Interview ☭ Didier Super

On ne le dit jamais assez, mais Didier Super est un phénomène. Avec ses chansons merdiques, ce gars fout le bronx dans le monde de la musique francophone depuis 5 ans, révulsant aussi bien les auditeurs que sa propre maison de disques. Cela est tout à fait remarquable, surtout que ce n’est ni un musicien, ni un chanteur. Du coup, lorsqu’on le retrouve à l’affiche de l’excellent festival Couvrefeu, on se demande bien ce qu’il fout là.

C’est vrai ça, qu’est ce que tu fous là Didier Super ?
Didier Super: Bah, 3000 euros. Ça fait 6 cachets à 150 net, plus un billet d’avion pour notre batteur qui était en vacances en corse, et puis le reste pour les camions, vu que dans le groupe on est 4 dans le sud et 2 dans le nord. Donc à ce prix là, on vient !

3000 euros, ça fait miséreux… Metallica ils prennent 1 million !
Didier Super: En attendant, au moins j’évite l’usine … (Un mec des Fils de Teupuh accompagné de Diaz des M.A.P. passe à proximité) Hé, ils prennent combien les Fils de teupuh ?
Le mec des Fils de Teupuh: plus que 3000 quand on peut prendre plus que 3000 ! On peut négocier et se retrouver à 5000 des fois. On fait ce qu’on peut !
Didier Super: (s’adressant à Diaz) Ouais, et c’est combien M.A.P ?
Diaz (gêné): Je ne sais pas…
Didier Super: Rho allez tu le sais, dis le !
Diaz : Je te dirai rien, t’es capable de tout balancer sur scène !
Didier Super: Moi je dis, vous êtes 10 sur la route, ça devrais faire 6000-7000 euros !
Diaz: Disons qu’on est les spécialistes du grand écart. Quand on joue dans une mairie ou une administration quelconque, on braque. Après, on fait profiter les gens qui n’ont pas les moyens. Par exemple, on prend cachet double quand on joue pour les mairies de Carcassonne ou de Brest, et le lendemain on joue gratos pour nos potes de la CNT, pour les sans-papiers, etc.
Didier Super: Vous êtes les Robins des Bois du show business !
Diaz (souriant): On est plutôt les reubeux des Bois ! Et toi, tu as pris combien ?
Didier Super: 3000 euros. On est 6, plus le matos. C’est un peu raide, mais j’ai du négocier moi-même vu que je n’avais plus de tourneur quand ils m’ont appelé. Y’avait moyen de faire mieux au vu la programmation, mais bon, on ne va pas cracher dessus !

Revenons à toi Didier. Tu déclares partout que tu voudrais être une star. Pourquoi dans ce cas viens-tu jouer ici devant des bouseux ?
Didier Super: Entre pas jouer et jouer devant des bouseux, on préfère jouer devant les bouseux en se disant que peut être certains d’entre eux trouveront du travail.

Pourquoi t’es tu remis à faire des concerts ? Tes fans pré-pubères analphabètes qui aiment tes chansons sur les caniches, ils te manquaient, avoue le !
Didier Super: Non non, ils ne manquent pas. Mais si je ne fais pas ça, l’été je ne branle rien. Donc au lieu de faire un spectacle tout seul, je fais des concerts avec les copains pour les mongols.

Tes mongols, ils te rapportent plus que tes spectacles dans les salles de théâtre où tu fais payer 15 euros la place ?
Didier Super: J’en sais rien… Je suis payé toujours pareil ! (sourire) Celui qui palpe, c’est mon producteur. Enfin, mon ex-producteur: Il m’a viré au mois d’avril parce qu’il voulait que je devienne Pierre Palmade. Il a compris que je me branlais de ses objectifs, et que ça allait pas l’arranger de me garder. Officiellement, les aspirations de son entreprise sont plus orientées vers la musique, or mes aspirations artistiques sont plus orientées vers le théâtre, donc il était nécessaire qu’on arrête là.

C’était qui ton producteur ?
Didier Super: Asterios. « Asterios, les beaux spectacles« . C’est le même tourneur qu’Alela Diane, mais bon, je ne sais pas qui c’est. Je connais pas grand chose en musique !

