Creed – Weathered

Le 4 juin 2004, Creed splittait, après 8 ans de carrière. Obtenant un succès démesuré aux USA, ce groupe résolument à part sur la scène rock mondiale demeurait très discret et presque inconnu en Europe, à l’image de Kid Rock ou de Kiss. Le troisième et dernier opus du groupe, ‘Weathered‘, a ainsi caracolé pendant 8 semaines consécutives en première position du billboard US (un record), qui plus est en pleine période de fêtes de fin d’année ! Ce succès populaire, décrié par les allergiques au grunge, n’est pourtant pas démérité, et c’est ce que je vais essayer de vous démontrer aujourd’hui.

Réduit à trois membres après le départ forcé du bassiste Brian Marshall (car dans une interview, monsieur avait osé critiquer Eddie Vedder, le leader de Pearl Jam…), le groupe aux 30 millions de disques vendus a poursuivi dans la voix de ‘My Own Prison‘ et ‘Human Clay‘, en nous pondant un album aux riffs surpuissants et aux textes spirituels et envoûtants. Comment en effet ne pas être subjugué devant la sublime voix du mystique Scott Stapp, tantôt hurleur, tantôt plein d’émotion. Dans l’ensemble, même si le groupe a gardé son style si caractéristique, les chansons sont tout de même plus faciles d’accès et plus mélodiques, comme en témoignent les sublimes singles que sont ‘My Sacrifice‘ et ‘One Last Breath‘.

Bullets‘, le morceau qui ouvre l’album, démarre par une petite intro de basse suivie d’une véritable explosion de rage, dans un style saccadé surpuissant qui plaira aux fans de grunge old school. ‘Who’s Got My Back ?‘ est un morceau absolument fabuleux, dans la lignée de leur reprise de ‘Riders On the Storm‘ (The Doors) à Woodstock en 1999. Ce morceau de plus de 8 minutes possède une aura particulière, et un côté tribal/indien que ne renierait pas Soulfly. Ses superbes harmonies de guitare mêlées à la voix passionnée de Scott en font assurément la pierre angulaire du disque. Sur le reste de l’album, les introductions en guitare claire sont légion : généralement enivrantes et assez recherchées, elles évoluent parfois dans un style country qui n’est pas pour me déplaire (‘Weathered‘). Mais surtout, le groupe a su conserver sa marque de fabrique, à savoir des gros riffs bien heavy (‘Signs‘), avec parfois un groove bien balançant (‘Stand Here With Me‘, ‘Hide‘). Mark Tremonti n’a décidément rien perdu de son inspiration, et il parvient à garder son style si atypique sans tomber dans la redite. Le groupe floridien expérimente même de nouvelles sonorités, telles que le violon et les chants indiens, pour parachever l’ambiance de ses morceaux. L’album se clôt par une ballade acoustique, parfaite, à écouter près d’un feu de bois : Scott parvient à moduler sa voix de manière extraordinaire pour montrer toute sa vulnérabilité.

Dans l’ensemble, cet album est un ‘All Killer No Killer’ (comme dirait Sum 41) : il n’y a quasiment rien à jeter, et la richesse des compositions devrait vous inciter à l’écouter longtemps sans que le spectre de la lassitude ne pointe le bout de son nez. Creed possédait en effet la capacité à composer des ballades heavy d’un nouveau genre, techniques et mélodiques, avec une touche spirituelle surprenante pour nous Européens. Avec cet album, Creed poursuivait sa voie, sans se soucier des critiques, mais finalement, le succès les a eus à l’usure. Dommage, vraiment dommage que ce groupe bourré de talent n’existe plus. Creed est parti la tête haute, et il laisse derrière lui une trilogie qui fera encore référence dans 10 ans.