The Notwist – Close To The Glass

Tenus en haute estime depuis l’assez exceptionnel ‘Neon Golden‘ de 2002, les allemands de The Notwist nous ont habitué à des silences prolongés entre chaque album. Six ans séparaient déjà ‘The Devil, You + Me‘ de son illustre prédécesseur, et six ans d’hibernation ont de nouveau suivi jusqu’à ce nouvel album si l’on excepte l’anecdotique BO instrumentale ‘Sturm‘ de 2009. Les frères Acher et Martin Gretschmann sont du genre à se disperser sans arrêt pour honorer divers projets et collaborations, mais en tant que groupe leur cycle créatif reste inchangé depuis la fin des années 90. Après le punk et les grosses guitares des débuts, la révolution pop amorcée avec ‘12‘ et ‘Shrink‘ a mis du temps avant d’aboutir au joyau de 2002, lui-même suivi d’une longue période d’incubation ayant mené à un disque encore plus subtil, réfléchi et travaillé en 2008. La question est donc simple: que nous réserve cet espèce de cousin germain de Radiohead en 2014? Un nouveau tour de magie électro-pop à la ‘Neon Golden‘ ou un album plus organique dans la veine du très beau ‘The Devil, You + Me‘? Ou un nouveau départ?

Ni l’un, ni l’autre, ni même le suivant. ‘Close To The Glass‘ part dans tous les sens dès les premières minutes et de façon tellement anarchique qu’il est bien difficile d’y déceler le perfectionnisme des deux derniers albums. Pire encore, ces nouveaux morceaux semblent déconnectés les uns des autres d’un point de vue émotionnel et lyrique, ôtant au disque toute cohésion ou signification dominante. Ce qui, après tout, était l’un des points forts de ses ainés et permettait une belle immersion. Mais un album inachevé et bordélique n’étant pas obligatoirement désastreux de bout en bout, quelques réussites surnagent, tel un petit pot-pourri de chansons lorgnant tour à tour sur ‘Neon Golden‘ et ‘The Devil, You + Me‘, avec une ou deux nouvelles idées. Passons donc sur l’électro peu captivante des deux premiers titres qui font blip-blip, puis prrrk prrrk et dong-dong-dong-dong, ainsi que sur le single plus engageant mais plutôt bourrin ‘Kong‘, sur lequel Markus Acher chante hélas assez mal en poussant maladroitement son chant dans des registres peu flatteurs. Une sorte de ‘One With The Freaks‘ pour le beauf. Passons également sur l’expérimentation sans saveur et les boucles irritantes d »Into Another Tune‘ – nous en sommes déjà au deuxième tiers, mine de rien – et voici ‘Casino‘, jolie ritournelle acoustique bourrée de charme qui nous ramène en 2008. Pas le temps de s’attendrir car s’ensuit la bien-nommée ‘From One Wrong Place To The Next‘, compo à nouveau trop informe pour être honnête. Le plus laborieux est heureusement derrière nous et la deuxième partie laisse penser qu’un sequencing mieux agencé aurait donné une plus fière allure à l’ensemble: l’épique ‘Seven Hour Drive‘ est un hommage appuyé à My Bloody Valentine comme on en entend des dizaines chaque année, pas très original pour un groupe comme The Notwist (mais suffisamment enlevé), suivi de ‘Run Run Run‘ et ‘Steppin’ In‘, deux morceaux qui laissent judicieusement la voix sensible et addictive d’Acher dominer les débats. Place enfin au bel instrumental ‘Lineri‘, envoutante pièce ambiante renforçant la frustration que l’on peut sentir à l’écoute de ‘Close To The Glass‘. Il y avait sans doute un vrai parti-pris à exploiter et un pas décisif à faire dans une direction ou une autre, ce que confirme la coda de ‘They Follow Me‘ en toute fin de course en reprenant habilement les blip blips de ‘Signals‘ sur fond de cordes. Mais en l’absence de vrai fil conducteur et en petite forme côté songwriting, The Notwist livre un disque qui au mieux rappelle furtivement les gloires passées et au pire s’engage dans un cul-de-sac incohérent. Venant d’un groupe si ambitieux, on pouvait espérer plus.