INTERVIEW – DANIEL ROSSEN (GRIZZLY BEAR)

Connu pour être l’une des têtes pensantes des Grizzly Bear, Daniel Rossen était de passage à Paris pour un concert au Café de la Danse à l’issue de son premier album solo, You Belong There. Discussions sur la construction de ce projet, les concerts acoustiques et l’enregistrement en dehors des studios.

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Cela fait un moment qu’on ne vous a pas croisé, comment ça va ?

Je suis en Europe pour une semaine. On a commencé en Allemagne, je suis content d’être arrivé à Paris, c’est sympa. Tout semble avoir redémarré pour de bon, il y a du monde. Toutes les sorties de disques et les concerts retardés sont réunis en même temps et boom !

Dix ans se sont écoulés depuis votre dernier projet solo, Silent Hour / Golden Mile. Mais c’est la première fois que vous enregistrez sous votre propre nom. Comment tout a commencé ?

En fait, ce n’est pas si différent du passé : ces dernières années ont eu tendance à nous plonger dans nos propres univers. C’est une collection de chansons que j’ai terminée pendant cette période où j’étais surtout chez moi.

Et avant ça, j’ai vécu dans le nord de l’État, un peu à l’état sauvage, au milieu de nulle part. En 2012, l’EP Silent Hour / Golden Mile et Shields avec Grizzly Bear sont sortis coup sur coup, ce qui faisait beaucoup de musique d’un coup. En plus de ça, tu ajoutes les tournées et je pense qu’il y a eu un peu d’épuisement à la fin. Pendant quelques années, j’ai continué à composer tout en vivant et en réfléchissant. Je sentais que j’avais besoin de faire ça. D’une certaine manière, cet album est une tentative de capturer cette période et de donner un sens à ces 10 dernières années. Revenir à la musique et en faire avec un peu plus d’intention. J’essaie d’être aussi honnête et ouvert que possible. Parce que tu ne sais pas ce que l’avenir te réserve et comme je vieillis dans ce monde de la musique, je sens que c’est le moment.

Je peux être aussi honnête que je veux : les enjeux sont relativement faibles, je peux faire ce que je veux. J’occuperai ma propre petite section du monde de la musique dans lequel je suis.

J’ai lu qu’en vieillissant, tu étais plus sujet à l’autocritique à propos de tes idées et de ta musique. Comment as-tu fait pour passer outre ce blocage ?

Je ne dirais pas que c’était un blocage : c’est juste que je ne fais plus confiance à mes propres idées comme je le faisais quand j’étais très jeune. Quand on va vite et qu’on bouge vite. Je pense qu’il y a un côté positif à cela, qui amène un peu plus de réflexion et une sorte de conscience de soi. Vous vous concentrez davantage sur l’intention. C’est difficile d’expliquer ça en interview sans que ça fasse « ahhhh ». (il s’arrache les cheveux)

Parfois, il était difficile de trouver l’issue de ces chansons, en partie parce que je me poussais à essayer de faire quelque chose de différent. Je me poussais à essayer de faire quelque chose qui dépassait un peu mes capacités. Une chanson comme ‘I’ll wait for your visit’ : les bases de la chanson étaient là, mais aller jusqu’au bout a pris du temps. C’est dû à plus d’autoréflexion, plus de critique et à moi en train d’essayer quelque chose qui dépasse ce que j’ai fait auparavant. Ce qui est un noble exploit, puisque je n’ai pas sorti de disque depuis si longtemps.

Je voulais que ce disque soit substantiel et assez spécial pour les gens qui ont attendu longtemps. Comme j’ai pris tant de temps, je ne voulais pas juste balancer quelque chose. J’aurais probablement dû le faire il y a 6 ou 7 ans. (rires)

Certaines critiques portaient sur la pression que je me suis imposée pour que ce soit une sortie spéciale, étant donné le nombre d’années. J’espère que la prochaine pourra être un peu plus rapide !

Maintenant, tu as trouvé l’astuce : tout était là, dans ton nom !

