The Agony Scene – The Darkest Red

Non, je ne voulais pas y croire jusqu’ici lorsqu’on me disait ‘Ceux-là ils sont encore passés chez ce gros label, c’est des pourris, c’est des vendus…’ ou alors ‘Tu vas voir qu’ils vont changer maintenant qu’ils ont un contract où il y a une somme avec plein de zéros en plus…’. Non, je me disais que tous ces propos n’étaient que des préjugés, des idées préconçues débitées par des gens qui, dès qu’un groupe subit une petite ‘promotion sociale’ dans le business musical, emplis de jalousie, les huent et les conspuent comme des lépreux (Quoi ? Comment ça on ne hue pas les lépreux…? Bon, on peut leur jetter des cailloux au moins ?). Pourtant, depuis que j’ai prêté une oreille au second album de The Agony Scene, ‘The Darkest Red‘, j’ai ravalé tous mes principes pour me rendre compte que j’avais été bien aveugle et surtout très naïf.

Car oui, The Agony Scene, après un éponyme qui est toujours aussi indiscutablement bon, un bijou de death mélodique paru chez Century Media, a été complice et victime de la machinerie du géant Roadrunner : formatage, lissage et polissage intensifs d’un style dèjà à l’origine pas si aggressif que ça, et nous voilà avec ‘The Darkest Red‘.

Pourtant tout ne commençait pas si mal. Après une intro qui a l’air d’être à la mode en ce moment (faudrait leur dire que faire du remplissage avec plus d’une minute de bruit, bourdonnement, souffles, larsens et compagnie ça ne sert strictement à rien…), on retrouve le son qui a fait la touche du groupe : une batterie extrêmement mise en avant pour le plus grand plaisir de l’auditeur avide de petites nuances techniques à dénicher deci-delà, des guitares bien grasses et presque baveuses qui donnent le sentiment d’avoir affaire à du gros death couillu et avant tout une voix innimitable, celle de Micheal Williams, dont je me dois de reparler un peu plus loin et qui sera au final, malheureusement, un des seuls vestiges de la brutalité du The Agony Scene d’avant…

Parce que si l’intro du titre d’ouverture, ‘The Darkest Red‘, laisse présager du meilleur, après une seule courte minute de plaisir, on peut dire adieu à l’originalité et aux tournures rythmiques innatendues qui avaient donné à des titres comme ‘We Burry Our Dead At Dawn‘ ou ‘Nausea‘ tout leur génie. Tout ça laisse place à une parodie de néo à la Slipknot, toute l’aggressivité en moins et beaucoup beaucoup trop de mélodies insipides en plus. ‘Screams Turn To Silence‘ par exemple nous sert une boullie de riffs tous plus fades et peu entrainants les uns que les autres, portés par un refrain en voix claire abominablement médiocre. Attention, Micheal, derrière son micro, fait un boulot de professionnel dès qu’il s’agit d’hurler comme un possédé avec un timbre penchant vers le très maléfique que même le black le plus méchant ne renierait pas. Malheureusement, pour que les kids puissent s’identifier à un quintet tout de même aussi brutal (pour du Roadrunner j’entends bien…), il fallait bien mettre des refrains chantés et faciles et surtout retirer la plupart des riffs trop crados…

Alors du coup où sont les pointes de vitesse et les blasts hachés de ‘Habeas Corpus‘, le doom suicidaire de ‘Shotgun Wedding‘, les vomissements en coeur de ‘The Lines Of Suicide‘…? Disparus ? Non pas totalement, mais c’était pas loin : ‘Suffer‘ se charge de bourinner de tout son long et de poser en plein milieu un mid-tempo incroyablement efficace, alors que ‘Scars Of Your Disease‘ s’occupe de trouver quelques riffs vraiment death et offre une performance vocale impressionnante de puissance tout en ne laissant la place à aucun plan mélodique sur ces délicieuses trois minutes et demi. Deux titres valables et c’est tout ? Ben oui, pour mon plus grand malheur c’est bien tout…

Après un éponyme aussi bon, The Agony Scene a donc choisi d’emprunter un chemin qui part à l’opposé de celui d’une quelconque intégrité musicale. Leur signature chez Roadrunner en est-elle la cause ou la conséquence, personne ne peut le dire vraiment. Mais ce qui est clair c’est que ‘The Darkest Red‘ plaira sans aucun doute beaucoup plus aux amis du metalcore et du néo qu’aux amateurs de death mélodique. Pourtant, déjà auparavant, avec leur sublime reprise de ‘Paint It Black‘, ils avaient parfaitement prouvé qu’ils savaient faire des choses magnifiques sans jouer forcément vite et fort… Malheureusement, avec ce second album on est très loin de cet exploit et vu le potentiel de ce groupe encore très jeune, on se dit que c’est du beau gâchis, tout ça.