Interview ☭ The Subways

vm5
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Trois ans après avoir couvert leur venue chez les copains du Grand Mix, voilà t’y pas que The Subways reviennent enfin chez nous, en terre ch’ti mi. Par un concours de circonstance impliquant usage de GHB et emploi du temps surchargé, me voilà prêt à interviewer Charlotte et Billy que j’imaginais assez sympathiques. Confirmation fut faite, à moins que je ne me fasse casser la gueule par Billy pour une sombre histoire de tweet…

Cela fait un mois que vous avez commencé votre tournée, comment ça se passe jusqu’à maintenant ?
Charlotte : Ç’a été super jusque là. On a commencé en Angleterre, du Sud du pays à l’Écosse et ç’a été absolument fantastique et on est vraiment excités pour ce soir car c’est notre première date en dehors du Royaume-Uni.

J’ai lu dans certaines interviews que lorsque vous compariez les différents publics en Europe, les Belges n’arrivaient jamais à frapper dans les mains en rythme. Vous le savez, on est près de la frontière et il pourrait bien y en avoir aussi dans le public ce soir.
Billy (qui éclate de rire) : Je suis désolé d’avoir dit ça !

Pensez-vous qu’ils pourraient nous pénaliser ce soir ?
Billy (qui éclate à nouveau de rire) : Oui ! (rires) C’est possible ! Mais on ne pourra en être sûrs que lorsque je demanderai au public de frapper dans les mains en rythme, généralement je vois dans le public des personnes qui ne savent pas le faire et là je me dis « ce sont des belges » (rires).

Il y a 3 ans, vous étiez déjà ici et j’ai pris une claque en voyant votre énergie scénique, vous êtes, à mon sens, un groupe de scène et pourtant il faut en passer par l’étape studio, n’est-ce pas trop dur à vivre pour vous ?
Billy : Oui, c’est vrai que c’est difficile car on adore être en tournée, voir le public devenir fou, sauter pendant nos morceaux, jouer tous les soirs, être dans le tour bus…Visiter de nombreuses villes, découvrir de nouveaux pays, de nouvelles cultures… Mais je pense aussi que, finalement, on ne le vit pas trop mal non plus car jusque là, on a eu la chance d’avoir d’incroyables producteurs, on a eu Ian Broudie pour le premier disque, Butch Vig pour le second et Stephen Street pour le troisième… Et ce sont vraiment des personnes sympas, avec beaucoup d’humour, du coup, c’était assez tranquille, pas trop stressant… Mais sinon, c’est clair qu’on préfère être en tournée qu’en studio.

Une chose m’impressionne en plus quand vous êtes en tournée, vous jouez quasiment tous les soirs ! Comment vous tenez ce rythme ?
Billy : Beaucoup de sommeil (rires) !
Charlotte : En fait, on fait assez attention à notre hygiène de vie, on fait attention à manger sainement, à dormir suffisamment… Même si des fois, on participe à quelques fêtes… (ndr : Billy se marre) En tout cas, on essaie de ne pas trop boire, on ne boit qu’un ou deux verres, histoire d’être en forme dès le lendemain matin…

Vous semblez pas mal vous amuser en tournée, vous devez forcément avoir une anecdote à raconter, une que vous ne pouvez pas oublier…
Billy : Je pense que celle avec (ndr : ce salaud) Dave Grohl était assez dingue. Tu en as déjà entendue parler ?
Moi : Non, j’avoue que non…
Billy : Okay alors voilà, on repartait en tournée, on venait juste de faire une petite pause pour continuer à écrire le second album en fait… Et la première date se faisait justement avec les Foo Fighters dans cette incroyable stade du Lancashire County Cricket Club… Et juste avant le concert, l’équipe technique du groupe est passée dans les loges des groupes assurant les premières parties pour dire « okay, devant la scène, il y a une estrade longue de 10 mètres qui va vers le public, Dave s’en sert généralement pour courir vers les spectateurs et personne d’autre que lui n’a le droit de l’utiliser« . Et nous « okay, ça roule, on comprend« … On est donc montés sur scène et on n’avait pas joué depuis un mois, un mois et demi. C’était tellement excitant d’être là, avec ces 70 000 spectateurs en super forme, j’étais tellement surexcité que j’ai fini par balancer ma guitare par terre et à courir au bout de l’estrade pour sauter dans le public ! Je suis ensuite revenu sur scène, j’ai joué le reste du concert et j’ai fini par réaliser que j’avais fait quelque chose de vraiment mal. Je me suis dit que Dave Grohl et son équipe technique vont me tuer ! Et mon père qui est justement régisseur finit par me dire que le groupe me cherche parce qu’ils étaient furax ! Je me suis donc dit que la meilleure chose à faire était de retourner dans ma loge, prendre une douche rapide, ramasser mes affaires et foncer me planquer dans le tour bus ! Et alors que je fonçais vers ma loge, qui était en fait assez éloignée, au moment où je mets la main sur la poignée, j’entends « SUBWAY ! SUBWAY ! MOTHERFUCKER !« , je me retourne et il y a là Dave Grohl courant vers moi. Et moi je me disais « Ho mon Dieu ! Dave Grohl des Foo Fighters, mon idôle, va me TUER ! » Il court vers moi et finit par me faire une grosse accolade et me dit à l’oreille « c’était un show incroyable mais ne retournez jamais sur mon estrade ! » (rires)
J’avoue que c’est certainement le truc le plus dingue qui me soit jamais arrivé en tournée ! Parce qu’on ne sait pas, il aurait pu être fou (rires) !

