Interview ☭ Blood Red Shoes

vm5
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Disons-le, quand on fait une interview sur Visual c’est bien parce qu’on aime un groupe et depuis quelques temps, je me rends compte que je prends un vrai plaisir à interviewer des groupes plus « modestes » parce qu’il y a un véritable échange. Et ce soir, j’ai rencart avec les Blood Red Shoes. Malheureusement, à l’entrée de la salle lilloise, l’Aéronef, on me signale que ça va être tendu niveau timing. Le tour manager me le confirmant ; « Combien de temps veux-tu ?« , moi, « Autant que possible !« . « Je t’en donne 15« . Très bien, même si je ne les respecte jamais car je ne surveille pas l’heure. Et généralement, les groupes non plus. Mais ce soir, on parle de 15 vraies minutes. Celles qui sont faites de 60 secondes.
Je rentre dans la loge du groupe, Steven Ansell et Laura Mary Carter sont en pleine discussion, Laura étant déjà sous la couette pour ma venue (il faut dire que le groupe a un petit problème de clim qui fait du zèle donc ça pèle un peu). Le tour manager se marre en précisant qu’ils peuvent m’appeler Ross … Le groupe me demande pourquoi, je leur explique ma vieille passion pour la série Friends et mon prénom à rallonge mais alors que je prépare mes affaires pour l’interview, je me rends à moitié compte que Laura semble évoquer avoir eu des posters… de Ross ? Nous dirons que oui parce que je n’en suis pas sûr. L’Amour avec un grand A vient de naitre pour cette soirée. Je vais lui offrir du rêve.

Tout d’abord, comment vous sentez-vous pour ce début de tournée ? Votre concert hier à Paris s’est bien passé ?
Steven : C’était super, en fait, même si on a eu un problème matériel.
Laura Mary : Oui, en fait Steve a explosé son earplug d’entrée de jeu !
Steven : J’étais trop content d’être là (il se marre). Mais c’était cool, oui.

Je sais que cet album a été conçu de façon plus ambitieuse, et à mon avis, c’est assez vrai, on le ressent dans votre son. Est-ce que cela a changé quoi que ce soit dans votre manière d’aborder l’exercice du live ?
Steven : En fait, non pas tant que ça parce qu’on n’a pas cherché à ajouter de musiciens ou d’instruments, donc sur scène, on joue de la même manière finalement…

…Parce que je vous ai suivi sur les réseaux sociaux et si je lis votre fil Twitter, le 17 Octobre, vous écriviez « on vient d’arriver au Motor Museum, demain est le premier jour d’enregistrement de l’album 3 ». Pour moi, cet enregistrement a semblé super simple alors qu’en fait, j’ai appris que le processus de création de cet album avait été super éprouvant. Au début, vous n’étiez pas satisfaits et vous vous êtes quelque peu ruinés financièrement durant cette période, vous pouvez nous en dire plus ?
Steven : Alors oui, ça peut paraitre bizarre vu sous cet angle mais ce qui nous a pris beaucoup de temps, c’est l’écriture. Oui, l’écriture a été très dure car on a vraiment cherché à repousser un peu nos limites, lâcher nos habitudes pour proposer de nouvelles choses…
Laura Mary : Pour moi, c’était plutôt l’inverse car niveau guitare et chant, il y avait plus de choses à gérer. Donc me concernant, ç’a été un vrai challenge (s’en suite un véritable échange personnel du groupe assez drôle à voir).
Steven : C’est surtout qu’on avait l’impression d’avoir merdé l’album à un moment de tout ça et on a eu tendance à vouloir refaire certaines choses. Finalement, on a décidé de faire un break, de prendre un peu de recul pour nous apercevoir après coup qu’il n’était pas si mauvais (rires). Non, mais en fait, il est très important de savoir se fixer une limite lorsque tu es impliqué dans un processus créatif. Sinon tu cherches toujours à faire mieux et tu ne sors rien. Tu ne peux pas te laisser paralyser par ce processus permanent de recherche et d’amélioration.
Laura Mary : L’album est clairement moins immédiat mais je pense que c’est une bonne chose.

Je suis assez d’accord, avec le web, il y a une telle profusion de musique que si un morceau n’est pas immédiatement apprécié, les gens passent plus rapidement à autre chose alors que lorsque j’étais gamin, c’était un budget et on prenait le temps d’apprécier un album, en l’écoutant encore et encore…
Laura Mary : Me concernant, je sais que les albums les plus immédiats sont généralement ceux dont je me lasse le plus vite alors qu’à l’inverse, ceux qui demandent des efforts finissent par s’inscrire dans la durée. Au final, ce sont ces albums que l’on retient…C’est finalement pas plus mal selon moi que notre dernier album aille dans ce sens.
(Et là lecteur, tu comprends qu’une connexion profonde vient de s’établir).

Vous avez choisi le titre « Cold » comme premier single pour ce nouvel album, n’était-ce pas un risque de choisir ce titre alors que vous aviez pour habitude de sortir des singles plus nerveux comme « I Wish I Was Someone Better » ou encore « Don’t Ask »…
Steven : Oui et non parce que pour nous, cet album avait une réelle importance. On l’a vraiment abordé de manière différente, ce qui explique aussi qu’on ait eu envie de le présenter différemment, maintenant le titre est toujours lié à ce que nous sommes, à l’entité du groupe tel que les gens nous connaissent, c’est juste qu’on fait évoluer notre son naturellement. On évoque souvent « Mellon Collie » des Smashing Pumpkins. Tu vois, cet album arrive vraiment à mêler titres acoustique et titres heavy sans que le groupe n’ait trahi son identité et pour nous, c’était vraiment une référence, c’était leur troisième album aussi en plus !

