FOO FIGHTERS ★ PARIS ACCORHOTELS ARENA

Lors de leur dernier passage à Rock en Seine, Dave Grohl nous avait promis que les Foo Fighters n’attendraient pas cinq ans pour revenir. C’était en 2011. Ne soyons toutefois pas trop durs puisqu’ils auraient tenu leur promesse si le concert du 16 novembre 2015 n’avait pas été annulé pour les raisons qu’on connait. Ils avaient d’ailleurs dédié leur EP « Saint Cecilia » aux victimes des attentats du Bataclan et par la même, promis qu’ils reviendraient « de nouveau célébrer la vie et l’amour par leur musique comme il se doit ». Spoiler alert : ce soir la promesse a été tenue.

Crocs sanglants pour proie inerte

Côté première partie on peut dire qu’on a été gâtés puisqu’il s’agissait de Red Fang ! Je commence à les avoir vus un certain nombre de fois et peu importe le lieu ou l’heure, les concerts de Red Fang sont toujours une immense fête. Malheureusement, il y a un début à tout.

Après leur traditionnelle poignée de main, les heavy gentlemen se mettent à l’ouvrage et nous envoient leur stoner aux riffs et mélodies ultra-efficaces. La setlist est essentiellement composée des singles de leurs quatre albums et pour le temps qui leur est attribué c’est largement suffisant.

Les plus grincheux pourront critiquer le son, mais il était en vérité plus que convenable considérant ce qu’on a déjà pu subir dans cette salle. On distingue clairement tous les instruments et les deux chanteurs sont parfaitement audibles.

Non, si sur scène tout est comme d’habitude impeccable, le malaise vient de la vision d’horreur qui lui fait face : une armée de morts-vivants embourbée jusqu’à la taille dans une mer de plâtre. On pouvait chercher le pit ou juste « l’endroit où ça danse à peu près », il n’y en avait pas. Même pendant « Prehistoric Dog » on se retrouve forcés de contempler la mort dans le regard de la horde de cadres trentenaires qui au mieux balancent gentiment la tête d’avant en arrière, inconscients de la déflagration de riffs qui leur brûle le visage.

Heureusement cela n’aura qu’un temps et la meute se réveillera pour la tête d’affiche.

Le retour du Salaud

Dave Grohl entre seul en scène en jouant les premiers accords de « Times Like These ». Alors que les autres dates de la tournée commencent comme une claque avec « All My Life » en ouverture, nous avons eu droit à une intro plutôt simple façon An Evening with the Salaud au ton convivial qui a presque fait oublier les 17 000 personnes de l’arena. Dave nous explique donc que cette soirée est spéciale et qu’on devrait avoir droit à un morceau encore jamais joué auparavant. Il reste seul pour chanter la première moitié de « Times Like These » avec le public, le reste du groupe ne le rejoignant qu’au moment de la montée en puissance.

On rebascule alors sur la setlist de la tournée et les tubes s’enchaînent : « All My Life », « Learn To Fly », « Something From Nothing », « The Pretender »… Chaque morceau issu d’un album différent, chaque morceau un tube absolu.

Dave Grohl présente alors les musiciens, en terminant par le batteur Taylor Hawkins :

« Imagine if you started a band and Freddie Mercury was your fuckin’ drummer. That’s my life ! C’est la vie mon chéri ! »

S’agissant un peu de l’hommage ultime qu’on puisse faire à un chanteur rock, c’est un Taylor tout gêné qui s’empressera de dédier « Cold Day In The Sun » à son patron :

« Alright, this is for the best frontman in the world : Dave Grohl.
Greatest musician in the world : Dave Grohl.
Bestest buddy in the world : Dave Grohl. »

Dans les morceaux qui suivent, on trouve du bon et du moins bon mais peu importe. Même les chansons les plus plates voir agaçantes prennent une autre dimension en live et ce tout particulièrement aujourd’hui. La joie de retrouver les Foo Fighters après une si longue absence est presque palpable et toutes les paroles sont reprises en cœur avec ferveur et passion.

Juste avant d’entamer le classique « My Hero », le Salaud se fend d’un :

« You’re allowed to sing this song if you know it. It’s an old song, it’s called « Stairway To Heaven », sing that shit ! »

Comme ça, sans nous laisser le temps de réaliser qu’il a dit une connerie ni même de rire, POUR L’ART !