Billy, tu as toujours dit d’ailleurs que tu étais fan de Nirvana, tu as ouvert pour Dave Grohl, bosser avec Butch Vig, quel effet ça te fait quand tu y penses ?
Billy : Et bien, j’avoue que j’ai encore du mal à y croire, j’ai l’impression parfois de rêver. On a RÉELLEMENT enregistré un album avec Butch Vig.
Charlotte : C’est juste incroyable… On voulait bosser avec lui, on lui a donc envoyé nos chansons et il les a aimés au point de dire qu’il voulait travailler avec nous. C’était vraiment incroyable…
Billy : Je me souviens lui avoir parlé au téléphone et avoir été soufflé par le simple fait de lui parler par téléphone. Depuis chez moi. C’était tout simplement hallucinant. C’était vraiment le rêve mais j’avoue que tout ce qui nous arrive est comme un rêve, pouvoir se réveiller le matin en France et le soir jouer de la guitare devant un public, c’est tellement incroyable… Donc quand tu repenses à tout ça, comme Dave Grohl disant que nos concerts sont bien, c’est vraiment un rêve devenu réalité.

Pour ce troisième album, vous avez bossé avec Stephen Street, quelles étaient les différences entre lui et Butch Vig justement ?
Charlotte : Je pense que cela vient de la manière d’aborder la production, ce sont tous les deux de grands producteurs, de très bons artistes en tant qu’individus mais finalement, ils ont travaillé de manière très similaire avec nous en tant que personnes..
Billy : Oui, ils nous ont vraiment traités de la même manière. Ils ont un grand sens de l’humour, ils aiment le sport, ils adorent la musique, les films, la musique… Et ils ont vraiment tout fait pour qu’on se sente à l’aise. Et je pense vraiment que c’est la chose la plus importante nous concernant, tu vois. Quand on entrait en studio, on savait le type de son que l’on souhaitait et c’est pour ça qu’on avait choisi ces types qui nous ont fait le son parfait pour chaque album… Butch Vig est à mon sens, le plus grand producteur américain et Stephen le plus grand producteur britannique, on se sent donc tellement chanceux (rires) ! Mais oui, comme l’a dit Charlotte, je pense que cela vient surtout de la manière de travailler le mixage, la manière dont ils vont travailler la batterie, la basse…

Quand je pense à ce groupe, je pense toujours musique pour faire la fête, musique pas prise de tête et ce troisième album, vous l’avez nommé « Money and Celebrity« . Qu’est-ce qui explique cette envie de pointer du doigt la société tout à coup ?
Billy : C’est une bonne question. En fait, pour cet album, j’ai écrit les paroles avant la musique, contrairement aux deux premiers. C’est vrai que d’habitude, on cherche avant tout à faire de la musique qui soit fun, et seulement ensuite, on écrit les paroles. Mais tout de même, à chaque fois que j’écrivais des chansons, je les amenais à Josh et Charlotte qui me rappellent toujours ce point, comment va réagir le public ? Est-ce qu’ils vont sauter sur place ? Ou
vont-ils rester sur place à nous regarder ? Donc on a quand même cherché à faire douze titres qui feraient bouger les gens tout en les amenant à penser aux différents sujets abordés. Comme « Celebrity » qui est une chanson sur cette jeune fille du coin qui recherche absolument la gloire et la fortune mais il y a aussi des chansons comme « I wanna dance with you » sur le fait d’être rejeté du dancefloor et « Kiss kiss bang bang » sur le fait d’aimer une personne qui te rend cinglé (rires). Mais c’est vrai que la crise financière a pas mal affecté mes amis, ma famille, ce qui m’a poussé à écrire des chansons comme « We don’t need money to have a good time » et durant l’écriture de l’album, j’ai regardé la télé, j’ai donc pu voir ces nombreuses émissions dédiées aux célébrités… On peut dire que c’est légèrement un album politique. Parce que, pour moi, rien ne serait plus chiant que d’écrire un album se voulant politique (rires)… Mais j’avoue que j’ai dû de manière indirecte avoir l’envie d’aborder tout ça, un peu… (rires)

