Interview ☭ Queens Of The Stone Age

Le troisième jour des Reines de l’âge de pierre dans la capitale était consacré majoritairement à la promotion de leur cinquième album « Era Vulgaris » disponible dans les bacs le 11 juin prochain. Au lendemain de leur concert à l’Elysée Montmartre, le planning prenant du retard, pas le temps de rencontrer le puissant Joey Castillo mais peu importe, quelques courtes minutes d’entretien avec Josh Homme, figure emblématique du désert et Troy Van Leeuwen, ancien membre d’A perfect circle sont suffisantes. C’est avec bonne humeur et décontraction que les deux compères se sont livrés à l’exercice pour VisualMusic.

Tout d’abord, qu’avez-vous pensé du concert hier soir ?
Josh Homme : c’était très fun !

Mais c’était court !
Josh : Oui c’était court mais nous voulions faire un petit concert et jouer essentiellement nos nouveaux morceaux. C’était une sorte de teaser avant notre retour dans quelques semaines où nous jouerons plus longtemps. Nous voulions également qu’il soit court car jouer beaucoup de nouvelles chansons est souvent une mauvaise idée, les gens ne comprennent pas ce qu’ils entendent. Ils se disent : « C’est quoi ce bordel ? » et ils ne veulent pas payer pour quelque chose qu’ils ne connaissent pas, ce qui est plutôt sensé.
Nous avions choisi de leur dire : « Vous savez quoi ? C’est ce qu’il va se passer ! » (rires)
Nous voulions juste faire deviner au public ce qu’ils auront dans quelques semaines et j’espère sincèrement qu’ils n’ont pas été trop déçus. Nous étions juste très excités de jouer nos nouvelles chansons et nous nous sommes bien éclatés. J’aime cette salle en plus, mais le volume sonore était bien trop faible, on ne devrait pas entendre quelqu’un parler au dessus de notre musique !

Pouvez-vous nous présenter les 2 nouveaux membres du groupe ?
Josh : Mikey Shoes (aka Mickael Schuman) est notre bassiste, c’est un tueur et Deano (aka Dean Fertida) est à la guitare et aux claviers. Mikey vient d’un groupe qui s’appelle Wires on fire qui n’est pas très connu. Nous l’avions vu jouer et nous l’avions trouvé très explosif, c’est un type génial en plus. Quant à Deano, il jouait avec The Raconteurs sur la tournée de l’année dernière. On l’a volé, on l’a mis au fond du van et on s’est tiré très vite. Pendant que nous enregistrions l’album, nous l’avons mis dans un entrepôt et nous l’avons ressorti pour débuter la tournée !

Pourquoi avez-vous eu besoin de les recruter ?
Troy Van Leeuwen : Nous avions Alain Johannes et Natasha Schneider l’année dernière pour nous aider et ce sont des membres de la famille. Alain a travaillé sur cet album comme ingénieur, il a joué de la basse aussi mais tous les deux n’étaient pas disponibles pour repartir sur une tournée donc nous devions trouver d’autres personnes. Nous aimons travailler avec des gens différents, c’est très intéressant car on apprend toujours des autres et avoir de nouveaux membres apporte toujours un air frais dans le groupe, c’est excitant.

Mark Lanegan est encore présent sur cet album, aurons-nous la chance de le voir à nouveau sur scène avec vous ?
Troy : Il fait sans arrêt de la musique. C’est un chanteur phénoménal mais comme Alain et Natasha, il a des choses à faire. Ce ne sont pas des invités, ce sont de vrais membres de la famille. Il n’est pas prévu qu’il revienne mais nous n’avons aucun plan là-dessus.

Josh, j’ai lu que pour la première fois tu n’avais rien à dire sur cet album. Selon toi, d’où venait ce manque d’inspiration et qu’as-tu fait pour la retrouver ?
Josh : Ce n’était pas un manque d’inspiration musicale mais écrire des paroles est de la loin la chose la plus difficile. Tu dois trouver des choses qui te passionnent assez pour les exprimer mais tu dois aussi trouver la façon de les exprimer pour qu’il y ait assez de couleurs à l’écoute et d’images pour que cela te semble intéressant. C’est très difficile. Dans le passé, cela m’embarrassait de parler du sens des paroles donc je répondais la plupart du temps que je m’en foutais, que c’était moins important que la partie musicale, pourtant je faisais en sorte de donner un sens aux paroles. Cela a pris du temps. A notre époque, des fois tu n’as rien à dire de plus que « pfff ! » mais cela ne veut pas dire que tu te fous du monde qui t’entoures, il est juste difficile d’en tirer une énergie. Il y a tellement d’informations, il est bon parfois de se souvenir de tout éteindre, de se déconnecter.
(son téléphone portable sonne)
C’est juste à ce moment-là qu’il sonne ! (rires)
Excusez-moi, je réponds à Brody (Dalle ex-leadeuse des Distillers et femme de Josh Homme), je suis à vous dans une minute.

