INTERVIEW – COLA

Trio composé d’anciens du groupe Ought et du batteur des US Girls, Cola pose ses valises à Paris en pleine tournée européenne. Avec un premier album sorti l’an dernier, nous nous sommes entretenus avec leur chanteur Tim Darcy.

On a eu la chance de vous voir plusieurs fois à La Route du Rock ou à Paris via Ought, ça fait plaisir de se revoir avec Cola. Comment se passe cette tournée ?

Ça fait 8 semaines que nous sommes sur la route. Deux semaines et demies aux Etats-Unis, un petit break à Montreal, 2 semaines au Royaume-Uni et on sort tout juste du festival Best Kept Secret. Les concerts ont été incroyables et très fun, ça fait du bien de jouer en salle aussi.

J’ai lu que votre manière de fonctionner sur ce projet était assez différente de Ought qui fonctionnait principalement par des jams tous ensemble. Ici, vous composiez à distance avec l’envoi d’une démo par semaine tous les vendredis.

Exactement ! Pour être honnête, on n’a pas commencé comme ça. A l’automne 2019, notre batteur Evan et moi vivions à Toronto et Ben est passé nous rendre visite. J’avais quelques chansons et ‘Excited’ était l’une d’elles. On voulait juste retrouver pour s’amuser, il n’y avait pas de plan établi. La première répétition a été très plaisante et ça nous a beaucoup plu. On a donc planifié quelque chose pour se voir plus régulièrement. Puis, la pandémie a démarré et on s’est tous retrouvés confinés.

En réponse à cela, on s’est envoyés des démos chaque semaine avec cette deadline du vendredi. Avoir ce genre de structure nous a permis de faire fructifier ce temps libre que l’on avait. On a fini par avoir une quarantaine de chansons et une fois par mois, on se retrouvait et on les bossait tous ensemble. Maintenant, Evan participe aussi activement à la composition et notre dernier single en est un exemple puisque c’est une chanson qu’il a écrite.

 

Cela vient donc d’une autre session que celles réalisées pour le premier disque ?

Oui, pour l’édition Deluxe de l’album on a fait une session d’enregistrement. Une version alternative du morceau ‘Landers’ et cette chanson se sont ajoutées à la fête. Ce single sera sûrement sur le prochain album, sur lequel on est en train de travailler.

Vous avez déclaré que le fonctionnement sur Cola était plus démocratique ou du moins collaboratif que dans le passé, avec une écriture des morceaux partagée. En comparaison avec le style assez progressif et post-punk basée sur l’improvisation que vous aviez pour Ought. Ton rôle au sein du groupe est aussi différent puisque que tu dois moins porter cet image de leader ici.

Sur Ought, c’était une vision du groupe plus traditionnelle où j’ai du naturellement assumé le rôle de frontman. Ca me permet avec Cola d’avoir une approche rafraîchissante : la moitié des chansons a été composée par Ben, notre bassiste. Ce qui m’amène à juste devoir trouver des paroles, ce qui est amusant pour moi car sa manière de jouer est très différente de la mienne.

Et tu connaissais Evan par une tournée sur ton projet solo en 2017 ?

J’ai fait une tournée aux Etats-Unis où on a joué ensemble pour la première fois. On s’est bien entendus et ça a posé les premières bases de ce groupe aujourd’hui.

J’ai lu que vous bougiez entre Toronto, Montreal, New York et Los Angeles ces derniers temps. A quel point la ville ou votre environnement du moins joue sur votre inspiration ?

Pour être honnête, cette alternance est assez récente pour nous. On a composé l’album entre Toronto pour Evan et moi et Montréal pour moi. Par contre, c’est peut-être quelque chose qui influera sur le disque suivant. Ses voyages se sont passés au gré des concerts : on en a profité pour rester quelques jours de plus pour composer. Et même si Montréal est une ville incroyable, ça nous a permis aussi d’échapper à l’hiver canadien qui peut être assez pénible et long par moments.

Comment fonctionnez-vous sur l’aspect visuel de votre musique ?

On avait une idée en tête et on voulait porter plus d’attention à cette partie. Avant, ça se faisait assez naturellement. Maintenant, ça fait 10 ans que l’on travaille dans la musique et ça nous permet d’être plus structuré. Aussi avec la pandémie, ça nous a laissé plus de temps pour réfléchir et identifier des personnes. Catherine qui a fait notre pochette est très talentueuse, elle était elle aussi très excité par le projet. Notre ami Maxwell Farrell (@fakoandro) qui a fait 3 clips pour nous, ça nous permet d’avoir une certaine cohérence. Récemment, j’ai pu travailler à Toronto dans une reprographie et ça m’a donné l’occasion de vraiment creuser toute la culture des magazines indépendants et c’est une scène très vivace. C’est fun et hyper créatif et ça m’a permis aussi de développer mon regard là-dessus. Il y a un duo espagnol Rapapawn qu’on aime beaucoup qui a sûrement travaillé pour un budget bien moindre pour la vidéo de ‘Degree’.

 

Comme tu l’as dit, vous faîtes partie d’une scène qui a émergé depuis 10 ans. Du Canada, des Etats-Unis ou d’Angleterre. Ought, Protomartyr, Metz, Preoccupations juste pour en nommer quelques-uns. Cela te fait quoi d’appartenir à une scène aussi vivace ?

Je suis complètement d’accord sur la qualité et la profusion des artistes sur cette période. A tous ceux qui pensent que la musique à guitares est morte, ils ne pourraient pas plus se tromper. Il y a une quantité de musique vitale et intéressante assez incroyable. Cela fait plaisir d’en faire partie. Notre première partie, Holm, en est un bon exemple. Le chanteur vient du groupe Yung qui nous a accompagné sur Ought est un de nos amis et c’est super de pouvoir défendre ensemble nos nouvelles chansons.

Tu es connu pour ton goût pour la poésie et la qualité de tes textes. Comment nourris-tu ton inspiration ?

Je ne peux pas précisément pointer quelque chose de spécifique mais je lis beaucoup. Récemment, j’ai découvert et adore Ron Ashbury. Une grande figure de la poésie américaine à laquelle je ne m’étais pas encore intéressé. Ensuite, le dernier livre de Bianca Stone, Jesus Son par Denis Johnson et aussi Black Spring d’Henry Miller. Hélas, j’ai laissé le livre à Rotterdam et je suis dégouté car je le trouve très drôle.

Quelle est la dernière chose qui vous ait fait rire ? 

Chaque soir pendant la tournée américaine, on joue aux dès pour savoir qui va prendre le meilleur lit. Il s’avère que le hasard fait que notre batteur n’arrête pas de perdre. Un soir à Atlanta, j’ai eu pitié de lui et j’ai voulu prendre le mauvais lit. Lui n’a pas compris de suite et croyait que je lui volais son lit et commençait à râler en essayant de s’asseoir sur moi. (rires)

Dernière question : j’ai vu que la chanson qui passait le plus dans votre tourbus était Inspector norse de Todd Terje.

Bien sûr, ça met toujours l’ambiance ! Le groupe et notre manager écoute beaucoup de musique électro et ça permet d’avoir un bon mood dans le van.

Avec leur excellente prestation à l’International et son très bon premier album, Cola est bien lancé et on est déjà curieux d’entendre leur prochain album dont on a pu entendre un petit aperçu ce soir…