Interview ☭ Maczde Carpate

Quand t’habites le Nord-Pas-de-Calais et que t’aimes bien te faire des concerts, pour voir tes artistes préférés tu peux toujours te déplacer à Lille, à Bruxelles ou si t’as un peu de courage, tu peux même pousser jusque Paris. Et puis des fois t’as des surprises, genre le 16 Mai dernier (oui ça commence à remonter) à Carvin, petit patelin du 6-2 (méfie teu), débarquait Maczde Carpate. Et là vous dites : « qui ça ? » mais siiii, Maczde quoi ! Encore un groupe qui mériterait sa place au soleil car même s’ils ne bénéficient pas (encore) d’une grande médiatisation, les Grenoblois sont extrêmement prisés par quiconque les a déjà vu en live. Alors imaginez-moi qui avait été conquis rien que sur CD, d’avoir l’opportunité de vérifier cette réputation de « groupe qui te met le feu en live », pas très loin de chez moi en plus, j’étais aux anges. Et comme en plus un bonheur n’arrive jamais seul et que le monde est petit, je me suis retrouvé à pouvoir contacter grâce à une amie de Pierre, le batteur du groupe, pour pouvoir réaliser une interview pour votre webzine préféré : mais que demande le peuple ?!
Ce 16 Mai, perso je demandais pas beaucoup plus et pourtant cette journée fût encore plus excellente que ce que je prévoyais. Arrivé tout pile à l’heure devant la salle (des fêtes), la 1ère personne à qui je demande des indications se trouve être Maël le guitariste du groupe qui me présente à Bertrand (basse) et Pierre que je rencontre enfin. C’est donc tout naturellement que s’engage la conversation avec principalement Maël et Bertrand (ah oui, tiens, si je déclenchais mon dictaphone ?) en pleine rue assis sur les marches de la salle des fêtes et profitant des uniques rayons de soleil que la journée avait à offrir.

Alors vous êtes en pleine préparation d’un nouvel album, vous en êtes où ?
Maël : On vient de faire une grosse session pour enregistrer basse-batterie-guitare de 17 morceaux qui ne figureront pas tous sur l’album mais c’est histoire d’avoir le choix. Et puis donc là on fait une petite pause pour faire un aller-retour de 1600 km et puis on y retourne pour faire la suite (rires), il va y avoir des invités aussi un violoniste, un clarinettiste, une harpiste, d’autres chanteurs…

Des potes à vous ?
M : Ouais, c’est Jull qui chantait sur « Eau Et Poussière » [titre qui m’avait tapé direct dans l’oreille sur le précédent album, « Tue-Tête« , et dont je venais de leur parler], il a fait un texte et il vient faire un morceau aussi. Après comme on ne sait pas ce qu’on gardera, ça se trouve on te dit des noms d’instruments qu’on entendra pas au final (rires) mais on a bien envie d’essayer plein de choses et on a peu de temps, du coup on essaye d’être bien efficace.

Alors justement, c’est quoi votre envie sur cet album ? Il y a un mot d’ordre ?
M : Comme tous les groupes, c’est souvent un peu en réaction par rapport à l’album précédent et sur « Tue-Tête » on avait poussé assez loin la complexité de certaines structures, on a poussé aussi une interprétation vraiment très rageuse et souvent à fond du coup ça nous a fatigué un petit peu ! Surtout qu’à force de jouer les morceaux sur scène, on a trouvé d’autres interprétations avec beaucoup de contrastes qu’on avait pas vraiment réussi à faire sur album. Donc sur celui-ci on s’est dit qu’on avait envie de choses un petit peu plus simples basées sur moins d’idées mais suffisamment fortes et puis on s’est dit aussi que ça pourrait être bien de trouver une manière de rendre notre univers un peu plus accessible. Donc c’est pour ça, même si ça se fait toujours un peu naturellement, qu’il y aura des morceaux différents. L’autre envie qu’on avait aussi c’est qu’on a toujours cherché plus ou moins sur album à faire les morceaux tels qu’on les joue en concert et d’essayer de retrouver une magie et des débordements, qu’il est de toute façon impossible à retrouver en studio, donc c’est pour ça que pour cet album on enregistre aussi un live le 30 Mai prochain où on jouera des morceaux des 3 albums. Par contre sur l’album studio on va essayer aussi de retranscrire ça d’une certaine manière puisqu’il y a des morceaux qui sont des petits bouts d’improvisation. Au moment où on a commencé à enregistrer l’album, on savait absolument pas comment les jouer ni où ça allait partir mais on s’est dit qu’on allait tenter plein de choses qui allaient former un disque plus aéré, en tout cas ça sera sûrement plus aéré que « Tue-Tête« , après bon, on se refait pas donc y aura forcément des trucs péchus (rires).
On aimerait bien aussi plus le produire de façon à ce qu’il y ait moins ce qu’il y avait sur « Tue-Tête » : tous les gonzes dans la même salle qui enregistrent et on prend le truc… bon, il y a eu aussi un peu ça car au final on a quand même fait les prises guitare-basse-batterie ensemble mais ça sera plus étoffé, plus travaillé.

