David Salsedo – Wine & Pasta

David Salsedo est un homme qui cultive le paradoxe, suscitant à la fois admiration, moqueries et indifférence. On ne peut présenter le lascar sans mentionner son rôle de leader charismatique dans Silmarils, mythique groupe de fusion qui a su réveiller la scene rock/métal francophone du milieu des années 90, aux coté des non moins puissants No one is innocent et autres Lofofora. On le sait moins, mais David a mené à coté une carrière de producteur alternant le prometteur (My Favourite Dentist is Dead, le premier album de Dolly) avec l’insipide (‘Aeromusical‘ et ‘Pop’n’Gum‘ de Superbus) en passant par le carrément à coté de la plaque (Minimum Serious). Salsedo a décidé de se lancer dans une carrière solo, et s’est mis à composer des chansons, accompagné d’un de ses vieux compères de Silmarils, en l’occurence Jimi le guitariste.
Dans les premières minutes d’écoute de ce ‘Wine and Pasta‘, l’habitué des Silmarils navigue en terrain connu. Si le traitement est bien plus pop, on sent que Salsedo reprend le trip mené dans le très bon ‘Vegas 76‘: ambiance 70s, blues rock et inspirations funky. ‘Si facile‘ illustre parfaitement ce propos, avec ce petit son de synthé fantaisiste, sa rythmique cool, et la guitare electro-acoustique groovy. Le phrasé de Salsedo est à la limite entre le chant clair et le rap, plutôt bien dosé. On continue avec ‘Mexico‘, où les choeurs, le synthé une fois de plus et les percussions rajoutent au coté enjoué. Le riff de gratte fait penser aux Dandy Warhols période ‘Bohemian like you‘. Tout ça s’annonce bien cool. La petite mélodie entêtante de ‘Yeah Yeah‘ vient chatouiller les oreilles, s’installer dans un coin du cerveau pour ne plus le quitter. Texte sympa, refrain efficace… Saloperie de tube. Je kiffe. Un peu plus loin, ‘Populaire‘ semble être une chute de studio de l’époque ‘Vegas 76‘, ou Salsedo retrouve son fameux flow d’antan et sa verve sarcastique et mordante. Du tout bon, qu’on vous dit.
Alors, à ce stade de la chronique, est ce bien utile de continuer? On peut sérieusement se poser la question, parce que les choses se gâtent franchement dans le reste de l’album. ‘C’est ainsi‘ et ‘Qu’est ce qu’on va faire de nous‘ sont desservies par des paroles banales et une ambiance mortuaire. Les arrangements bluesy à la Grant Lee Buffalo sur ‘C’est ainsi‘ font éviter le naufrage… La plupart des autres chansons ne font pas dans la demi-mesure, et donnent dans le ridicule. ‘Mon Amour‘, le single choisi pour défendre l’album, est chanté avec une voix forçant à mort sur le coté vibrant et moche, le tout enrubanné de trompettes mariachis qui se demandent ce qu’elles foutent là. ‘Assez‘ est une espèce de bluette haïtienne qui redonne du sens à l’expression ‘faute de goût’. La palme revient à ‘Toujours les mêmes‘, hommage criant aux plus grands succès d’Etienne Daho dans les années 80, avec le même solo de guitare que ‘La dernière séance‘ d’Eddie Mitchell. On tombe de haut, même si on peut se raccrocher à quelques branches (glissantes), comme ‘Des fleurs‘, qui passe pour peu qu’on supporte les balades à la Gerald de Palmas, et ‘Que moi‘, chanson folk au final bien foutu en forme de dédicace à Dire Straits.
Que dire? Eh bien c’est dommage. Il y a de bonnes idées dans ce ‘Wine And Pasta‘, une ambiance seventies travaillée, des parties de guitares vraiment bien foutue, et même de bonnes chansons. Malheureusement, en voulant montrer un coté pop assumé, Salsedo semble s’être perdu dans une bouillie ‘variété française’ dont le ressort principal est d’écrire des chansons easy-listening en brodant avec des sonorités exotiques pour faire passer le tout. Le moins qu’on puisse dire est que le résultat est inégal et laisse finalement l’amer goût du regret.