The Fireman – Electric arguments

A la parution de superbe ‘Chaos and creation in the backyard‘, tout le monde ou presque, subsistent quelques sourds, s’est accordé sur les accords de Macca pour dire qu’il avait signé un album à la Beatles. Le gaucher souhaitait probablement que cet enthousiasme journalistique célèbre aussi les trois décennies durant lesquelles il a oeuvré sans ses fabuleux copains. D’où un ‘Memory almost full‘ publié peu après que tout le monde ou presque, subsistent quelques sourds, s’est accordé à qualifier d’album à la ‘Wings‘. Peu importe ce discutable choix, l’essentiel est que musicalement (et with a little help from his ex-wife) Paul McCartney intéresse bien plus aujourd’hui que durant toutes les années 90. Il a donc réactivé son side-project The Fireman. Uniquement instrumental lors des deux premiers essais, le jovial Paulo et son acolyte Youth (ex Killing Joke) ont cette fois décidé de profiter des lumières que le nom et la voix de McCartney attirent.

Le projet Fireman est régulièrement décrit comme techno-pop, ce qui en amusera plus d’un. En effet, il faut imaginer l’écriture toujours très reconnaissable de l’auteur de ‘For no one‘ délivrée des ses contours commerciaux. Pour autant, ‘Electric Arguments‘ est-il un album expérimental ? Oui et non dira le courageux. Le disque navigue en permanence entre tentatives d’aller écouter ailleurs comment ça sonne et morceaux de facture plus classiques.
L’ouverture est énorme. ‘Nothing too much just out of sight‘ prend appui sur une basse fuzz et un tempo lent mais lourd. Surtout McCartney livre une hallucinante performance vocale, comme une version ivre de ‘Oh darling‘, l’homme hurle et soulage sa peine. Superbe. Malheureusement, on retombe vite sur un terrain bien plus convenu : ‘Two magpie‘ est une bluette acoustique comme il en écrit probablement toutes les semaines, seul hic, elles ne sont pas toutes des ‘Here today‘ ou des ‘Jenny Wren‘. ‘Sing the changes‘ continue de tirer vers le bas. Tous les affreux tics de production de l’album ‘Off the ground‘ sont là, sans évoquer l’écho à la U2 qui plombe le tout. A zapper d’urgence. Si ‘Highway‘ évoque aussi les moments les plus faciles du gaucher, la conviction en plus en fait un moment fort délectable. Si on reste indulgent avec la tranquillité téléphonée de ‘Sun is shining‘, l’ambiance café colombien de ‘Is this love‘, certes audacieuse, ne déclenche guère l’enthousiasme… ‘Light from the lighthouse‘ se décline dans une approche plus pop de par son refrain à reprendre en choeurs et bluffe par sa simplicité.
Là où Macca expérimente vraiment, c’est avec sa voix qu’il maltraite avec une jouissance communicative. Le glauque ‘Travelling light‘ pourrait être un de ces morceaux acoustiques hantés de Mark Lanegan, voix comprise, indiscutablement l’un des meilleurs moments d »Electric Arguments‘. Tout comme ‘Dance til we’re high‘ durant laquelle McCartney convoque tout l’attirail de son vieil ennemi Phil Spector (batterie, cloches). ‘Lifelong passion‘ surprend car elle s’appuie sur un simple rythme et un synthé cheap à la Robert Wyatt, très belle réussite. ‘Lovers in a dream‘, sacré petit trip Radiohead période ‘Kid A‘ avec ses choeurs hantés et son chant sous mixé, et le désincarné ‘Universal here everlasting there‘, sont les moments les plus barrés mais ne virent jamais prise de tête ou répétitif, avant que le final ‘Don’t stop running‘, rappelant le pourquoi pas le Wilco de ‘A ghost is born‘, ne conclut sur une note menaçante.

Si ‘Electric Arguments‘ est par moments un peu plombé par des passages faciles se vautrant un peu trop dans l’auto-citation, il n’en contient pas moins son lot d’excellentes chansons (ce qui est un peu la moindre des choses, noblesse oblige). Paul McCartney reste très souvent pertinent, jusque dans les clichés qu’il n’évite pas toujours, et globalement ne perd jamais le fil conducteur, ce disque varié reste très cohérent. Il peut donc continuer ses éternellement exténuants V de victoire, on se chargera des doigts d’honneur pour son ex.