Interview ☭ BRNS

Quelques semaines avant la sortie de Patine, nous avions rendez-vous avec BRNS dans un hôtel parisien. Deux ans quasiment jour pour jour après une folle interview lors de leur concert à la Péniche, c’était l’occasion idéale d’évoquer l’enregistrement de ce nouvel album, quelques anecdotes de tournées et les choses à venir…

L’album sort bientôt. Il était prévu fin août à la base, pourquoi ce petit décalage ?

On est partis de Naïve et comme on connaissait bien l’équipe de Pias à Bruxelles on a signé chez eux. Tout se passe super bien.

On s’est vus il y a quasiment 2 ans à la Péniche de Lille. Je vous ai vu tourné partout depuis. Je me rappelle qu’à l’époque vous disiez apporter beaucoup d’importance à l’univers visuel. Quelle est donc l’origine de la pochette ?
La pochette, c’est un ami à nous (Boris Görtz) qui l’a faite. La démarche comme pour pas mal de trucs sur lesquels on bosse (pochettes ou clips), on laisse plus ou moins carte blanche. On lui a filé les titres encore en cours de mixage, il les a écouté et il est venu avec cette idée de bosser sur les matières et les couleurs. C’est un gars qui fait des effets spéciaux et dans la projection 3D sur bâtiment. Donc il voulait en opposition à ça un support matériel.

En effet, le rendu est très brut, ça donne envie de voir et de toucher ce qui a en dessous.

A fond. Il a acheté des plaques de métal et il a fait préparer dans une officine dont lui seul a le secret le matériel nécessaire pour altérer et accélérer le vieillissement du métal. Il a joué sur différentes couleurs et a confectionné une maquette en 4 parties. Ce qu’on voit sur la pochette existe donc vraiment : c’est des photos prises de la structure existante et exposée chez lui. Pour revenir à la question, il nous a proposé des croquis dans un premier temps et vu que ça avait l’air cool on a validé l’idée.

Je me souviens que pour le précédent vous aviez aussi bossé avec un ami à vous (CARL) et que le dessin avec la blessure avait donné le nom de la pochette. J’en déduis que c’est la même chose pour celui-là pour Patine et le travail sur la matière ?
C’est exactement ça.

C’est bien les mecs, vous êtes cohérents. (rires)
C’est surtout qu’on n’est pas très inventifs pour les titres d’albums et qu’on a besoin d’un petit coup de pouce pour les titres.

Le casting est bon aussi visiblement, c’est donnant-donnant. Au niveau de l’enregistrement, je suppose que vous avez jonglé entre les concerts pour composer et qu’il n’y a pas eu de période dédiée à la compo ?
Peu en effet. Une semaine par-ci, par-là. On a pris 2 semaines de studio pour mettre en boîte toutes les maquettes qu’on avait sur les 2 ans. Et encore, on a réussi à mettre une date entre 2.

Vous tournez pas mal, quasiment 100 dates par an non ?
Un peu moins. 80.

Ca s’est passé comment l’enregistrement ? Vous aviez des bases de basse/batterie comme sur Wounded ?
Tout était déjà prêt. On avait deux semaines et demies de studio et les maquettes étaient là. Quand on compose, on le fait en home-studio. On capte tout de manière un peu dégueulasse : les arrangements, les guitares, la batterie, les voix. Le studio, c’est vraiment pour retranscrire tout ça au propre et professionnelle.

A l’écoute de l’album, il y a quelque chose qui m’a frappé outre l’atmosphère assez marquée dans les morceaux, c’est que ce n’est pas la grosse gaudriole. Ce qui est clairement en contraste avec ce que vous dégagez humainement. Après là où c’est intéressant, c’est qu’en repassant Wounded, il n’y a pas de gap où on se dit : le premier c’était la fête du slip et maintenant c’est la déprime. Bref, c’étaient quoi vos intentions ? Je me souviens que vous m’aviez dit que le suivant allait être automnal. (rires)
Il l’est quand même. Il est automnal, d’où la date de sortie. A part 2/3 lignes directrices sur le son comme avoir moins de compression, un son plus aéré et essayer de faire un vrai album plutôt qu’une compilation de titres… Au-delà de ça, les directions n’ont pas été prises et c’est resté instinctif. On compose par 20 secondes et on coupe et bricole des trucs. A la fin, ça fait un titre. On laisse reposer 1, 2 ou 3 mois et on revient dessus. Eventuellement, on retravaille mais on s’est jamais dit : on va faire du math-rock ou un truc plus speed.

Qu’est ce qui a changé entre l’écriture de Wounded et celui-ci ?
Après un ancien projet, Tim et Antoine avaient composé la quasi-totalité de Wounded, à part 2 morceaux. Je les ai rejoint 3/4 mois après pour l’enregistrement des squelettes des 4/5 titres existants. Cette fois, on a vraiment composé à 4. On a même quelques morceaux issus de jams, ce qu’on faisait jamais avant. C’est parti de sessions de mise au vert à la campagne où on est partis pour bosser. Patine est plus issu d’un travail collectif.

