Model/Actriz ✖︎ Pirouette

Lopocomar
5 min. de lecture
9 Incompréhensiblement irrésistible
Note finale

Trait d’union invraisemblable entre la noise et la pop, entre les pogos et les pistes de danses, Model/Actriz débarque en trombes et en paillettes avec Pirouette. Un disque indéfinissable et ravageur.

Revenir deux ans après le coup d’éclat qu’a été Dogsbody n’est pas une mince affaire. Sans abus de langage : Model/Actriz est un ovni. Ayant trouvé sa formation finale juste avant les confinements et à la prise de parole rare, le groupe s’est attiré les faveurs des critiques et la ferveur du public grâce à un son sulfureux et des concerts aux allures de transe incomparable. Avec sa toile de fond suffocante où tout semble être mis en place pour ne jamais vraiment quitter l’étreinte dans laquelle l’auditeur est piégé, de son plein gré ou non d’ailleurs. Au milieu de tout ça, Cole Haden au chant incarne plus que tout cette approche jusqu’au boutiste. Sur Pirouette, son histoire personnelle tout comme son interprétation prend plus de place.

Maintenant repéré et embauché par Miley Cyrus pour écrire un titre sur son prochain album, le chanteur continue de se livrer via un chant clairement moins susurré alimenté par des anecdotes d’enfance, de tournées ou une interlude racontant son premier crush. Quelque soit le titre, la sentence restera la même : comme tous ces compères musiciens, il livre une performance unique, surréaliste, intense. Ce dernier adjectif vissé aux corps des membres de Model/Actriz fait sûrement toute la différence. Ces morceaux ne prennent pas le temps. Quelques secondes et la température a pris 30 degrés, on a déjà atterri dans le refrain et nous voilà embarqués dans un rodéo de 4 minutes 30 bien accrochés à leurs rythmes rebondissants. Que l’ambiance soit grandiloquente, dansante ou intimiste, on ressort de chaque morceau captivé, captif et lessivé.

Une sensation que l’on commence à connaître puisque s’il y a bien une marque de fabrique, c’est ce don à savoir monter en pression et dans le souffre avec une rapidité folle. Rassurez-vous : les New-Yorkais ne font pas dans la formule puisque le tempo est ralenti à plusieurs reprises dont l’apothéose s’appelle Baton, finish évident que l’on pressent en clôture des futurs sets. Une drôle de berceuse, comme si on avait demandé  à une IA de mélanger le groupe à Radiohead. Le désir de s’ouvrir aux autres, un son qui se diversifie, le goût du risque, c’est aussi ça que Pirouette raconter. Dans la forme et dans le fond, au vu du nombre de paroles autobiographiques dont il regorge.

Il faudrait bien plus d’un paragraphe pour souligner encore une fois le travail d’exception à la production de Seth Manchester dont le CV pèse trop lourd pour LinkedIn puisqu’il a été aussi commandité par DITZ et METZ. Que ferions nous ces dernières années sans cet homme ? Un travail remarquable qui semble très difficile à exécuter, au vu du caractère compact des instruments tellement resserré dans le mix qu’on a du mal à les discerner. Un résultat que l’on peut aussi imputer à un album plus porté par la musique électro et la dance au détriment des influences noise du précédent.

Que l’on aime ou non, il est impossible de trouver à quoi ressemble ces 11 titres et le moins qu’on puisse dire, c’est qu’ils décontenancent. Même pour un cintré ayant écouté plus des dizaines de fois le millésime précédent, il ne faut pas s’attendre à tomber immédiatement sous son charme. La faute aux trois magnifiques singles, Cinderella en tête, ayant peut-être créé l’illusion d’un disque filant tout droit à 150 sur l’autoroute de la violence transcendée. Pour ceux en quête d’un choc, Departures inspirée notamment par la routine d’avant concert du chanteur, Audience revenant sur le rapport entre un artiste et son public puis l’assourdissante Ring Road seront là pour vous servir. La découverte passée, on revient pour une énième réécoute pour renouveler l’expérience. Afin de comprendre ce qui vient de nous arriver. Sans saisir mais sans jamais bouder notre plaisir. Comme lors de leurs concerts où notre attention est complètement absorbée, il est impossible d’écouter de manière distraite cette musique et c’est ce qui la rend par les temps qui courent d’autant plus… fascinante.

Cerise sur le gateau : qui dit nouvel album annonce nouvelle tournée et le groupe sera à Paris au Petit Bain le 17 juin.

 

Note finale
Incompréhensiblement irrésistible 9
Avis général 9
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