Et qui est votre producteur?
M : C’est toujours le même : François Carle notre ingénieur du son, on fait ça dans son studio. Sur « Tue-Tête« , il avait travaillé avec Olivier Depardon qui était le chanteur de Virago et puis qui est un musicien de la scène grenobloise qui fait plein de trucs biens et au niveau « son » aussi. En fait cet album on l’avait tellement travaillé entre nous, c’était vraiment le fruit de plein de périodes différentes donc quand on est arrivé en studio on a pas été à même de lui faire une place en tant que réalisateur. C’est vrai que c’est un album qu’on a réalisé nous, tout était fait, bloqué, l’équilibre était trouvé, c’était pas spécialement agréable à enregistrer parce qu’il y avait peu de champ pour lui. Alors que là, c’est tout le contraire, c’est vraiment François qui est réalisateur, nous on vient avec des morceaux finis qu’on joue déjà en concert des bouts d’improvisation de nos heures d’enregistrement de répèt et puis c’est lui qui gère, qui nous dit si une prise est bonne ou s’il faut la refaire. Chose surprenante (rires) on est relativement bien arrivé à pas dépasser, à respecter les rôles qu’on s’était fixé, et l’ambiance était bien meilleure, beaucoup plus décontractée en fait. Sur « Tue-Tête » dans l’ensemble c’était assez douloureux, d’ailleurs c’est pas un hasard la teneur de la pochette et de certains morceaux et le titre de l’album en lui-même.

Comment vous vous mettez à créer les morceaux, c’est chacun de son côté ou vous composez ensemble ?
M : Sur celui-là on a toujours eu l’habitude de beaucoup improviser et d’en ressortir des pistes de morceaux comme ça, Benjamin écrit les textes, en fait il sort des premiers jets de textes sur le moment, dans l’ambiance du moment. Il y a quand même toujours eu des morceaux qui viennent soit d’une idée à moi soit d’une idée à Bertrand déjà un petit peu construite. Et sur ce futur album, il y a un peu de ces 2 méthodes là et il y a aussi des morceaux que l’un ou l’autre a fait entièrement parce qu’on a tous commencé entre « Tue-Tête » et maintenant d’autres projets. Benjamin s’est fait un album de poésie sonore où il a joué un petit peu de plein d’instruments et puis il a posé des textes à lui, parlé dessus. Moi j’ai commencé un duo electro rock, Bertrand il a fait déjà fait depuis un moment des morceaux sur son ordinateur, Pierrot se met de plus en plus aux platines vinyles, il a envie de développer ça donc du coup tout ça, ça a joué aussi pour s’ôter un peu la pression de se dire que Maczde Carpate c’est LE projet, le champ d’expression dans lequel toutes nos idées avaient une chance de devenir concrètes. Il y a eu aussi un passage pas évident à négocier, avec Maczde ça fait entre 5 et 7 ans qu’on vit de ce projet qu’on est à temps plein là dessus, enfin on vit, c’est un sacré bordel (sourire) et ce qui fait que c’est toujours une économie très très fragile ce qui fait que depuis 2001 je dirais qu’on s’est jamais vraiment arrêté en fait. On a toujours consacré toutes nos priorités au développement de ce groupe et du coup ça a pas mal porté ses fruits, voilà on a sorti 3 albums, on a pas mal joué à l’étranger, on s’est fait quand même un petit nom même si c’est confidentiel sur la scène française.