Vous l’avez enregistré à Bruxelles ?
Ouais, on a fait beaucoup de choses un peu pareil. On n’a pas de grand rêve autour de l’enregistrement dans un studio mythique ou tel producteur. On veut juste un endroit où on se sent bien qui puisse nous faire arriver à notre vision. C’est un truc très modeste, ça nous fait pas rêver d’aller dans un grand machin et de se foutre la pression. On a fait ça à la maison et c’est très bien. Pour le prochain, on serait capables d’y retourner sans problème.

Par rapport au prochain, il vous reste des morceaux en stock des sessions de Patine ?
On a fait 13 morceaux, il y en a 11 sur l’album. On les a déjà tous joués en live, peut-être que certains sortiront plus tard. Mais après, on n’a plus rien. Au vu de notre processus de compo, on n’a pas de fond de tiroir parce qu’on enregistre en termes de morceaux complets. Par contre, on a déjà commencé à bosser sur le suivant.

Et pour la période d’enregistrement, c’était quand ?
En décembre 2013 pour l’enregistrement et 2 ans de composition au total. Avec Wounded pour lequel on a beaucoup tourné, on avait pas toujours envie de retourner dans un local sombre pour y enregistrer du son.

Je me rappelle qu’on avait déjà parlé des plaisirs de jouer dans des coins pas toujours accueillants…
Ah ça a changé entre temps dans certains pays comme la Suisse. Paléo et Couleurs 3, c’était une de nos expériences de public les folles. Après, tu peux avoir des publics très posés comme la Suisse allemande mais ça fait partie de l’expérience.

Parmi toutes ses dates, quel est votre meilleur souvenir ? Une rencontre, un truc insolite…
Se faire féliciter par Rudy de Plus Belle La Vie à l’île de Réunion. Il arrive, on ne l’a pas reconnu, avec une moustache et nous dit : « Les gars, super concert vous m’avez vraiment impressionné ! » Et là, on se dit qu’on l’a déjà vu quelque part et on le retrouve… Sachant qu’après, tu te rends compte qu’on regarde PBLV…

Oui, ça vous remet face à vos propres… faiblesses (rires)
Tim à Antoine : Je pensais que tu allais sortir Cate LeBon mais visiblement Rudy t’as plus marqué.

Rudy, c’est un souvenir qui reste parce que bon,… Cate Le Bon, c’est autre chose mais c’est plus à César de le raconter.

César : Elle a complimenté mon jeu de guitares et j’étais très très flatté parce qu’on est allés voir son concert juste avant. Elle est venue pour le notre et on a mutuellement apprécié nos concerts respectifs. (s’ensuivent d’autres remarques qui n’ont bien sûr pas atteintes notre chaste micro…)

Quel est le planning pour la suite ? J’ai vu que vous faisiez une carte blanche au Trabendo le 10 Décembre ?
Oui, on nous a dit carte blanche mais les premiers groupes proposés avaient du mal à passer…

Carte grise donc ?
Après, c’était carton rouge… Là, il y aura Juan Wauters, un groupe américain She Keeps Bees et Peter Kernel. Tu les connais peut-être ?

Justement, vous me les aviez conseillé lors de l’interview précédente et j’ai pu les voir 6 mois plus tard et c’était génial. Dans la Cave aux Poètes à Roubaix après Mac DeMarco, c’était excellent et très relax.
On les a croisé quelques fois, même juste pour faire la fête et on est bien chauds pour remettre le couvert. On est aussi super fans de ce qu’ils font et c’est cool qu’ils aient acceptés de venir sur Paris pour jouer.

Un groupe très DIY dans l’esprit. D’ailleurs qu’en est-il de Luis Records ?
Patine est aussi sorti sous Luis Records justement, avec une licence Pias. Le contrat nous permet de rester producteur du disque, comme sur Wounded : un disque excellent pour lequel on a souhaité garder la même démarche. (rires)

Dernière question à la con : c’est quoi votre album de l’année pour l’instant ?
Antoine et Diego : Ought.
Tim : Metronomy.

Et en live ?

Tim : Madensuyu, mon plus gros frisson.
Diego : Shams.

César : The Districts. Un groupe américain qu’on a pu voir lors de quelques dates qu’on a faites en Angleterre. On avait une soirée off à Manchester et quand on est allés checker l’endroit où on jouait le gérant nous a conseillé d’aller jeter un oeil à un bar au coin de la rue parce que ça jouait. Il n’y avait pas grand monde mais c’était puissant. J’accroche moins en disque mais c’était une énorme surprise.

Ok, on note les noms et on ira écouter. Patine, ça sort donc le… ?
10 Octobre.

NDLR : Ce qui fait que tu peux déjà aller l’écouter cher lecteur.

De gros remerciements à Mélissa bien sûr et à Antoine, César, Diego et Tim pour leur temps et leur sympathie.