Je sais que vous avez tourné le clip de ce premier single à Paris (même si ça n’avait pas de réel lien avec la ville qu’on ne peut vraiment identifier), vous avez aussi une chanson appelée « Je Me Perds » (pour le côté poétique de la langue d’après vos précédentes interviews) alors avouez… Vous en pincez un peu pour la France, non ? C’est pour nos prostituées qui n’agressent pas leurs clients ? Qu’est-ce que c’est ? (Il faut savoir que Steven a été agressé lors d’une date à Prague par des prostituées, et a écrit un titre qui raconte cette mésaventure ; « Je Me Perds »)
Steven : (rires) Je ne sais pas… Peut-être. Oui, peut-être que c’est pour les prostituées. Faut savoir que je n’étais pas client hein, je ne cherchais pas à m’envoyer en l’air, c’est juste que généralement, les prostituées sont bien renseignées quand tu cherches un endroit. Je t’assure que c’est vrai. Maintenant, il y a un truc intéressant avec la France, c’est que ce n’est pas un pays facile ! En Angleterre, il faut savoir que le moindre groupe US qui débarque est cool, alors que nous, quelque part, on se sent plutôt « européens », tu vois ? En comparaison, lorsqu’on joue aux Pays Bas ou en Allemagne, dès les premières notes, le public devient cinglé alors qu’en France, c’est plus compliqué. Il faut vraiment conquérir la salle au fur et à mesure du concert. Venir jouer chez vous, c’est un défi. C’est comme quand t’es ado, tu veux toujours avoir la fille que tu ne peux pas avoir !
D’ailleurs, on avait que deux dates en France prévues sur cette tournée et c’est moi qui ai directement appelé pour que l’on ajoute d’autres dates (ndr : Besançon le 1er Juin et Caen le 2 Juin).
Moi : Ha ouais, c’est plutôt cool ça et assez rare !
Laura Mary : Ce que ne dit pas Steve, c’est qu’en plus, il parle le français.
Moi : C’est vrai ? C’est bien, ça ! Je dois entendre ça !
Steven : (rires) Ho non, tu sais, c’est pas génial…
Moi : Allez, tu peux bien faire ça, je te fais déjà profiter de mon affreux accent anglais..
Steven : « Je parle un peu le français ».
Moi : Bien, bien ! C’est pas mal.
Steven : Merci (ndr : Steven en profitera même lors du concert pour perfectionner un peu plus encore ses connaissances, jetez un œil au live report).

Il faut savoir qu’en plus, on est un pays où le rock a pas mal de difficultés à percer, certains groupes n’hésitant pas même à contourner la France. Par exemple, les (salauds de) Foo Fighters n’avaient pas joué en France depuis des années.
Steven : Ils ne sont même pas venus au Rock En Seine ?
Moi : Si, mais c’est assez récent alors qu’ils ont fait des stades complets en Angleterre. Chez nous, c’est impensable.
Steven : Moi, j’avoue que les concerts en stade, de toute façon, c’est pas trop ma came.
Laura Mary : (qui semble prendre ma défense) Je suis pas tout à fait d’accord, certains concerts en stade peuvent être sympas aussi. (ndr : Love is in the air les enfants).

J’ai récemment pu constater que sur certains shows TV/radio, vous aviez tendance à jouer vos titres en acoustique, c’est un truc qui vous attire ? Parce que je vous ai vus sur l’émission allemande « On Tape » où vous aviez demandé au public de s’asseoir autour de vous…
Laura Mary : (rires) Oui, c’est vrai qu’on a fait ça mais après coup, on faisait moins les fiers parce que c’était assez intimidant en fait.
Steven : Pour nous, ce n’est rien d’autre qu’une manière de varier un peu nos passages…

Donc aucune intention de faire des chansons acoustiques ? Ce n’est pas un reproche hein, même si j’avoue que je préfère les titres plutôt nerveux.
Steven : Non, pour l’instant, on a rien prévu de tel.
(Malheureusement, les 15 minutes qui m’étaient allouées sont terminées. Le tour manager étant venu mettre fin à ce toujours trop bref échange.)

Merci à vous pour votre temps et bon concert alors !
Steven : Merci à toi pour cette interview.
Laura Mary : Oui, aucun souci et surtout merci à toi car grâce à ta venue, j’ai découvert le sens de l’expression « coup de foudre » (ndr : une partie de cette phrase est fausse).

Hélas et de fait, la suite, je ne peux vous la raconter car comme on dit dans le milieu, « ce qui se passe backstage reste en backstage », sauf si t’es allé voir Marilyn Manson qui se fera un plaisir d’en parler dans sa prochaine autobiographie…

Je tiens à remercier le groupe pour sa dispo malgré un timing serré, la toujours très sympathique équipe de la salle l’Aéronef et bien évidemment Quentin du label Coop ainsi que le label lui-même bien sûr.

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