La merde des autres, la réincarnation du Christ… C’est quoi ces projets à la con ?
Didier Super: Ce sont deux projets différents. D’abord il y a « Et si Didier Super était la réincarnation du Christ« , c’est ma comédie musicale qui m’a valu de me faire virer par mon producteur Mr Poubelle, qui disait que je n’allais nulle part avec un pareil projet. Il l’a dit également à Mr Artaud, le directeur de ma maison de disque Polydor, qui a lui aussi décidé de me virer (sourire). Virer par Asterios en avril, viré par Polydor en mai, tout ça grâce à ma comédie musicale ! En tout cas j’y vais à fond, je suis artiste, c’est une commande du cosmos, je ne dirige pas tout… Faut pas croire, mais je suis bien content de m’être fait virer par Polydor Universal. La merde des autres, c’est un disque dont je n’ai rien à branler et qui ne se vendra pas. C’est un ensemble de reprise avec Zeu Discomobile, qui est un groupe de copain dans lequel je suis depuis 98. Comme j’avais encore un disque à faire avec Universal, c’était donc un bon moyen pour ensuite ne plus être obligé de bosser avec eux. En tous cas, pour être libéré de tout rapport contractuel. Universal a dit: « Non, ce disque ne nous intéresse pas ». J’ai dit: « Je vais le faire quand même ». Ils m’ont « Ben non, t’as pas le droit ». Je leur ai fait « Bah si ! ». Et eux « Bon, d’accord ». Du coup on l’a fait quand même, et puis ils m’ont rendu mon contrat. J’ai eu le beurre et l’argent du beurre.

Polydor Universal a donc payé pour l’enregistrement…
Didier Super: Ils n’ont pas payé, mais surtout ils ne m’ont pas empêché de le faire. De toute façon, maintenant je peux le faire avec n’importe qui. Tu sais, j’étais un jeune puceau quand j’ai signé mon contrat chez V2 en 2004. J’ai signé pour 3 disques; ça veut dire les 3 disques que je fais dans toute ma vie, j’étais obligé de les faire avec eux. Je n’aurais dû signer que pour un seul disque !

Ca a un rapport avec le fait que tu aies pissé sur Universal ?
Didier Super: Ca, c’est encore autre chose, ça s’est passé quand on a fait le disque de l’année dernière (Ndr: « Ben quoi ?« ). Universal voulait faire une séance de photos avec moi. Je leur ai fait: « Vous voulez des images ? Des images qui tapent ? Ben venez en bas ! » J’ai pris deux verres d’eau et puis j’ai pissé. Y’a un copain qui a filmé le tout, parce que je me suis dit que ça pouvait toujours servir (Ndr: le lien vers la vidéo). Ça a fait marrer les gens d’Universal, jusqu’au moment où ils ont blêmi en voyant arriver un énorme taxi avec Pascal Nègre, l’homosexuel sarkoziste de gauche (Ndr: et président d’Universal). Il a juste vu la trace de pisse mais il ne sait pas qui c’est ! (rires)

Il y a eu d’autres dysfonctionnements de ce genre avec Polydor ?
Didier Super: Oui, pas mal. D’ailleurs, on est en train de faire une BD là-dessus qui sortira un de ces 4. Je te raconte l’histoire: Fin décembre 2008, j’avais rendez vous à midi avec Artaud qui était l’ancien patron de V2, et qui a été promu président de Polydor quand Universal a racheté V2. Je voulais lui expliquer pourquoi je ne voulais plus juxtaposer ma marque (« Didier Super ») à la sienne (« Polydor/Universal »). J’ai essayé de lui faire comprendre que leur manière de bosser ne me convenait pas. C’est fatiguant de bosser avec des gens qui te prennent pour un chanteur. Alors que, moi, comme ça (il enlève ses lunettes), je suis Olivier, je suis comédien. Alors que ces cons-là me prennent pour Didier Super… J’étais un peu bourré alors je lui ai fait « Vous les maisons de disques, si vous vous cassez la gueule, c’est de votre faute, ce n’est pas à cause du téléchargement uniquement, c’est surtout parce vous faites des disques de merde ! ». A Universal, j’avais le droit de prendre tous les disques que je voulais, je n’en prenais aucun. Le pire, c’est qu’Artaud en face, il n’avait aucun argument ! Autre chose: Pendant l’enregistrement de « Ben quoi ? », Artaud venait avec son directeur artistique. Ils ont toujours un avis sur question, hein. On était derrière la table de mixage, et puis le DA nous dit à un moment qu’un refrain d’une chanson manque un peu de pêche. On lui a fait « Mon pote, on va faire exactement le contraire ! » On rigolait, mais lui après n’a jamais rouvert la gueule. Dans la dernière semaine d’enregistrement, le DA vient me voir et me dit: « Salut Didier, ton album est mortel, trop chanmé, mais il manque deux titres ! » « Comment ça il manque 2 titres ? » que je lui fais. Le mec me fait comprendre qu’il est préférable commercialement de rallonger la playlist. Y’a pas à dire, ces mecs ont vraiment valeur ajoutée au niveau artistique. Bref, ce genre de fonctionnement m’a poussé à demander à partir.