Grizzly Bear est connu pour les harmonies vocales et les mélodies très travaillées, polies. Un exercice assez difficile à réaliser en solo. En plus, le disque était censé être collaboratif. Comment as-tu entrepris le switch ?

C’était en partie une question de commodité. J’avais réservé ce temps en studio en avril 2020 pour mettre en place un planning, avoir des phases de travail, utiliser un ensemble concret d’outils et trouver des solutions. Mais le confinement est arrivé et je voulais enregistrer ce disque. J’ai toujours aimé l’orchestration et construire des arrangements a toujours fait partie de mon rôle dans les groupes dans lesquels j’ai joué. Comme j’étais seul, je pouvais essayer de voler de mes propres ailes.

Je pouvais essayer de travailler à distance avec les joueurs et essayer d’expliquer ce que je pense, mais c’est lent et assez difficile. Et si vous voulez changer quelque chose, c’est vraiment difficile parce que vous devez vous recontacter et essayer d’expliquer à nouveau. C’est assez abstrait et j’ai une certaine expérience des instruments à cordes. J’ai déjà fait des parties de violoncelle, j’en ai joué aussi quand j’étais enfant. J’ai donc décidé de prendre des instruments et de voir ce que je pouvais faire. Parfois c’était bien et parfois c’était terrible. Je n’arrivais pas toujours à faire les choses que je voulais faire, mais je pense qu’en apprenant ces choses, j’ai réussi à élaborer une palette un peu particulière à la 12ème corde.

Il y a un petit monde particulier dans ce disque que j’ai fini par vraiment aimer. On a l’impression d’être dans une petite pièce, mais c’est luxuriant.

C’est rare d’avoir les deux en effet et on sent que le disque est à la fois intime et plein de coffre. Comment Chris Bear s’intègre-t-il au projet ?

Nous sommes restés en contact constamment pendant tout ce temps et je parle toujours à tous les gars. Mais lui et moi avons travaillé de manière assez proche pendant longtemps. Je lui ai envoyé les premières versions tout au long du processus. C’est tout simplement logique. Et depuis l’EP Silent Hour/Golden Mile, j’ai joué beaucoup de batterie moi-même mais c’était beaucoup plus simple, des structures plus simples. C’était plus donner des coups dans la batterie qu’autre chose. Plus rock dans l’approche. Alors que dans ce disque, je ne voulais vraiment pas que ce soit dans cette veine. Je voulais que ça ressemble à de la musique pré-rock and roll. Faite actuellement ou non. Comme si le rock n’avait pas existé.

Pour en revenir à Chris, il est tellement doué et apporte tellement d’ampleur. Et nous partageons beaucoup d’influences, c’est très facile de s’entendre avec lui.

Pour le set, tu es seul avec trois guitares et un piano. Comment as-tu préparé la tournée ?

Je joue environ six ou sept chansons de l’album, elles ne sonnent évidemment pas exactement comme l’album : il y a des parties manquantes. J’ai fait une tournée comme ça il y a 6 ou 7 ans pour le dernier EP : je voulais me produire seul.  J’ai trouvé cela intéressant, stimulant et surprenant. Je me sens beaucoup plus à l’aise avec ça maintenant, même si cela implique de réimaginer le son des chansons pour les faire fonctionner en live. « Shadow in a frame » par exemple est basé sur ces parties de guitare, donc ce n’est pas si étrange. Sur « Tangle », je fais tout le piano, ce qui est difficile. Ça ne sonne pas exactement comme sur le disque mais c’est toujours la chanson. De plus, je peux relier la chanson de manière plus fluide par rapport à ce que j’ai fait dans le passé. J’ai envie de créer une cohérence dans le set parmi les morceaux et de créer une sorte de transe. J’aime ce genre de performance parce que je peux vraiment me connecter très directement avec le public d’une manière que je n’ai jamais fait avec un groupe. Il n’y a pas de jeu de lumières, on ne peut pas se cacher derrière un mur de bruit : il faut être là et être là avec le public et jusqu’à présent, les gens qui viennent à ces spectacles sont vraiment prêts à vivre l’expérience. Ils sont vraiment là avec moi et c’est génial. J’adore ça. J’espère que ca influencera peut-être ce que je ferai ensuite. Peut-être qu’il y a une version de cette écriture, qui est encore plus intime et directe.