Les échos des gens vous ayant déjà vus sur scène sont d’ailleurs toujours très enthousiastes
M : (rires) Je crois qu’on acquis une réputation d’univers scénique qui est pas à la hauteur sur album enfin toujours selon la plupart des retours qu’on a. Mais le problème c’est qu’on a jamais vraiment pu s’arrêter, il y a eu beaucoup d’attentes souvent déçues vu comment le milieu musical est fait en France de la part des média mais bon ça on peut s’y attendre. Du coup à un moment on a été vachement esseulés par la fragilité de cette économie qui fait que régulièrement on se retrouve dans des situations bien merdiques, que le groupe a jamais assez de concerts comparé à ce qu’il faudrait rentrer donc là depuis l’été dernier, on était parti en Croatie se faire une petite résidence dans un lieu qu’on connaît bien et puis là on s’est dit : voilà, faut qu’on arrête de compter sur Maczde Carpate pour vivre, enfin en tout cas à plein temps, donc on est repassé à Maczde Carpate comme une activité complémentaire économiquement. Chacun a repris des jobs, certains dans la musique, certains non. Donc on repasse à un statut, mais vraiment comme ça, après de nombreuses années où c’était ça notre vie. Et donc le fruit d’avoir commencé un petit peu d’autres choses musicales, le fruit aussi d’avoir ôté pas mal de pression qu’il y avait sur ce projet là, ben je pense ça va quand même bien se refléter sur cet album qu’on a prévu de manière super pragmatique. On s’est dit on va le faire à telle période, il sortira à telle période, il rapportera ce qu’il rapportera mais on a plus aucune attente du milieu de la musique que ce soit les média, le réseau des concerts. Maintenant on prend ce qu’il y a à prendre, on répond aux gens qui veulent nous contacter, mais on a plus cette pression la du tout et ça fait pas mal de bien.

Et du coup vous avez fait appel aux fans qui seraient intéressés…
M : Ouais, ça aussi c’est très pragmatique, on travaille toujours avec le même label avec qui on s’entend très bien mais bon c’est aussi une structure très fragile économiquement. On s’est dit : on va essayer de partir sur des bases, de faire un budget d’album qui corresponde aux espérances de ventes, c’est pour ça qu’on a lancé cette souscription [ souvenez-vous ] qui a pas mal fonctionné même si évidemment ça serait mieux qu’il y en ait plus (sourire) mais voilà, là c’est engagé, si tout va bien début juin on a fini les prises, en juin on mixe et ça sort en septembre.

Tu parlais de la Croatie, il y a bien un lien entre vous et l’Europe de l’Est, c’est quoi cette relation ?
M : Ouais ça remonte à quelques années en fait, la première fois qu’on y est allé, c’était en 2001 pour une fête de la musique à Belgrade en Croatie et puis depuis ça a généré d’autres occasions.

Mais comment vous avez été invité la première fois ?
Bertrand : Au tout départ c’était un pur hasard, on a remplacé un groupe.

M : Ouais, on a remplacé un groupe parce que la fête de la musique, les instituts français, les centres culturels français en organisent une généralement dans les pays où ils sont et puis après voilà ça a généré des rencontres assez fortes entre un certain nombre de groupes et des gens de là-bas. Ça a généré aussi petit à petit un petit réseau ce qui a fait qu’on y est retourné presque chaque année, en tout cas une fois tous les 2 ans sûr. On est allé jouer en Macédoine, en Bosnie, à Sarajevo, à Mostave, en Croatie, en Slovénie et à force d’aller y jouer on s’est généré un petit public. Et puis plus récemment en Mai dernier, on a invité un groupe hongrois qui s’appelle Kampec Dolores à venir tourner avec nous en France, on a passé une semaine avec eux et on avait commencé à faire un peu de la musique ensemble. Juste après, il y a un an, on a vraiment de travaillé dur pour essayer de poursuivre ce projet et donc là de mi-avril à début mai on est allé les rejoindre et on a fait une tournée d’une dizaine de dates en Roumanie, Hongrie, Slovaquie, Autriche et Slovénie et là on s’est vraiment prévu 3 jours de résidence où on a composé carrément un set commun. Pareil c’est quelque chose dont on aimerait bien faire en disque, on a enregistré quelques concerts mais avec tout ce qu’on a fait déjà, on va attendre un petit peu (sourire). C’est toujours des choses qui ont fait vachement de bien puisque c’est souvent des plans où on part que tous les 4 sans notre entourage donc ça donne souvent lieu à des situations où il faut se dépêtrer tout seul. L’été 2006 on était allé faire quelques dates en Croatie on s’était arrêté dans un petit festival qui est dans une ancienne usine au bord de la mer dans une petite ville voir des connaissances d’amis, il suffit de passer un coup de fil : « On cherche un endroit pour une dizaine de jours/2 semaines pour travailler » « ben pas de problème venez » et pour ça, ça fait vachement de bien aussi de s’extraire de son contexte, il y a tout pour ça.

