Nowhere – Nowhere

Repoussé maintes et maintes fois (comme cette chronique), si bien que les fans se demandaient s’ils l’auraient un jour dans leur platine, le DVD live de la Team Nowhere est enfin sorti, presque deux après cette prestation collective au Furia Sound Festival. Et on peut dire qu’ils ont bien fait de prendre leur temps : en plus de ce CD/DVD live, l’objet comporte deux documentaires bien fournis, le premier étant une intéressante rétrospective des dix ans d’activisme du collectif, et le second, moins fun, sur la résidence (au Trabendo) qui a précédé la performance au Furia. Orgasmique pour les fans, divertissant pour les curieux. Mais ma chronique portera seulement sur le clou du spectacle, le prétexte pour sortir cette galette, l’acte final de la Team Nowhere : le DVD live. Les trois titres phares de Pleymo, Enhancer, Wünjo et Vegastar, revisités par différents membres du collectif. Une sorte de partouze échangiste entre amis, où les compositions font offices de partenaires féminins, en somme. Passage en revue de chaque groupe.

Tout d’abord, Wünjo. Incontestablement les grands perdants de l’effet ‘Nowhere‘. Victimes des préjugés liés au collectif, les cinq gars n’ont jamais bénéficié de la once de reconnaissance qu’ils méritaient. Mais bon, au final on s’en fout, Wünjo, c’est fini. Bref. Emmené par le viril et body-buildé Flavien, Wünjo et ses guests livrent trois morceaux remuants et rock’n’roll. ‘Projet Fonzdé Ganja‘ fait office de composition des débuts, naïvement rebelle, tandis que ‘DTG‘ tabasse juste ce qu’il faut. Quant à ‘La Firme‘, c’est le meilleur morceau de la galette : un rock métallique efficace, aux riffs simples, au chant mélodique imparable avec un Flav’ irréprochable, et avec en bonus un solo enflammé en fin de titre. Oui oui, un guitariste nu-metal qui sait jouer de la gratte, ça existe. On peut maintenant retrouver certains membres de Wünjo chez les prometteurs Bukowski (le guitariste + le batteur), ainsi que Flavien dans Alligators, mystérieux projet avec des mecs de Soixante, Odja, et… Vegastar – et merde.

Vegastar, justement. On se demande toujours ce qu’ils sont venus foutre dans ce bordel. Ah oui, en bons opportunistes, ils ont profité de l’exposition médiatique de la team pour se faire connaître. Et c’est tout pour leur rapport avec le collectif. C’est même à cause d’eux que le concert a été déplacé d’un vendredi soir, à l’affluence sûrement importante, à un dimanche après-midi au pit pas tellement compact. Ils font même chier leurs potes, c’est pour dire. Que dire de leurs trois morceaux ? ‘Un Nouvel Orage‘ est, il faut le dire, un putain de bon titre, entre new wave à l’ancienne et rock catchy. ‘Y a même le ‘Hardcore Version Dancefloor‘ d’Enhancer qui vient s’y greffer à la fin, pas mal. Mais ‘La Faille‘ pue l’emo et n’est sauvé que par l’intervention rageuse de Toni (Enhancer) sur le break ; Franklin (chant), atteint d’un syndrome de kikoo-lolisme affligeant, commet un attentat à chaque fois qu’il ouvre la gueule. Le groupe ose même jouer ‘100eme Etage‘. Lol.

Les mecs de Pleymo ont bien compris que ce n’est pas avec des morceaux de ‘Rock‘ qu’ils font bouillir la foule. Un ‘Tank Club‘ énorme, un ‘Blöhm‘ rageur, et un ‘United Nowhere‘ en forme de final débridé (avec le braveheart raté, un régal pour les yeux) : le groupe désormais dissout a bien fait son boulot de locomotive du collectif, connue de Fontainebleau à Tokyo. Ni plus, ni moins.

Last, but not least, les activistes d’Enhancer, et leur leader David Gitlis, l’initiateur du feu-collectif, et de l’actuel Nowhere Prod. Déchaînés, les gars ont l’air heureux d’être là, n’éxécutant pas forcément leurs meilleurs titres, mais les balançant avec panache, mixant hip-hop, metal et rock avec une aisance assez déconcertante. Le David harangue la foule, représente à tout va, s’occupe des transitions, bref, un vrai super-président, mais en beaucoup plus sympathique. Belle performance.

Ce concert a marqué les dix ans du collectif, et désormais, avec Nowhere Prod, on risque encore d’entendre parler d’Enhancer et des différents musiciens du collectif -à travers de nouveaux projets- pendant quelques piges. Un objet indispensable pour tout fan qui se respecte, et qui peut se révéler agréable pour n’importe quel amateur de rock français au sens large. Et malgré le flot de critiques que Nowhere a essuyé, il y a une chose qu’on ne pourra pas leur reprocher : d’avoir transformé cette sincère bande de potes en leader d’une nouvelle scène hexagonale des années 2000, qui ont tiré pas mal de personnes de ma génération vers de nobles découvertes musicales. Et ça, ça se respecte.