Built To Spill – Untethered Moon

Faut-il présenter Doug Martsch, vénérable tête pensante et dégarnie de Built To Spill? Un timbre haut perché à la Neil Young, un J Mascis dans la main droite, un Stephen Malkmus dans la gauche. Et surtout, des albums de la trempe de ‘Perfect From Now On‘ (1997) ou ‘Keep It Like A Secret‘ (1999) qui ont révélé bien plus qu’une somme d’influences habilement régurgitées. Son groupe est à la croisée de plusieurs courants de l’alternatif américain des deux décennies passées, débarqué dans la foulée de Pavement et cité amoureusement par The Shins, The Strokes, Death Cab For Cutie, Modest Mouse et un paquet d’autres que l’on hésite un peu à mentionner. Toute ressemblance avec les affreux Band Of Horses n’est donc pas fortuite, la classe en plus, les cartons FM en moins hélas. Il faut d’ailleurs reconnaître que les deux ou trois derniers disques de Built To Spill, bien qu’honorables, ne respiraient pas toujours la grande forme. Six ans après le maussade ‘There Is No Enemy‘, trois ans après avoir abandonné un album entier faute de confiance en ses compos, Doug Martsch est à nouveau renversant (Built To Spill hein) grâce à une énergie et un line-up rénovés. Deux ex-roadies remplacent le tandem classique Brett NelsonScott Plouf à la section rythmique, parti en 2012, et bien que conçu dans l’intimité de ce trio tout neuf, sans guitariste additionnel comme de coutume (Jim Roth et Brett Netson se joignent néanmoins aux tournées), le très assuré ‘Untethered Moon‘ est un festival de jams serrés et mélodiques, de grattes bavardes, aiguisées, virevoltantes jusqu’au bout (les 8 minutes de ‘When I’m Blind‘ défrisent). Soyons clairs, sous ses airs de plouc indécrottable anti-glamour au possible le monsieur reste un guitariste sublime, et c’est une raison plus que suffisante pour se procurer ce disque. Les cinq premiers titres font aisément partie du gratin de l’année, jubilatoires comme du bon Dinosaur Jr, prêts à être inclus sur un futur best of du groupe. Dommage cependant que le ventre mou voire un peu flasque de l’album freine l’euphorie avec la présence d’au moins deux chansons dispensables (‘CREB‘, ‘Horizon To Cliff‘ et son fade out disgracieux) et des sensations de redite. ‘Untethered Moon‘ aurait sans doute gagné à ne pas trop dépasser la demi-heure, mais à 45 minutes c’est tout de même un solide comeback qui surpasse les attentes et augure du meilleur pour la suite.