OK et pour le coup alors est-ce qu’il y a aussi une relation avec l’origine du nom du groupe et les Carpates ou bien c’est le genre de trucs que vous ne révélez pas ?
M : C’est un peu à l’image de beaucoup de textes, ça vient d’on ne sait quelle strate de l’esprit, et puis forcément la signification elle vient un petit peu au fur et à mesure. Mais là on peut dire qu’on a bouclé une boucle parce que le 28 Avril dernier pour être précis, pour la 1ère fois de notre existence, on a traversé les Carpates en camion, aller-retour, on avait le concert le plus à l’Est de l’Union Européenne et là en les traversant, on s’est dit que c’était fou quand même 13 ans après avoir commencé, ça y est on y était !

C’est fun effectivement et justement alors, par rapport aux textes, qui sont quand même assez imagés pour dire le moins, comment ça se passe c’est Benjamin qui s’en charge ?
M : Pour la grosse grosse grosse majorité, c’est lui. Du coup l’univers de Maczde Carpate est très lié à ses textes et… ben en fait, je vais parler à sa place, même avant Maczde quand on faisait nos morceaux dans des petits groupes, il a toujours écrit en français donc ça lui a vraiment permis de développer, avec au départ des influences très très prononcées, une écriture à la Bertand Cantat que ça soit pour les images, les jeux de mots et les sensations. Benjamin est quelqu’un qui est très intéressé par le contact avec la nature, dans les études qu’il a faite et même dans son rapport aux choses. Donc voilà c’est son univers, c’est quelque chose qui est vachement présent dans ses textes et qui correspond bien à la musique puisqu’on cherche à créer des climats, des ambiances, des espèces de pulsations comme ça, on peut dire que c’est une musique qui est basée sur le contraire de la chanson réaliste en fait : il est plus question de raconter des histoires sur des standards, ce qui peut être bien, mais nous ce qui nous plus tripper en musique c’est plus ça, c’est des choses un peu indéfinissables sur lesquels on peut pas spécialement mettre un mot direct mais qui déclenche des émotions familières.

C’est vrai que les paroles ont un sens très abstrait mais pour autant tu peux te faire ta propre signification pour toi même
M : Voilà ,ça permet que l’auditeur se fasse aussi sa propre histoire et puis du coup il peut y avoir une signification qui peut être différente d’un auditeur à l’autre mais avec un tronc commun sur l’émotion.

Par rapport à l’univers musical c’est pas mal d’ambiances, ça vient de vos influences? Toi tu t’es lancé dans un groupe electro rock tu disais.
M : Ouais mais ça s’est vraiment le dernier truc auquel j’aurais pensé (sourire), c’est le fruit d’une rencontre avec un mec qui est dans l’electro avec qui je m’entends bien. On va dire qu’au tout début du groupe ce qu’on écoutait c’était les tous débuts de KoRn, c’était encore bien l’époque grunge,

B : Les années 90 quoi !

