La La Land

Pour changer, abordons un film sorti récemment en France (début Décembre aux USA et au Canada) : la comédie musicale dont on nous rabâche les oreilles depuis plusieurs semaines maintenant : La La Land.

Du Damien Chazelle

Le réalisateur et auteur du film, Damien Chazelle, n’en est pas à son coup d’essai du film « musical » (ndlr : dans le sens sur le thème de la musique). Son premier film Guy and Madeline on a Park Bench« était centré sur la relation entre un joueur de jazz, Guy & Madeline ; pas sur les débuts tumultueux et passionnées mais sur la période suivante, où le train-train s’installe et prend ses aises… à leurs dépends. Cette comédie musicale restera plutôt confidentielle et le succès ne fut pas au rendez-vous. Mais, la suite, vous la connaissez déjà, c’est la sortie de son succès Whiplash. Un film que l’on pourrait qualifier de thriller musical où on voit les pérégrinations d’Andrew Neiman au sein d’une prestigieuse école de musique, après avoir été remarqué par l’un de ses professeurs les plus réputés : Terence Fletcher. La musique est ici au service de l’intensité et de la pression ressentie pour le film. Les morceaux de Jazz choisis s’y prêtant volontiers avec des tempo très enlevés. Le must-see de fin 2014/début 2015 qui propulse le jeune réalisateur Damien Chazelle sur le devant de la scène.

Et le revoilà fin 2016/début 2017 avec son troisième film : La La Land. Une comédie musicale, qui a tout cartonné et qui s’est retrouvée dans toutes les grandes cérémonies cinématographiques (les Oscar avec 14 nominations, record égalé de Titanic & All About Eve ; les British Academy Films Awards ; les Golden Globes Awards). Le format n’est pas trop long en durée. Le film, dont le scénario a commencé à être écrit en 2010, garde un thème assez simple : une rencontre, amoureuse évidemment, entre deux inconnus aux parcours et aux goûts différents. Cette rencontre ne se fait pas en une fois puisqu’on y suit les évènements de vie qui entrainent ces rencontres, quasi stochastiques, dont la multiplication crée la complicité et une attraction entre les deux protagonistes Mia Dolan et Sebastian Wilder, interprétés respectivement par Emma Stone et Ryan Gosling. Un petit peu comme des étoiles binaires en attraction, se tournant autour avant de se percuter.

Pour le côté visuel, le film est haut en couleurs, les vêtements des protagonistes évoluent tout le film pour se rapprocher de leur ressenti, refléter le « tempo » de leur relation ; en étant haut en couleurs au début et en se démarquant du décor de manière ostentatoire. Pour, petit à petit, se fondre dans le tout et prendre des teintes plus sobres.

Et la Musique dans tout ça ?

Justin Hurwitz, le nom ne dit rien à l’heure actuelle dans l’univers des compositeurs de films, mais cela pourrait changer dans les années à venir (et permettre de renouveler le stock des Zimmer, Williams, Shore, etc.). C’est pourtant derrière lui que se cache la superbe bande originale qui accompagne LA comédie musicale de l’année. Ce que je reprochais à Moulin Rouge, un excellent film, c’était l’absence de titres originaux. Pour La La Land tout a été composé pour le film. Beaucoup reproche la sur-utilisation « d’un même morceau ». A mon avis, les morceaux tournent tous autour de 3 grands thèmes musicaux que le compositeur arrive à parfaitement décliner selon la situation à l’écran.

On retrouve ces 3 grands thèmes dans « Another Day of Sun » (LE tube du film qu’on retrouve à la radio), « Mia & Sebastian’s Theme » et « City of Stars« . « City of Stars » est intelligemment distillée tout le film, chantée une fois par Sebastian seul, une fois en duo avec Mia. On retrouve la chanson chantée par Mia seule dans la bande originale. Les titres « Someone in the crowd » & « A lovely Night » se défendent particulièrement bien ; de par leur sonorité 60s qui rappelle la grande époque des comédies musicales américaines et françaises (et il faut dire que pour l’inspiration et les clins d’œil le duo Chazelle/Hurwitz a bien fait son boulot). D’ailleurs le reproche du film est souvent d’être inspiré de cette époque et de rester en deçà de Singin’ in the Rain (Chantons sous la pluie), LA référence en comédie musicale (avec les films de Jacques Démy). Si ce film est comparé à la référence et s’en trouve juste en dessous, je ne comprends pas où est le problème. Tout le monde ne fera pas un Apocalypse Now, un Citizen Kane, un Annie Hall, etc. Mais déjà s’en rapprocher, ne serait-ce que l’effleurer est une belle prouesse.

La La Land s’en rapproche via des compositions originales créées pour le film (et donc parfaitement adaptées pour coller à l’arc narratif et aux situations).

Les acteurs dans tout ça ?

Honnêtement Ryan Gosling et Emma Stone ont pris un risque avec ce type de film. Une comédie musicale, où il faudra chanter et danser… Ça pourrait puer la catastrophe. Et bien non. Certes, ce ne sont pas des danseurs professionnels, ni des chanteurs aguerris mais cela donne une touche réelle et sincère au film. Leur voix ne sont pas extraordinaires (encore que Emma Stone s’en tire bien sur « The Fools who Dream« ), les sessions de danse et de claquette sont limitées techniquement MAIS au moins on se passe de doublures. Le film paraîtrait, bien évidemment, mieux foutu et plus flamboyant mais cela donnerait un goût amer au tout et plus artificiel. Je préfère amplement que tout soit fait par les acteurs, de manière plus simple, mais qu’il n’y ait aucun doute sur leur prestation. Et c’est le cas. Cela colle parfaitement à l’histoire du film : une rencontre menant à une relation (qui n’était pas toute faite au départ) mais qui, cahin-caha, arrive à s’affranchir des problèmes à sa façon pour déboucher sur quelque chose.