Votre set s’intègrera parfaitement à l’atmosphère du Café de la Danse.

Peux-tu me parler de la relation que vous avez avec Warp, puisque vous travaillez ensemble depuis presque le début ?

Je les connais évidemment depuis longtemps. Le staff a changé au fil des ans et Steven, le directeur de Warp aujourd’hui, y a travaillé il y a des années à différents postes. J’ai toujours eu avec lui de bonnes conversations sur la vie, les idées et d’autres choses. C’est un type intelligent et tout le monde là-bas se comporte comme des gens « normaux » : ils aiment ce qu’ils font et ils ont toujours de bonnes idées sur la façon de traduire cette musique aux gens de la bonne manière. Je me rends compte que je suis une personne loyale à bien des égards et il était logique de travailler avec eux parce qu’ils connaissent si bien ce que je fais et qu’ils sont toujours investis à l’heure actuelle. J’ai de la chance qu’ils soient toujours prêts à le faire car c’est évidemment un risque pour eux.

C’est difficile pour tout le monde, les musiciens, les labels et le journalisme musical. J’apprécie donc qu’ils soient toujours prêts à le faire et ce sont de bonnes personnes.

Comme tu as vécu à New York, Brooklyn et maintenant Santa Fe : comment l’endroit où tu vis influence ta musique ?

Ressentir mon environnement et la construction de petits mondes sonore ont toujours fait partie de ce que je fais. Avec cet album, il s’agissait davantage d’un endroit particulier de ma vie, à la fois mentalement et physiquement. C’était très spécial, percutant et ça m’a fait réfléchir à ma propre place dans le monde. L’impact de l’environnement dans lequel tu es est très intuitif. Ce n’est pas quelque chose auquel on pense vraiment, comme « quelle progression d’accords représente Santa Fe ? ». (rires)

En plus, je n’enregistre jamais en studio : toujours à la maison. J’enregistre là où je suis et ces sons se retrouvent sur les disques. C’était vrai également pour Grizzly Bear. Vous entendrez peut-être le crépitement de la cheminée dans la pièce. À un moment donné, nous avons travaillé dans une église en ruine à Brooklyn et vous pouviez entendre les pigeons qui passaient, le parc ou les vélos à proximité.

Aujourd’hui, quel est votre lien avec la musique en tant qu’auditeur ? Qu’écoutez-vous ?

J’ai un enfant de trois ans, donc j’écoute beaucoup de ce qu’il veut écouter, mais parfois on l’oriente dans la bonne direction. Je suis dans une phase d’exploration de la musique du début du 20e siècle. Comme la vieille musique country américaine, avec laquelle je n’ai pas grandi et que je ne connais pas beaucoup : Ernest Tubb, Loretta Lynn et George Jones. Un monde de musique qui ne représentait pas grand-chose pour moi quand j’étais enfant.

La première partie de cette tournée, Clara Mann, me parlait de ce renouveau du folk irlandais. Elle m’a envoyé des artistes, qui ont leur propre carrière là-bas mais nulle part ailleurs peut-être. Comme Lisa O’Neill, que je n’avais jamais entendue auparavant et qui est incroyable : très évocatrice, pleine de lyrisme et avec une voix vraiment étrange. Quelque chose que je n’aurais jamais pu trouver aux États-Unis. Je m’intéresse davantage aux choses comme ça. J’aime vraiment en savoir plus sur les endroits du monde où il existe encore une tradition musicale vivante, qui n’est pas totalement submergée par les conneries de la promo. Il y a bien sûr de la bonne musique actuellement aux États-Unis, mais on a souvent l’impression qu’elle vous est imposée : vous êtes censé la consommer parce qu’elle est promue d’en haut. 