M : On était bien fan d’Alice In Chains, de Pearl Jam, Nirvana, Soundgarden. Ce qui était bien dans notre découverte de ces musiques là, parce que quand on était ados, on était hard rock, c’est qu’on entendait des arrangements de guitares, de riffs, de batterie, des mélodies de chant qui sortaient pas mal de l’ordinaire et qui allaient chercher dans des harmonies, dans des sons qui semblaient un peu nouveaux même si en fait ils étaient pas du tout nouveaux parce que si on écoute Led Zeppelin ou des groupes comme ça, Pearl Jam, voilà quoi. Mais nous ça nous a permis de redécouvrir des choses un peu comme ça et puis de là on est allé dans l’écoute de pas mal de rock de plus en plus déviant : la noise, la pop ou des trucs de métal, de l’indus des choses comme ça et puis après chacun est passé qui par le reggae dub qui par le hip hop… Après on est souvent repassé par la Rochelle avec les Francofolies qui nous ont pas mal aidé à décoller entre 2001 et 2004 et ça a été aussi l’occasion de découvrir la chanson, enfin certaines choses dans la chanson qu’on a plutôt tendance à renier en bloc dans les chansons actuelles on va dire.

Genre?
M : En fait plus qu’un truc en particulier, on est allé travailler dans le cadre du chantier des Francos qui est une structure qui propose d’aider les groupes émergents et du coup dans ce cadre là, ce sont des choses qu’on fait à plusieurs groupes. Du coup, t’as des groupes de chansons avec qui on se retrouverait sur un concert, on serait dit : « bon voilà les gars sont sympas mais ça casse les couilles » et le fait de les voir travailler sur une semaine, eux nous voient travailler, de voir où eux bloquent, qu’eux voient là où nous on bloque, de fait toutes les défenses naturelles s’estompent et ça te permet de t’ouvrir vachement plus et d’apprécier d’autres choses, comme à chaque fois qu’on écoute une nouvelle musique, nous on se dit « ah, c’est bizarre » mais une fois qu’on a compris les codes, qu’on aime de manière un peu intellectuelle après vient la manière d’aimer cette musique plus normale, sans le côté analytique.

Tu parlais tout à l’heure du côté financier du groupe, Il y a un sujet dont parle pas mal sur VisualMusic, c’est le téléchargement sur le net, quelle est votre opinion là dessus?
M : La responsabilité individuelle en fait, le seul problème qui existe dans ces histoires d’avoir accès gratuitement à toutes les musiques, c’est qu’une musique de qualité, c’est à dire qu’aujourd’hui n’importe qui peut faire un album chez lui avec un minimum de matos et même si c’est très bien cette démocratisation du matos, mais pour atteindre une certaine qualité de son, de recherche, il y a un coût qui est incompressible. C’est à dire qu’à un moment donné, il y faut aller dans un studio, il y a de très bons micros qui coûtent 5 000 euros pièce, et c’est quasi seulement là où tu peux y avoir accès. Un album si on veut vraiment aller au bout de ce qu’il peut donner, ça coûtera toujours de l’argent. C’est un investissement que la plupart des groupes n’ont pas et donc il faut qu’on puisse à un moment donné vendre la musique. Dans nos pratiques, on télécharge, on écoute des trucs et puis c’est ça ce qu’on appelle la responsabilité individuelle : c’est que quelque chose qu’on aime vraiment, on s’arrangera d’une manière ou d’une autre pour que ça revienne au groupe soit à un moment donné acheter l’album à l’un de ses concerts ou le commander, soit simplement le fait d’aller le voir en concert, soit d’en parler parce que ça a été un gros flash et du coup de leur ramener d’autres personnes. Mais c’est vrai que le problème c’est ça, je me souviens d’un article où quelqu’un proposait la gratuité de tous les livres pour l’accès à la culture et il y avait une illustratrice qui disait qu’elle était pour la gratuité des livres mais que dans ce cas elle était pour quand elle va à la boulangerie pour chercher son pain, elle l’a gratuitement et quand elle va faire son plein d’essence, etc… à un moment donné faut dire que tous les gens qui fabriquent ces choses là et que ça occupe à plein temps, il faut qu’ils puissent en vivre.

