Ektomorf – I Scream Up To The Sky

Dans le petit monde du métal, j’ai toujours été étonné que si peu de groupes reprennent la formule magique instituée par le grand Sepultura du début des années 90. Heureusement, au fin fond de la Hongrie, 4 petits métalleux élevés à la patate se sont réunis pour combler ce manque. Leur nom : Ektomorf. Leur mission : vous faire oublier Max Cavalera. Vous me direz, avec un nom aussi pourri semblant sorti tout droit de Ghostbusters, ça ne pouvait qu’être la galère. Et bien effectivement, ce fut le cas pendant 7-8 ans, mais grâce à l’album dont je vais vous parler dans les prochains paragraphes, les ‘Morfeux’ (cherchez le jeu de mot…) se sont fait repérer par Nuclear Blast, et ils sont désormais sur la voie du succès. Je vous explique tout de suite le pourquoi du comment.

Pour des Hongrois, le moins que l’on puisse dire, c’est que leur musique est chaleureuse, et les influences sud-américaines de Sepultura se font ressentir dès la première seconde de ce ‘I Scream Up To The Sky‘. Tout de suite, on se sent en terrain connu, tant le timbre de voix de Zoltan Farkas rappelle celui de Max Cavalera. Même rage, même timbre écorché, même phrasé : nous avons bien à faire à deux clones ! Pareil pour la guitare rythmique, puisque seulement 2 ou 3 cordes semblent être utilisées par le guitariste… Le morceau titre est un bon indicateur de ce que sera le disque : du bon gros métal agressif et jumpant à souhait. La batterie imprime un tempo musclé, avec de nombreux breaks très puissants. Par la suite, l’album évolue entre Sepultura et Soulfly, toujours avec ce même groove dans la section rythmique.

Ce qui fait plaisir avec ce groupe, c’est que finalement il réussit là où Soulfly a toujours plus ou moins échoué : on retrouve en effet la modernité du son de Soulfly, avec la puissance et la rigueur de Sepultura. Les accélérations bien puissantes sont légion (‘I Miss You‘), et on retrouve une quantité phénoménale de riffs basiques (mais super efficaces) à la ‘Roots Bloody Roots‘ ou ‘Eye For An Eye‘ (ex : ‘Fire‘, ‘If I Weren’t‘, ‘You Leech‘, ‘Blood In Blood‘). ‘You Leech‘, dont les couplets sont rythmés par une basse très lourde, rappelle la très controversée ‘Bleed‘. Ektomorf n’oublie pas non plus d’inclure des éléments ‘non métalliques’ à sa musique, toujours à la manière d’un Soulfly. On retrouve ainsi des chants féminins hongrois quasi-mystiques à la fin de ‘An Les Devla‘ ou ‘Blood In Blood‘, ainsi qu’une très grosse inspiration reggae sur ‘Fajdalom Koennyei‘. Sur ce titre bien mellow, Zoltan arrête de hurler pour chanter, toujours avec ce timbre cassé si envoûtant. Toujours dans le registre des expérimentations, on notera que des samples font leur apparition sur l’excellente fin de ‘Scum‘…

A Hard Day’s Night‘, la reprise couillue des Beatles, déstabilisera peut-être les fans des Fab 4, mais en tout cas, ça sera la poilade assurée pour les autres ! Quant aux fans de Metallica, ils se rendront peut-être compte que le riff de ‘Shoot Me Again‘ est outrageusement pompé sur celui de ‘You Are‘ et que la rythmique en palm mute de ‘Scum‘ possède d’étranges similitudes avec celle de ‘Dirty Window‘… La fin de l’album évolue dans un style plus hardcore (‘Serial Men‘) qui ne déplaira pas aux fans de Nailbomb, avec parfois l’énergie d’un groupe de punk (‘Scum‘).

Au final, cet album est un véritable petit bijou de thrash tribal, tout en puissance, et sans concession. Un disque de furieux qui prouve que l’on peut faire aussi bien, sinon mieux, que des groupes déjà bien installés sur la scène mondiale, et ce avec peu de moyens. Le son est en outre bien énorme, avec une basse très présente (‘An Les Devla‘, ‘I’m Free‘), une guitare bien crade (ça change du son trop lisse de ‘Primitive‘ ou ‘III‘ par exemple) et surtout bien heavy (ahhh la fin de ‘An Les Devla‘ ! Un pur régal…). Les paroles, malgré leur relative simplicité, traitent pourtant d’un sujet grave : la mort du fils de Zoltan. Le chanteur exprime ainsi toute sa colère durant 46 minutes, et le titre de l’album prend une toute autre signification dès lors qu’on connaît sa source d’inspiration. Musicalement, l’ensemble est peut-être un poil linéaire, mais je vous en conjure, ne passez pas à côté de ce CD, ça serait un véritable gâchis pour vos oreilles. Il est de ce groupes que tout fan de métal se doit de soutenir. Et Ektomorf en fait partie.