J’ai lu que tu as commencé à travailler sur des B.O de films, c’est une première pour toi ?

Je ne sais pas où ça va me mener, mais j’ai fait un peu de musique pour deux films, qui sont des projets totalement différents. C’est intéressant, j’apprends car c’est nouveau pour moi. J’ai travaillé sur ces projets en même temps que je me préparais pour cette tournée, donc ces derniers mois ont été assez fous. C’est peut-être quelque chose que je vais poursuivre ou non, cela reste à voir. Je ne suis pas du tout disposé à recevoir des ordres des gens. Si je pouvais faire ce genre de travail où je peux définir ce que je fais, alors je le ferais. Mais sinon, j’arrêterai probablement et je continuerai à faire des disques. Même si les disques ne rapportent pas d’argent, c’est ce que je préfère faire.

Quelle est la dernière chose qui vous a fait rire pendant cette tournée ?

Beaucoup d’aspects de cette tournée européenne étaient assez drôles. Surtout parce que Clara et moi faisons tous deux des concerts intimes et discrets. Pour Clara, c’est sa première tournée. Elle a perdu sa setlist à Munich où nous jouions dans ce bar old school avec des trucs assez sexistes sur les murs, comme la photo d’une femme nue qui se serre contre le bar et des graffitis partout. Un vrai club de rock brutal où elle a perdu sa setlist et l’a dit sur scène.

Quelqu’un a répondu : « Tu veux qu’on la retrouve ? ».

Et elle a répondu : « Non, c’est le rock hélas ».

C’est devenu l’une des phrases d’accroche de la tournée.

Plus nous avançons dans cette tournée, plus on sera dans des lieux appropriés. Paris est super, Londres le sera aussi, j’ai hâte d’être à Dublin et Glasgow.

Quelle est la prochaine tournée après l’Europe ?

Comme j’ai fait le tour du Sud-Est et du Canada en voiture avant de rentrer chez moi, je vais faire la côte Ouest. Ma famille pourrait m’accompagner en voiture pour une partie de la tournée, ce qui va être dingue. Mais c’est une bonne idée. (rires)

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Daniel Rossen was in Paris for a gig at the Café de la Danse, supporting the release of his first solo album, You Belong There. Discussions about its confection, doing acoustic shows and recording whereever you are.

It’s been a while without seeing you in Paris, how have you been?

We are in Europe for a week. Started in Germany, I’m happy to have made it in Paris, this is nice. Everything seems to started up again and it’s pretty full-on. All the record releases which were supposed to happen and the delayed gigs are coming together at the same time and boom!

It has been 10 years since your last solo project, Silent Hour / Golden Mile. But it’s the first time that you are recording under your own name. How does it all started?

If anything, it’s not so different from the past: just the last few years woven us in our own corners. This is the collection of songs that I finished in this time period where I was mostly home. And a couple years before that, living upstate kind of in the wild in the middle of nowhere.

The Silent Hour / Golden Mile EP that year and Shields with Grizzly Bear were like a real push, so much music all at once. On top of that, you add touring and I think there was a little bit of a burnout after that. During a few years, I was still working on music while I was living upstate, walking, the land. and thinking. I felt like needed to do that. In some ways, this album is an attempt to capture that time and to makes sense of the last 10 years. Coming back to music and do with a little more intention. Try to be as honest and open as I can. Because you know, you’re not clear what the future holds and as I get older in this music world, I feel like now is the time. I can be as honest as I want: the stakes are sort of low, I can do whatever I want. I’ll occupy my own little section of whatever music world I am in.

I read the more we get older, you are getting more self-critic towards your ideas and music. How did you cope with this writers’ block and solve it?