Le moment tant attendu arrive : Dave Grohl annonce qu’ils vont jouer un titre que personne n’a encore entendu. L’arena retient son souffle et se fait la plus silencieuse possible pour absorber et apprécier la nouvelle offrande. Le début de la chanson se fait d’ailleurs très doux et son côté planant rappelle un peu « Outside » mais avec des accents bien plus pop. Puis d’un coup sans prévenir s’abat sur le morceau un énorme riff aussi simple que massif qui dessine un grand sourire sur le visage de Pat Smear. Le refrain est alors chanté en alterné, une fois par Dave Grohl, une fois par Taylor Hawkins. C’est probablement la première chanson où le procédé est utilisé et le résultat démontre une nouvelle fois l’accord de leurs deux voix.

Lors de la traditionnelle question « qui n’avait encore jamais vu les Foo Fighters sur scène ?», Dave Grohl place un très beau « putain de merde ! » devant la quantité de mains levées, prouvant ainsi sa connaissance des fondamentaux de la langue française.

« Skin and Bones », le titre qui donnait son nom au live acoustique des Foo Fighters est de retour sur la setlist et offre un moment de douce mélancolie du meilleur gout. Comme pour marquer une rupture, il est immédiatement suivi de « Run », le premier single du nouvel album « Concrete and Gold ». On attendait de constater son efficacité en live et on peut dire qu’on n’a pas été déçus. Avec ce morceau la folie gagne enfin la fosse et on observe même quelques pits, ce qui compensera au final l’absence de « White Limo ».

Quelques titres plus tard, les Foo Fighters nous servent « Wheels », leur titre le plus cheesy, longtemps moqué en interview mais au final jamais abandonné en live. Le public reprend en cœur les paroles de ce bout de guimauve spécialement cuisiné pour ce genre d’occasion. Puis arrivé aux trois quarts de la chanson, Dave Grohl s’interrompt pour nous dire deux mots :

« It took us a while to come back, but we’ve been coming to this city for 22 years. I’ve been coming here since I was fuckin’ 18 years old. Actually I played the Rose Club when I was 18 years old. We played so many places in this city. We played the fuckin’ Tower Records down the street a long time ago, you weren’t there. We played that Rock en Seine festival, that was alright… One place that we’ve played a lot, I’m gonna sing this song right now tonight for that place. Cause some of our best shows were at the Bataclan. So tonight I’m gonna sing this last one for a couple of friends that came out to the show tonight. »

Les paroles « when […] you feel like it’s all over, there’s an other round for you » prennent alors un sens particulier et c’est la gorge serrée que le public chante les derniers refrains. Bien joué monsieur le Salaud, pas forcément fair play, mais bien joué.

Les Foo Fighters suivent alors la politique qu’ils appliquent depuis quelques années : pas de rappel pour plus de temps de jeu. C’est donc en toute honnêteté qu’ils offrent pour conclure trois turbo-hits : « Monkey Wrench », « Best of You » et ses « ooohooo » pour lequel les français ont encore une petite marge de progression (les anglais le tiennent plus d’un quart d’heure hein), et le magnifique « Everlong ».

Avec ses 2h15 environ on ne pourra pas dire qu’on a eu droit à un concert des Foo Fighters particulièrement long, mais celui-ci a pourtant été ô combien généreux. Parce qu’il s’agissait d’un des rares concerts en salle de cette tournée des festivals 2017, par une communication avec le public un peu plus personnelle qu’à l’accoutumée, débarrassée de certains de ses anciens gimmicks, et parce qu’ils nous ont tout de même offert la première de ce qui sera sans nul doute un des meilleurs morceaux de « Concrete and Gold ».

Le groupe a donné une prestation honnête et puissante qui aura fait oublier l’annulation de 2015 et mis des étoiles dans les yeux des nouveaux (et anciens) fans qui vivaient ce soir là leur premier concert des Foo Fighters. On espère les revoir bientôt et si possible dans moins de cinq ans.

Setlist :

Times Like These
All My Life
Learn to Fly
Something From Nothing
The Pretender
Whip It / Eruption / Heart of the Sunrise / Keyboard Solo / School’s Out
Cold Day in the Sun
Congregation
Walk
These Days
My Hero
Dirty Water
Skin and Bones
Run
This Is a Call
Arlandria
Rope
Wheels
Monkey Wrench
Best of You
Everlong