C’est grâce à ça que tu as pu mettre « Ben quoi? » en téléchargement gratuit sur ton site ? (Ndr: à cette adresse)
Didier Super: En vrai je ne peux pas le faire… mais je le fais quand même. Le problème des disques, c’est que s’il ne se vend pas, il disparait des bacs, il n’existe plus, et c’est con. Si tu le donne, au moins il existe encore. Après je n’ai pas encore eu de plainte. Mais je ne pense pas qu’ils vont m’emmerder, parce qu’ils savent que financièrement, je ne suis qu’un intermittent, je ne pèse pas lourd. Et puis bon, ils savent que j’ai une grande gueule. Ce disque-là, je voulais l’appeler « Le moins bon de Didier Super« , parce que j’avais plein de chansons que je ne voulais plus jouer en concert, et que ça faisait 3 ans que V2 me faisait chier pour avoir de nouvelles chansons enregistrées. Il doit y avoir 4 bonnes chansons sur l’album… Finalement, on l’a appelé « Ben quoi?« , parce que ça nous faisait marrer d’avoir le black habillé comme moi sur la pochette.

Tu t’es inspiré de Kamel Ouali de la Starac pour ta comédie musicale ?
Didier Super: Pour faire ma comédie musicale, je suis allé en voir, et j’ai choppé de DVD de Notre Dame de Paris sur internet. Je l’ai regardé, et j’ai halluciné: Ce sont plein de chansons les unes après les autres, ils ont coupé l’histoire. En fait, l’histoire se fait en chansons. C’est nul. Je n’ai pas pu regarder jusqu’à la fin.

Du coup elle est comment ta comédie ?
Didier Super: Ben j’en sais rien, je ne l’ai pas encore écrite… Pose-moi une autre question !

Si tu insistes… A force de vanner tout et n’importe quoi sans distinction, tu n’as peur de devenir aussi chiant que Dieudonné ?
Didier Super: Dieudonné, je le trouve de moins en moins chiant. Depuis qu’il joue dans des bus, je trouve ça drôle. Le show business a fait qu’il en a eu plein le cul des gens, et il a arrêté de se mettre au niveau des gens, c’est tout. Je pense qu’il a quelque chose d’intéressant à raconter. Le parti Antisioniste, c’est drôle ! Dire qu’il est antisioniste, et se présenter aux Européennes sous cette étiquette… c’est une bonne blague ! C’est un comédien qui a du talent. Quand tu déchiffres ce qu’il raconte, c’est bien rigolo. Il explique que de faire de Le Pen le parrain de sa fille est une performance, ce qui est inimaginable pour un black. Tout monde se scandalise, mais lui il le fait seulement parce qu’il trouve ça drôle. Quand il fait monter Faurisson sur scène pour lui remettre le prix de l’infrequentabilité, il le dit que Faurisson est un pauvre type ! Mais il pose la question « Est-ce que c’est pour ça qu’il faut le diaboliser ? » On diabolise ce mec là, on diabolise Le Pen et derrière on élit Sarkozy. Pourquoi ? Je trouve ça intéressant de poser la question. Ces sketchs sur le 11 septembre sont drôles aussi, mais ça s’est pas dur, même Bigard il fait des trucs drôles sur le 11 septembre (rires)

Dernière question: Tu préfères la coke ou les putes ?
Didier Super: Moi je suis plutôt lait fraise, mais ça rentre pas dans tes catégories… je te fais un exposé pour la prochaine fois où on se verra.

Très bien, je te prends au mot! Merci d’avoir répondu à mes questions.
Didier Super: Bah écoute, quand on peut dépanner les webzines de merde… Et puis pour une fois je tombe sur un mec qui n’est pas trop con !

Merci à Olivier Haudegond, à Anne-Cécile, et big up à Rod aussi.