I wouldn’t say it was a writers’ block: I just don’t trust my own ideas in the same way I did when I was really young. Where you’re going fast and moving quickly. I think there’s a positive side to that which is like a little bit more reflection and kind of like self-awareness. You are more focusing on the intention. It’s hard to explain that in interviews without it coming off like “ahhhh”. (Daniel pulling his own hair)

Sometimes it was hard to break through the wall of some of this material, partially because I was pushing myself to try to do something a bit beyond my ability. A song like ‘I’ll wait for your visit’: the basics of the song were there but getting to the point took some time. It’s due to more self-reflection, more criticism and it’s me trying to do something that’s beyond what I’ve done before. Which is a noble feat if I haven’t released a record in so long.

I wanted this to be substantial and to be special enough for people that have waited a long time. Since I have taken so long I know I didn’t want to just toss something out there. I probably should have just tossed something out there like 6 or 7 years ago. I think there’s that too. Some of the criticism was the pressure I put on myself for this to be a special release, given how much time has passed. I hope the next one can be a little faster.

Now, you found the trick: it was all there, in your name!

Grizzly Bear is known for the vocal harmonies and the musical melodies which are very crafted and polished. First thing thinking about a solo record made out of guitars within the folk genre, we don’t expect You Belong There to be this intimate and wide at the same time. Plus, the record was supposed to be collaborative. How did you achieve to make it on your own?

It was partially just convenience. I had scheduled that studio time in April 2020 to put a planning, having phases of work, use a concrete set of tools and figure things out. But lockdown happened and I still wanted to work in music. I’ve always loved orchestration, building arrangements has always been part of my role in the bands I played. Since I was on my own, I could try to fly on my own.

I could try to work remotely with players and try to explain what I’m thinking, but that’s slow and kind of difficult. And if you want to change something, it’s really hard because you have to connect again and try to explain again. It’s kind of abstract and I have some experience with stringed instruments.

I’ve done cello parts before,I played woodwinds as a child. So I decided to pick up instruments and just see what I can do. Sometimes it was good and sometimes it was terrible. I couldn’t always pull off the things I wanted to do but I think through learning that stuff, I gonna work out a little particular palette upright in the 12th string.

There is a little particular world of this record that I came to really like. Having the sense of feeling in a small room but it’s lush.

It’s rare to have both. How does Chris Bear come into the project?

We’ve kept contact pretty consistently through this time and I still talk to all guys but he and I have worked pretty closely for a long time. I was sending him early versions throughout the process. It just makes sense. And since the EP Silent Hour Golden Mile, I played a lot of drums myself but that was a lot more simpler kind of simpler structures. Much more, just like making banging through it. It was more linked to a rock identity. Whereas in this record, I really didn’t want it to be in that vein. I wanted it to feel like pre pre- rock and roll music. Made currently or not. Like the whole rock’n’roll attitude didn’t happen.

Going back to Chris, he’s so skilled and brings so much breadth to what he could play. And we share a lot of the same kind of influences, it is very easy to get right with him.

For the set, you are alone with three guitars and a piano. How did you prepare the tour?

I’m playing about six or seven songs from the record, they obviously don’t sound exactly like the album : there are missing parts. I did a tour like this 6 or 7 years ago for the last EP: I wanted to perform alone.  I found it interesting, challenging and surprising. I feel a lot more comfortable with it now, even if it involves reimagining what the song sounds to make them work live. “Shadow in a frame” for example is based on these guitar parts, so it’s not strange. On “Tangle”, I’m doing all the piano, which is hard. It doesn’t sound exactly like the record but it’s still the song. Also, I can connect the song more fluidly from what I did in the past. It’s creating a moving consistency within the performance and going into a trance. I enjoy this kind of performance because I can really connect very directly with the audience in a way that I’ve never did with a band. There’s no light show, you can’t hide behind a wall of noise: you have to be there and be there with the audience and so far, people who come to these shows are really up for the experience. They’re really there with me and it’s great. I love it. I’m hoping that it will inform maybe what I do next. Maybe there’s a version of this writing, which is even more intimate and direct.

Your set will fit amazing with Café de la Danse’s atmosphere.

