Fuzz – Fuzz

N’y allons pas par quatre chemins: Fuzz poutre, Fuzz déchire, Fuzz casse des culs, envoie du bois, balance la purée et te met à dix mètres. Et tout cela sans la surcompression qui rend souvent les disques de rock et de métal un peu redondants de nos jours. On ne le dira jamais assez. Ici, pas de stéroïdes pour faire oublier la platitude d’un riff. Ça joue bien et ça joue fort, à l’ancienne. Point. Passé ce constat, il y a d’autres choses à apprécier dans le nouveau projet de Ty Segall que la simple joie de retrouver un minimum d’authenticité et un son organique où chaque instrument respire. Fuzz ne fait heureusement pas figure de cavalier solitaire dans ce domaine. De perle rare? Peut-être. Voilà un album à la fois spontané et fort bien ficelé qui surclasse un peu tous les efforts récents de groupes similaires comme The Men ou Pond, entre autres, et qui ne risque pas de freiner l’ascension irrésistible de Ty Segall. C’est un sursaut bienvenu après un ‘Sleeper‘ acoustique [url=https://www.visual-music.org/chronique-1634.htm]moins essentiel[url], si tant est que l’on puisse comparer deux sorties radicalement différentes. Mais si vous n’écoutez qu’un album de lui cette année, que ce soit celui-ci (à moins qu’il n’en sorte un autre dans un mois ou deux).

Du fuzz, il y en a un peu partout dans la discographie extensive de Ty Segall, comme une diarrhée permanente. Cette fois-ci, les envolées à la six-cordes sont entièrement l’oeuvre du pas manchot Charles Moothart, déjà membre de Ty Segall Band et donc présent sur le tout aussi ébouriffant ‘Slaughterhouse‘ de l’an dernier, disque plus conventionnellement garage rock. Dans cette nouvelle configuration, le guitariste croise le fer avec Roland Cosio à la basse et un Ty Segall au jeu de batterie bluffant, vigoureux, technique mais jamais pompier – ou tellement pompier qu’on en oublie la technique, au choix. Difficile de dire qui vole la vedette aux autres entre ces trois larrons lancés au taquet. Le style proto-métal déjanté du groupe se prête de toute façon à toutes les exagérations. Cela va de clins d’oeil décomplexés à Black Sabbath, Blue Cheer, Jimi Hendrix, Led Zeppelin et compagnie aux hyperboles assassines des paroles de Ty Segall, très Ozzy dans l’âme sur l’épatant ‘What’s In My Head‘. On ne cherchera pourtant pas du tube ironique à la The Darkness ou du songwriting d’orfèvre sur cet album, car ce n’est pas le propos. Tout est dans l’attitude, qui reste le vrai point fort de ce power trio au-delà d’une maîtrise musicale indéniable et de jams enthousiasmants qui ne dépassent jamais leur minute limite de péremption. Avec seulement huit morceaux et une grosse demi-heure toute en crescendo, le premier album de Fuzz est invariablement fun. Trois potes dans un garage qui s’éclatent en violant la collection de vieux disques de métal de leurs (grand) parents. Voilà qui devrait suffire au bonheur d’à peu près n’importe qui.