J’ai eu l’occasion de vous voir dans le film de Guy Ritchie, Rock N’ Rolla. Comment vous êtes-vous retrouvés impliqués dans ce projet ?
Billy : C’est vrai ! En fait, on était en train d’enregistrer « All Or Nothing » à Los Angeles et un matin, mon manager me dit « le manager de Guy Ritchie a appelé, Guy devrait d’ailleurs vous rappeler d’ici une demie-heure. Je lui ai donc dit «  Mais, pour… Pourquoi Guy Ritchie veut me téléphoner ? » (rires) On ne savait pas, on pensait qu’il voulait utiliser un de nos titres dans une BO et qu’il se montrait juste très poli vis-à-vis de nous. Me voilà donc assis, près du téléphone, à attendre nerveusement, il finit par m’appeler et me dit « salut Billy, c’est Guy Ritchie, je réalise un film appelé « Rock N’ Rolla » et j’adore le titre « Rock N’Roll Queen », je suis allé voir sur Youtube et j’ai pu voir comme vous étiez déchainés sur scène. Je pense que serait parfait pour mon film, est-ce que ça vous dirait d’être dans mon film ? » On était soufflés et d’accord bien sûr (rires) ! Un mois plus tard, on faisait une tournée de petites salles en 2007 avant de faire quelques festivals anglais, l’équipe est donc venue lors d’un de ces concerts, Guy nous a demandés de jouer comme d’habitude, afin de nous mettre dans le film. Et c’était fait ! On s’est retrouvés à faire la première du film, à Londres. On s’est bien amusés, on était là à manger des popcorns et en plein milieu du film à dire « C’est moi ! C’est moi ! » (rires) C’était vraiment super.

Pour financer cet album, vous avez utilisé Pledge Music (un site récoltant des fonds pour monter des projets comme Kickstarter aux States). Car finalement, même si vous étiez sans label à ce moment, vous auriez pu vous contenter d’attendre et de trouver un label pour le financer. Après tout, vous êtes The Subways. Vous avez tourné dans un film au cinéma !
Billy : (rires) C’est vrai qu’à l’époque de nombreux labels étaient prêts à nous signer…
Charlotte : Le truc, c’est que c’est un vrai processus. C’est toujours très long et on n’avait pas spécialement envie d’attendre trop longtemps avant de nous mettre sur cet album. on était prêts, on avait vraiment envie d’y aller genre « allons-y la semaine prochaine » (rires). Stephen Street était déjà sur le coup, ne manquait que le label et on s’est dits que ce n’était pas vraiment un problème…
Billy : De cette façon, on a pu découvrir Pledge, qui nous a semblé être une bonne manière de casser les barrières entre nous et les fans, tu vois. On était tout de suite en studio et les fans étaient totalement impliqués, ils nous ont littéralement aidés à faire cet album, certains sont venus en studio enregistrer les chœurs, on a fait quelques shows acoustiques dans les salons et même les cuisines de certains, on a fait des soirées, enfin on s’est bien amusés. Donc Pledge nous a semblés être la bonne solution au bon moment. Et j’encourage les groupes qui en ont besoin d’utiliser Pledge Music.
(On discute un peu des concerts qu’ils ont fait chez les fans, les deux musiciens m’expliquent avoir pris du bon temps avec les fans, à faire des soirées, à boire…)

D’ailleurs, en parlant des fans, on va revenir aux réseaux sociaux ensuite. Même si je pourrais bien être en danger physique pour le coup…
Billy : (rires) Okay !

Vous avez balancé quelques morceaux gratuits sur le net avec la sortie de l’album, comment vous vous situez par rapport à la situation actuelle de la musique, le piratage tout ça…
Billy : Je pense qu’on a pas mal de chance parce qu’on est justement un groupe de tournée, on adore être en tournée. On arrive à en vivre, payer nos factures, à manger, ce genre de trucs… Même si on n’a pas vendu tant d’albums que ça (rires). Mais c’est vrai qu’on peut voir les répercussions du téléchargement sur les labels, quand on a quitté Warner, 50% du staff avait été remerciés et ils ne signaient plus de groupes. Du coup, il est très difficile de signer de jeunes groupes dans ces conditions financières. C’est vrai qu’il y a des trucs qui ne vont pas dans l’industrie musicale, il y a une perte de repères concernant la valeur de la musique, les gens téléchargent des morceaux qu’ils jettent aussi vite, c’est qui est une honte… Mais en même temps, internet est un super outil pour diffuser tout ce qui concerne son groupe et de cette manière, on a vu aussi émerger des groupes qui n’auraient pas pu tourner sans ça. Donc pour l’instant, c’est difficile à dire, je ne peux pas dire si c’est une mauvaise chose ou une bonne chose, je pense qu’on ne saura d’ailleurs pas le dire avant les 10 ou 20 prochaines années encore.