Can you tell me about the relationship you have with Warp, as you are working together nearly since the beginning?

I know them obviously for a long time. The staff has changed over the years and Steven, the head of Warp now was working there years ago at different positions. I always had good conversations about life, ideas, and other things. He is a smart guy and everybody there feel like normal people: they like what they do and they always have good ideas on how to get this music to people translated the right way. I’m realizing I’m a loyal person in a lot of ways and it just made sense to work with them because they know what I do so well and they are still invested in it. I feel lucky that there’s still willing to do this because it’s obviously a risk for them.

It’s tough for everybody, musicians, labels and music journalism. So I appreciate that they’re still up for it and they are good folks.

As you have been living in New York, Brooklyn and now Santa Fe, how does the place you’re living in impacts your music ?

A sense of place and building little sonic worlds has always been part of what I do.

With this record, it was more about a particular place that I was in my life both mentally and physically. And what that time period was like for me and tries to transcendent qualities of it, feels the connection to the place. That was very special, impactful and made me think about my own place in the world.

This sense of place is generally intuitive. It’s not something you really think about like ‘what chord progression represents Santa Fe? Also, I never record in studios and always in homes. I record wherever I am and those sounds make their way onto the records and that was true for Grizzly Bear. Maybe, you will ear the crackling of the fireplace in the room or whatever else is going on. At one point, we worked in a broken down church space in Brooklyn and you could hear pigeons flying by, the park or bicycles nearby.

Today, what is your link to the music as a listener? What are you listening?

I have a three-year-old so I listen to a lot of what she wants to listen to but sometimes we can steer her in a good direction. I am still in a phase of exploring earlier 20th century music to some degree. Like older US country music in the US, which was not something I grew up with and didn’t know much about it: Ernest Tubb, Loretta Lynn and George Jones. A world of music that didn’t mean much to me when I was a kid.

The opener on this tour, Clara Mann, was telling me about this revival of Irish folk. She has been sending artists, who have their own career there but nowhere else maybe. Like Lisa O’Neill, I never heard her before and it’s incredible: very evocative, full of lyricism and with a really strange voice. Something I could never found in the States.

I’m more interested into little pockets like that. I really love to learn more about places in the world where they’re still living tradition in music, which isn’t totally subsumed by the bullshit of popular promotion. There is obviously good music going on in the US, but a lot of it feels thrust in your face: you’re supposed to consume this because it’s being promoted from the top down.  

Other music makes me thing about films, you were working a score?

I don’t know where it gonna go but I do a little score work for two different films, which are total different projects. It has been interesting, I learn as it’s new to me. I was working on them as I was preparing for this tour so it has been some crazy last few months. It might be something I pursue or not, it remains to be seen. I’m pretty ornery about taking orders from people. If I could do this kind of work where I can define what I’m doing, then I’ll do it but otherwise I probably stop and just keep making records. As records don’t make any money, that’s what I rather do.

What is the last thing that made you laugh during this tour?

A lot of aspects of this particular European tour felt slightly ridiculous. Especially because me and Clara are both doing intimate and quiet shows. For Clara, it’s her first tour out. She lost her setlist in Munich where we were playing in this super dingy, old school bar with vaguely sexist stuff over the walls, a picture of a naked woman clutching herself over the bar and graffiti everywhere. A real brutal kind of rock club where she lost her setlist and saying it on stage.

Someone answered: ‘do you want us to grab it?’

And she said: ‘no, this is rock’n’roll unfortunately.’

It became one of the catch phrase of the tour.

The more we advance in this tour, the more it will feels legitimate. Paris is great, London will be, I’m looking forward to Dublin and Glasgow.

What’s next in terms of touring after Europe?

As I drove myself around Southeast and Canada before going back home, I’m going to do the West Coast. My family might come along in the car for some of it, which will be insane but fun!

Daniel Rossen is working his own magic on the beautiful You Belong There. Where he proves that without Grizzly Bear or Department of Eagles, he’s fully able to create this generous and sensitive guitar sound we love.