démarre sur un blast des plus brutaux accompagné d’une harmonie de leads multiples tout simplement sublime. Et ces quelques secondes donnent le ton de la quasi heure de génie qui va suivre : des mélodies d’une profondeur, d’une complexité, d’une richesse et d’une originalité sans égale, tout ça soutenu par des rythmiques toujours surprenantes et dont le niveau technique ne laissera même pas les plus exigeants sur leur faim.

On pense bien sûr tout de suite à Nile. Les sonorités orientales sont très similaires et même si Melechesh est loin d’atteindre le niveau de technique et de violence pure que dégage la formation de Karl Sanders, on se dirait presque qu’Ashmedi et ses compères ont réussi à amener ce concept de metal oriental à un tout autre niveau grâce à un style de composition complètement unique. D’autres influences se font en effet sentir tout au long de l’album. Les riffs les plus rythmiques fleurent bon le thrash décapant à la Slayer, comme sur le méchemment entraînant ‘Double Helixed Sceptre‘. Mais plus surprenant, beaucoup de passages parmis les plus mélodiques rappellent le style de formations plus orientées heavy comme les excellents Mastodon. Dans cet esprit quasi-psychédélique où le tempo se retrouve méticuleusement haché de la manière la plus inhabituelle possible pour les oreilles de l’auditeur lambda, on peut noter le très planant ‘Gyroscope‘ ou ‘Deluge Of Delusional Dreams‘ qui sait quand à lui jouer par moments avec la facette plus minimaliste de la musique du groupe.

Melechesh nous offre donc un vrai petit bijou, hybride de black, death et thrash qui garde toujours au coeur de chacun de ses titres ses influences orientales, en évitant de succomber à leurs usages les plus classiques et clichés. ‘Emissaries‘ est un album complet, profond et qui nécessite plus d’une écoute avant d’en avoir décelé tous les détails et arrangements les plus subtils. Avec ses longs passages instrumentaux, il ne s’adresse d’ailleurs pas qu’aux amateurs de musiques extrêmes mais vraiment à tous ceux qui veulent découvrir un son et un univers vraiment unique. Pour faire simple, c’est une heure de pur plaisir. Alors, entendez-vous au loin derrière ces rideaux de sable la complainte du mystérieux clerc perché au sommet de sa ziggourat, implorant les services d’anciennes divinités sumériennes ? Si votre réponse est oui, soit vous aussi vous avez écouté trop de Melechesh et c’est tant mieux, soit vous avez un sérieux problème.