Revenons en aux médias sociaux…
Billy : Allez, vas-y, balance (rires) !

En mars 2010, quelqu’un de notre équipe a utilisé le compte Twitter du site pour écrire « The Subways sont… »
Billy : (à la limite de sauter du canapé) SUPERFETATOIRES !!! Je me rappelle de ça ! Je m’en rappelle !! Mais ce n’était pas moi.
Moi : Non, non, mais pas de problème, c’est le ton du magazine, on aime sortir des âneries…
Billy : Je me suis senti tellement coupable à ce propos, ma petite amie m’avait dit que quelqu’un avait écrit quelque chose de pas sympa…
Moi : Mais justement comment vous avez pu savoir ça, car c’était écrit en français, qui a balancé ??? (Billy est plié) On en a pas mal rigolé entre nous pour tout dire…
Billy : En tout cas, je suis content d’apprendre que vous ne l’avez pas mal pris. J’avoue que quand on m’a dit « superfétatoires » (ndr : « superflouous » en anglais qui est quand même bien plus explicite dans la langue de Shakespeare), j’étais un peu énervé et j’ai pensé « fuck you » sur le coup mais après avec le recul, je me suis dit que c’était méchant… D’où l’idée de vous dire d’aller plonger votre tête dans les toilettes.
Moi : Parce que pour tout dire, superfétatoire en français, c’est limite compréhensible tellement ça sonne comme un mot compliqué.
Billy : En tout cas, tu peux dire à la personne qui a écrit le tweet (coucou Marku !) que tout va bien. Je m’en suis quand même voulu de mon côté.
(Je lui raconte pour l’anecdote notre récidive avec le tweet de Daryl Palumbo, Billy se marre et me dit que Daryl est un mec cool).

En tout cas, ça montre toute la puissance des réseaux sociaux…
Billy : Franchement, c’est pas génial ??? Je peux tweeter mon joueur de foot préféré, mon groupe préféré et des fois, ils répondent et là, t’es super content, ça a permis de casser les barrières un peu plus encore… Mais c’est vrai que c’est super, après les concerts, on a l’habitude d’aller remercier les gens, de poster des photos, il n’y a plus de barrières…

En tout cas, j’étais super curieux de savoir qui avait bien pu vous traduire le tweet ? Parce que franchement, c’est pas un mot qu’on utilise beaucoup en français, on n’aurait jamais imaginé que vous auriez pu le comprendre…
Billy : En fait, c’est ma femme qui parle un peu le français et qui me l’avait traduit en me disant que c’était vraiment méchant. Moi j’étais du genre « fuck it« ..
Charlotte : On ne savait pas si on avait bien compris…
Billy : C’est pour ça que je m’en suis voulu (rires).

Et sinon, quelle est la prochaine étape pour vous après cette tournée ?
Charlotte : Et bien cette tournée s’achève en novembre, on a quelques shows prévus en décembre. Mais on va pas mal tourner l’année prochaine, en février-mars avant de faire les festivals l’été prochain. Donc beaucoup beaucoup de concerts.

Et les États-Unis ? J’ai vu que certains fans réclamaient votre venue.
Charlotte : On l’espère car on a eu de super concerts là-bas. Il n’y a rien d’établi mais on l’espère.
Moi : Appelez Dave et Butch, demandez-leur un coup de main !
(Billy et Charlotte se marrent)
Billy : Ouais, « Butch, est-ce que tu peux venir nous chercher en avion ? » (rires)

Et bien merci à vous pour votre temps et bon concert pour ce soir !
Billy : Merci à toi et encore désolé pour le tweet (rires) !

Je tiens à remercier Laura et tout particulièrement Marion pour son aide à organiser cette rencontre, Vincent pour la logistique interview (parce que ça fait toujours plaisir de passer au Grand Mix) et quand même un peu l’emploi du temps de Virginie, qui m’a permis de lui piquer sa place.
Sans parler du groupe lui-même qui a été suuuuper cool et a vraiment joué le jeu de la promo avec bonne humeur.

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