Pour Joey et toi, c’était le deuxième enregistrement avec Queens of the stone age. As-tu senti une réelle différence par rapport à l’enregistrement de « Lullabies to paralyse » ?
Troy : Oui assurément. « Lullabies to paralyse » avait été écrit sur la route pendant la tournée de « Songs for the deaf » et nous avions une idée très précise des morceaux que nous allions enregistrer puis mettre sur l’album. « Era Vulgaris » n’était pas du tout comme cela, nous sommes tous allés en studio pour nous retrouver et trouver l’inspiration en faisant de la musique ensemble. Je pense que le nouveau son de cet album vient de là, du fait aussi que nous voulions évoluer et exprimer l’inexprimable. C’est aussi un son plus trash. Nous n’avons utilisé qu’un piano, tout le reste est très électrique et manipulé car nous voulions faire une nouvelle tentative robotique. (rires) Avec les synthés par exemple, je me suis souvent contenté de faire du bruit plutôt que de jouer une réelle mélodie, c’est le robot mourant. Hurler pour vivre ! (rires)

(Josh revient dans la pièce)

Pour « Lullabies to paralyse« , il y avait d’énormes interrogations de la part du public après l’expulsion de Nick Oliveri, vous étiez un peu attendus au tournant. Avez-vous ressenti qu’il y avait moins de pression pour celui-ci ?
Josh : Personnellement je me sentais dans les mêmes conditions pour les deux. Je savais que peu importe ce que nous faisions, nous ne serions jamais vraiment compris. Tout ce qui s’est passé, n’avait plus rien à voir avec la musique et nous savions que si nous disions « oh, non tout est très cool, tout va très bien ! » cela reviendrait à se défendre alors que nous n’en sentions pas la nécessité. Il ne s’agit pas de se sentir bien dans ses pompes mais de se glisser dans d’autres pompes… in Mikey Shoes ! (rires) Nous avions fait de même pour « Songs for the deaf« , nous ne voulions pas faire ce que notre public voulait entendre. Tu ne peux pas t’autocopier, ni copier personne, tu dois juste faire un nouvel album à chaque fois. Nous savions que certaines personnes comprendraient cela et d’autres non. C’est comme si tu rentres dans une pièce et que 14 personnes te jettent de la merde dessus et que tu as quand même le courage de continuer à avancer. Je suis fier du fait que beaucoup de personnes n’auraient pas avancé dans cette pièce mais nous l’avons fait. Bottez-moi le cul !

Depuis le début de votre carrière, le son du groupe a toujours été très personnel. Sans parler de réelles influences, y a-t-il des artistes qui ont joué un rôle sur la formule QOTSA ?
Josh : Le dire serait ruiner la réputation du groupe (rires). Nos influences vont de Rocky Erikson à Rocky Balboa ! (rires) Plus sérieusement, nous pouvons considérer un panel allant de Léonard Cohen à Discharge. De Bob Collins à …
Troy : Buckcherry ! (rires)
Josh : Oh non ! (en simulant un vomissement)

En tout cas, il y a vraiment des ponts entre vos différents projets. I’m Designer par exemple, ressemble beaucoup à la musique des Eagles Of Death Metal.
Josh : Je pense qu’il est naturel de trouver des similitudes entre les Eagles et les Queens, les deux groupes ont envie de faire une musique qui donne envie de se bouger. Tout converge, c’est un peu comme les desert sessions, il n’y a pas d’accident.

En parlant des desert sessions, Make it wit chu a vu le jour lors des sessions comme cela a déjà été le cas pour d’anciens morceaux. Est-ce une sorte de laboratoire des Queens ?
Josh : Dans les Desert sessions, j’apporte souvent des idées qui pourraient être utilisées pour les Queens. C’est comme une banque de la chanson, un endroit pour essayer des choses. Make it wit chu a suivi le même chemin que Go with the flow qui était une chanson très ancienne et que je n’osais pas mettre sur un album de Queens of the stone age.
Quand nous avons peur d’essayer une nouvelle direction, nous le testons d’abord avec les desert sessions. Nous voulons sans cesse faire de nouvelle chose mais nous ne réinventons pas la roue, nous préférons dire : « hé regardez notre roue, elle est cool ! » (rires)

Y a-t-il d’autres sessions prévues ?
Josh : Oui nous allons continuer à en faire, je n’arrêterais jamais mais il faut juste trouver le temps. J’ai essayé de libérer du temps pour cela avant que cet album ne sorte mais il n’y a que 24 heures par jour et c’est souvent insuffisant.

Ces derniers mois, vous avez utilisé Internet pour appâter vos fans et vous les avez invité à partager de toutes les manières possibles You know what you did et Era Vulgaris. Pensez-vous qu’aujourd’hui un artiste doit utiliser toutes les opportunités de ce média même s’il prend le risque de retrouver ses chansons en téléchargement libre ?
Troy : La boîte de Pandore est ouverte et nous voulons que les gens écoutent notre musique, je ne pense pas que nous puissions stopper cela maintenant.
Josh : Je pense que c’est une manière d’être mieux compris, c’est une manière de dire « nous le faisons pour vous, vous le faites pour nous », c’est la relation que nous voulons et j’ai toujours été très intéressé par le mot « Partage », ce n’est pas vraiment du partage mais c’est comme ça que nous l’appelons de nos jours.

Et dans le futur, pourriez-vous faire quelque chose dans le même esprit que Nine Inch Nails pour « Year Zero » avec des blogs par exemple ?
Josh : Je ne suis pas un grand blogeur, je préfère le mystère.
Troy : Moi aussi, je pense que les choses sont plus belles quand il y a un air mystique.
Josh : Mais Trent a réalisé une sorte de version mystérieuse du blog et peut-être qu’il a créé une nouvelle manière de raconter les choses en créant un contexte et une histoire complètement différente de ce qu’il est.

En parlant de Trent Reznor, il participe à la chanson Era Vulgaris qui malgré son nom n’apparaît pas sur l’album. Pourquoi ?
Josh : Nous trouvions cela marrant de ne pas mettre la chanson éponyme sur l’album et je pense que cette chanson comme You know what you did réclame une attention particulière et sont liées à l’album grâce à Internet.

Le temps est écoulé, merci pour vos réponses.
Un grand merci également à Sarah, Nitsan et Lorenzo.

Interview réalisée par Virginie Poux