Gojira ✖︎ Magma

Magma, le sixième album des landais de Gojira est, sans jouer le pro-nationalisme ou le franchouillard basique, l’album de metal attendu cette année. Qu’il s’agisse de l’Europe ou des USA conquis depuis quelques années maintenant par le quatuor français.

Des paroles…

Les thèmes chers au quatuor

Oui Gojira nous fait régulièrement passer des messages via ses morceaux (n’en déplaisent aux personnes qui confondent death metal et satanisme). La vie, la perte, l’accomplissement de soi, notre place sur cette planète, la protection de l’environnement sont les discussions revenants le plus fréquemment avec le groupe. Ce sixième album ne déroge pas à la règle en reprenant certains des sujets chers au groupe. Probablement plus centré sur la perte d’un être cher (ndlr : suite au décès de la mère des frères Duplantier), Magma le reprend de manière magnifique sur différents morceaux tels « Low Lands », « The Shooting Star » & « Only Pain ».

Gojira-2016

De la nouveauté ?

« The Cell » aborderait-elle un nouvel angle pour le groupe ? Gojira semble y évoquer le bourrage de crâne que l’on subit de nos jours (par les médias ? les publicités ? les différents lobbying ?) et la difficulté de se « libérer l’esprit », de regagner une capacité de jugement, de libre arbitre.

« Magma », titre éponyme de l’album, aborde vraisemblablement la lutte de Patricia Rosa, mère des frères Duplantier, contre le cancer ; plus particulièrement la chimiothérapie puisque le titre ouvre sur ses paroles :

Producing poison. And creeping in your veins

& Des Actes…

Du Death Metal…

gojira-marioAlors oui, Gojira ne nous a pas sorti un album inattendu de World Music, Jazz ou Hip-Hop. Pas sûr que la surprise ait été aussi bonne (mais plus grande certainement). Les quatre landais nous pondent un album de Metal dans la droite lignée de ce qu’ils savent faire. C’est parfaitement maîtrisé. Les lignes de basse du moutain-biker Labadie restent monstrueuses et donnent d’excellentes ossatures aux morceaux du groupe.

« Silvera » est dans cette droite lignée. Bien qu’accueillie chaleureusement par une bonne partie de l’audience visualienne, elle me semble presque, à ce jour, la chanson la moins bonne de l’album (c’est dire sa qualité parce qu’elle m’émoustille sacrément). Il me semble entendre la chanson la plus typique du répertoire de Gojira. Elle pourrait très bien s’insérer dans n’importe quel autre album sans problème. « The Shooting Star » pourrait s’en approcher mais on sent déjà plus de retenue de la part du groupe pour que l’auditeur rentre dans l’album gentiment et soit transporté tout le long des 43 minutes à venir.

… Teinté et nuancé !

La force de ce sixième album pondu par nos chers landais, c’est la sonorité que dégagent de nombreux morceaux. En plus d’un Death Metal typique, le groupe a su les nuancer, les teinter d’autres saveurs formant un tout homogène mais captivant. Le chant de Joe Duplantier a également évolué pour être plus posé et nuancé sur de nombreux morceaux (par volonté ? obligation devant l’usure de sa voix lors des tournées ?).

« Stranded », le premier single de l’album nous en donnait un sacré aperçu. Une sorte de power death metal furieux peu entendu chez Gojira, déroutant. Parfaitement servi par sa durée de plus de 4 minutes qui permet au groupe de développer leur metal si particulier. « Yellow stone », l’interlude bienvenue pour digérer ce début rocambolesque où tout s’enchaine pour qu’on prenne le temps d’absorber tout ça, de le digérer pour mieux l’apprécier.

gojira-strandedLa deuxième partie de l’album après l’interlude regroupe les morceaux les plus forts de cet albums. Moins directs, plus construits. « Magma » avec ses breaks fulgurants, un riff typique du groupe (merci Christian Andreu) comporte pourtant une aura quasi mystique avec ces passages envoutants, ses voix résonnantes. Gojira nous mène dans son temple du Death Metal et on entre dans une frénésie folle. L’enchaînement avec « Pray » est parfait. On poursuit l’album avec une musique aux reflets mystiques. Quasi de l’ésotérisme. Toute proportion gardée ceci m’évoque des passages de Roots de Sepultura 20 ans auparavant. Faut-il y voir un signe du destin ? Un quelconque message vaudou ? Peut-être. Toujours est-il que quand Mario Duplantier se décide de cogner fort sur sa batterie, ceci nous réveille de notre méditation chamanique et nous ramène à des considérations plus « matérielles ». Le senti avant le ressenti.

Sur cette fin d’album, « Only Pain » déteindrait presque en représentant une chanson plus classique dans le répertoire de Gojira qui aurait sa place dans L’Enfant Sauvage.

Mais le quatuor Landais a conservé le meilleur pour la fin : « Low Lands ». Un morceau quasi progressif digne d’Oceansize. Un début tout en retenu mais non minimaliste. L’émotion est contenue et digne avant de devenir expansive et d’envahir l’espace sonore. « Libération » conclut cette album non de manière posée mais plutôt vidée. On a déchargé l’émotion, l’adrénaline. Il ne reste plus que quelques soubresauts pour pondre ce titre vide de mot.

Après l’éruption ?

Le groupe a t-il fini sa mue, épuisante ? Est-ce le reflet des membres du groupe ? Des frères Duplantier dont l’album a pu être, en partie, un exutoire (que ce soit au niveau professionnel ou personnel) ? La qualité de cet album ne fait aucun doute. Elle le doit au travail de ces quatre membres et ne doit pas être uniquement ramené à la fratrie de Gojira et à ses évènements de vie. Peut-être ceci a sublimé cet album mais la qualité intrinsèque du groupe transpire depuis le début. Preuve en est que leur chemin de haute volée (au niveau composition et texte) les a mené là puisque cet album était clairement attendu au tournant au niveau mondial. Gojira ne nous a pas déçu, loin de là.