On est bien d’accord, moi j’essaye d’appliquer au maximum le TRY AND BUY
M : Ouais moi aussi, j’écoute pas mal de trucs sur le net et quand il y a des albums qui me plaisent, je les achète et puis souvent il y en a qui sont suffisamment intelligents et qui ont aussi la thune pour faire de beaux objets. C’est pour ça que quand on sort quelque chose, on essaye de faire des trucs plutôt jolis, on a jamais fait des boitiers cristal parce qu’on aime bien le côté carton papier. Mais il y aussi la nouvelle génération qui n’écoutent plus leur musique que sur leur MP3, ça c’est un peu un souci surtout pour les gens avec qui on bosse qui ont des studios et qui arrivent plus à en vivre. C’est tout un pan de l’industrie musicale qui en train de tomber, on sait pas trop, est-ce que ça va revenir? Est-ce que les gens vont à nouveau avoir envie d’écouter du son comme il faut? Parce que les MP3s ont beau être de bonne qualité, ça vaut pas la qualité d’un CD.

Et au niveau de l’artwork, vous avez déjà une idée de ce à quoi ça va ressembler?
B : Ca s’affine

M : C’est en cours d’affinage, en fait c’est la même personne qui a fait la pochette de notre 2ème album qui s’y colle : ça va être très simple et comme c’est un double album, le live va être un peu une compilation de nos morceaux de jusqu’à Tue-Tête et un petit peu après et ce nouvel album studio du coup on réfléchit encore au titre de chacun, le live va s’appeler Combat De Coqs et l’ensemble de l’objet s’appellera « Bâtard« , l’album on est pas encore bien décidé, on y réfléchit [au final l’album s’appelle bien « Bâtard« ]

Et justement en parlant live, il paraît que vous tombez souvent la chemise
M : Ah ben, c’est systématique !

Et alors c’est devenu un gimmick ?
M : Ben c’est parti la première fois simplement parce qu’il faisait très chaud, on faisait une résidence : c’était pour préparer la première scène au Francos qu’on a faite. On s’est rendu compte qu’il y avait une vraie unité de groupe comme ça mais c’est plus l’aspect que pourraient avoir 4 danseurs. Il y a cet aspect visuel qui créé une unité de groupe et puis après psychologiquement, nous on s’est rendu compte que pour vaincre la timidité, le trac que t’as à chaque fois que tu montes sur scène quelque part si tu commences par arriver déjà à moitié à poil, bon ben voilà tac t’es là, t’es parti !

B : C’est vrai qu’on a essayé quelque fois de remettre les T-shirts mais on est pas à l’aise pareil, c’est déjà se mettre dedans.

J’en avais alors fini avec les gaillards mais ne m’étais aperçu de l’arrivée de Benjamin aussi discret qu’un ninja, j’en ai donc profité pour lui poser une question sur le fait qu’il joue de la trompette
Benjamin : En fait on va plus dire que je souffle dans une trompette parce que je suis pas du tout trompettiste. Il se trouve qu’en fait Bertrand, lui, avant la basse, faisait de la trompette, et donc y avait une trompette qui trainait dans le local de répétition et un jour j’ai soufflé dedans et puis j’ai utilisé des effets parce que c’est des trucs rigolos. Depuis j’en met de temps en temps mais je ne sais absolument pas jouer de la trompette. Je l’utilise plus en bruit qu’en jeu, mais le bruit ça fait du bien parce que ça aère un peu les oreilles du basse-guitare-batterie !

Voilà ce coup-ci ma curiosité était quasi étanchée, restait à jauger le live. Autant dire que je ne voyais pas comment j’allais être déçu, les petits problèmes techniques du groupe n’ont en rien gâché mon plaisir ni celui du (maigre) public qui a montré tout l’enthousiasme possible et imaginable, on en a presque oublié que la salle était au plus du trois quart vide !!! Le groupe est vraiment sublime, leurs ambiances et leur folie sont vraiment transcendées, une très grande soirée.
Des énormes mercis à Valérie pour avoir rendu ça possible mais évidemment aussi à Pierre, Maël, Bertrand et Benjamin pour leur disponibilté et leur gentillesse, en parlant de gentillesse, un grand merci à la fort sympathique dame de l’orga à Carvin pour l’invit au resto (oui j’ai la reconnaissance du ventre). Merci également au collègue Julien pour avoir partagé ce moment avec moi !