The Prodigy – Always Outnumbered, Never Outgunned

En 1997, un album révolutionnaire mêlant hip hop, rock et techno avait mis tout le monde d’accord dans l’ensemble de presse. ‘The Fat Of The Land‘, avec ses 10 tubes, ressemblait à un album parfait, le genre de CD qui vous suit toute votre vie et auquel toutes vos futures oeuvres sont comparées. Et bien on peut dire que Prodigy n’était pas pressé de nous fournir un successeur à ce chef d’oeuvre, puisqu’il aura fallu attendre 7 longues années pour l’avoir entre nos mains. Et en 7 ans, on peut très vite tomber dans l’oubli général… Entre temps, le groupe a déçu pas mal de monde avec un single auto-parodique (‘Baby’s Got A Temper‘) et une attitude de rock stars typiquement britannique. Cela dit, ne boudons pas trop notre plaisir, car nombreuses étaient les critiques à avoir définitivement enterré ce groupe peu productif : l’album est là, entre nos mains, et il enfin possible de le jauger.

Premier truc à savoir : Maxim et Keith Flint, les 2 autres membres du trio, sont absents du CD, Liam Howlett s’étant chargé intégralement de la composition et de l’enregistrement. Ses 2 comparses sont remplacés par une flopée de stars (Liam et Noel Gallagher, Juliette Lewis, Twista, Princess Superstar, The Ping Pong Bitches…). ‘Always Outnumbered, Never Outgunned‘ commence avec une bonne grosse claque : ‘Spitfire‘, sous ses airs simplistes, est un titre d’une puissance phénoménale dont le refrain n’est pas sans rappeler ‘Smack My Bitch Up‘. On retrouve tout de suite la touche Prodigy, vous savez, cet espèce de rock technoïde aux énormes blastbeats… Ce premier morceau, comme beaucoup d’autres, comporte également une belle touche orientale, avec de superbes choeurs de Juliette Lewis (vous savez, l’actrice que l’on a pu voir en bikini dans Starsky et Hutch).

Girls‘, le premier single du CD, rend un hommage aux Beastie Boys, avec un sample clairement inspiré de ‘Intergalactic‘. Liam Howlett rappe de manière très old school, avant qu’un gros beat de basse syncopé ne s’empare de vos oreilles. Bien que très radiophonique, ce morceau est un vrai petit bijou où, encore une fois, le refrain est interprété par une femme.

Memphis Bells‘, avec ses beats de cloches, est un des titres les plus orientés techno du CD. Princess Superstar s’occupe du chant (‘Make It Once, Make It Twice‘), alors que des samples rappelant Ghostbusters apportent une touche résolument old school à ce titre très rythmé. ‘Get Up Get Off‘ s’oriente vers un hip hop très vindicatif, avec le flow ultra-rapide de Twista sur un rythme particulièrement saccadé. Cependant le chant féminin fait nettement baisser le niveau de ce morceau qui ravira uniquement les amateurs de rap.

Hot Ride‘ nous permet de retrouver le Prodigy qu’on aime, avec un sample électronique qui rappellera de bons souvenirs aux fans d’Earthworm JimJuliette Lewis se débrouille plus que bien au chant, avec un refrain des plus des aguicheurs (‘Gimme Gimme Gimme Gimme Gimme Gimme Gimme‘…). Sa voix n’est pas sans rappeler celle de Shirley Manson (Garbage), bref, elle assure grave ! ‘Wake Up Call‘, après un sample piqué à SlipKnoT (‘Only One‘, sur le CD éponyme) monte bien en puissance grâce à un excellent beat de basse tout en groove. Ce morceau aux paroles très répétitives (‘Back On Tour One, Two, Three… We Are Back On Four – You Better Wake Up‘) regorge de sons plus originaux les uns que les autres (cloches, flûte, réveil à la Pink Floyd), et finalement il s’avère très réussi, dans la lignée directe de ‘Diesel Power‘.

On enchaîne avec ‘Action Radar‘, un des meilleurs morceaux de cet ‘Always Outnumbered, Never Outgunned‘ : on y retrouve (enfin) le chant nasillard et énervé de ‘Fuel My Fire‘ qui fit la renommée du groupe. La basse constitue à nouveau l’essence même de la rythmique, alors que des choeurs lointains apportent un caractère épique à la chanson. ‘Medusa’s Path‘, l’un des 2 instrumentaux du skeud, est de loin mon titre préféré : à la manière de ‘Climbatize‘, il vous fait voyager loin, très loin. Ce titre se veut très oriental, avec ses nombreux samples de flûte et de violon. Sweeeeet !

Phoenix‘, qui sample ‘Love Buzz‘ de Shocking Blue (comme Nirvana en 1989), démarre sur un énorme beat mêlant plusieurs instruments. Malheureusement, répété pendant près de 4 minutes, ce sample hypnotique finit par saouler l’auditeur. Heureusement, des choeurs féminins TRES langoureux viendront apporter un peu de diversité à ce titre pas assez développé… ‘The Way It Is‘ rend quant à lui hommage à Michael Jackson, avec un sample de ‘Thriller‘ bien plus dense que l’original. Pendant près de 6 minutes très dansantes, on attend que quelque chose de nouveau se passe dans cet instrumental, mais non, Prodigy fait dans la facilité et s’enfonce comme trop souvent dans la répétition (le gros défaut de cet album).

Finalement, après plusieurs titres moyens (dont l’immonde ‘You Will Be Under My Wheels‘), on finit par se décourager, mais heureusement pour nos oreilles, ‘Shoot Down‘ relève enfin le niveau avec son sample emprunté à Sagittarius (‘My World Fell Down‘). Ce titre orienté rock, où apparaissent Noel et Liam Gallagher d’Oasis, est une grosse réussite, à l’intro douce mais efficace. Liam y est difficilement reconnaissable, tant il y a d’effets de distorsion sur sa voix, mais il fait des merveilles lors de la dernière minute. Belle manière de conclure le CD.

Always Outnumbered, Never Outgunned‘ est donc globalement un bon album, sans trop de remplissage, mais il manque simplement de grands tubes de la trempe de ‘Smack My Bitch Up‘, ‘Breathe‘ ou ‘Firestarter‘. Un peu juste pour 7 longues années d’attente pourrait-on se dire… On peut également lui reprocher de pas mal tourner en rond : les morceaux sont en effet assez épurés, et quand on a entendu les 2 premières minutes d’un titre, on en a généralement fait le tour. Cependant, ne soyons pas trop durs, car cet album vient de nulle part, Prodigy ayant été plus ou moins oublié par tout le monde depuis quelques années. Liam Howlett a réussi à se renouveler, et à ne pas faire dans la redite après l’énorme succès de ‘The Fat Of The Land‘. Moins commercial, malgré les apparences, cet album est donc une valeur sûre, qui souffrira malheureusement toujours de la comparaison avec son glorieux prédécesseur.