Le Hellfest et sa pelouse encore verte le deuxième jour.

HELLFEST 2016 – JOUR 2 ★ CLISSON

Deuxième jour de cette onzième édition du Hellfest : de la Valley, de la Valley et encore de la Valley (et surtout de la Valley).

Pour changer, réveil efficace et arrivée dans les temps pour le premier groupe, les français de Lumberjack Feedback et leur duo de batteries. Ça se ressent évidemment sur le son, très puissant et structuré. Du sludge instrumental de bonne facture sur un set vraiment court de début de journée.

Sur la Main Stage, c’est du belge au menu avec Steak Number Eight. Et une sacrée débauche d’énergie de si bon matin. Le chanteur n’est surement pas à jeun pour avoir autant la pêche. On a même droit à la première exécution de la figure du jour : monter sur les épaule d’un collègue. Ici, c’est le guitariste qui vient faire un solo sur les épaules du chanteur. Lui de son côté se bat pendant plusieurs titres avec son pied de micro qui ne veut pas rester en place. Il finit carrément avec le micro dans la bouche avant qu’un technicien ne vienne régler tout ça. Sa ténacité est applaudie. Et niveau son ? Un post-quelque chose, rock agressif et déstructuré qui passe très bien sur une Main Stage en début de journée.

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Après un Hangman’s Chair sans grande folie, c’est sur un “allons-y, ça fera chier les blackeux” mais surtout par curiosité, que nous avons quitté la Valley pour se diriger vers la Temple, qui accueille pour changer une chanteuse. Myrkur c’est Amalia Bruune, une danoise (blonde et plutôt jolie s’il faut le préciser), accompagnée de trois mecs aux allures de ghoules (les mecs de Ghost sans les masques en gros). L’attention est bien sûr focalisée sur la schizophrénique en chef, qui, à l’image de son pied de micro, se dédouble et renferme deux personnalités. Chant clair et cristallin a cappella sur un visage angélique, de suite effacé par des grimaces de possédée lorsqu’elle se met à hurler. Ce qui arrive régulièrement puisque nous sommes au Hellfest. C’est donc très contrasté, entre instant de grâce avec une prestation vocale de haut vol et tabassage en règle sur fond de hurlements hystériques. Le contraste se lit également sur le visage d’Amalia aux traits doux et angéliques qui se transforme en furie quatre accords plus tard. Le bilan, c’est tout de même plus de chant clair et c’est pas plus mal : les hurlements sur fond de double pédale forment parfois du black sans saveur et sans vie.

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Retour à la joie de vivre et à la légèreté sous la Valley, pour découvrir Crobot. Veste en croco rouge ouverte sur une chemise à fleur elle-même ouverte sur un torse (pas très) velu, Brandon Yeagley au chant nous fait vite oublier la noirceur de la Temple. Il y a bien un petit côté hippie dans le hard-rock de Crobot. Avec une énergie folle sur scène, il est liquéfié au bout de deux titres : l’ambiance est déjà très moite pour un concert du midi. La figure du jour est ici inversée par rapport à Steak Number Eight : c’est le chanteur qui monte sur les épaules du guitariste. Chris Bishop à la guitare qui a certainement envoyé valser plus d’une guitare avant de trouver la sangle qui lui convenait : avec une moyenne de 3,4 lancers de guitare autour du corps par titre, c’est surprenant qu’il ne finisse pas le concert momifié par son câble. Entre ça et sa bonne dizaine de sauts depuis l’ampli, il tient une forme olympique. On peut aussi parler du bassiste étrange, qui déambule en crabe sur la scène avec des coups de têtes de malade. Bref, Crobot c’est étrange et coloré sur scène mais surtout hyper dynamique.

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Toujours sous la Valley mais à des années lumières des couleurs et du pimpant de Crobot, le duo guitare/batterie teuton de Mantar. Configuration étrange avec les deux musiciens face à face, perpendiculaires au public, sur une scène plongée dans un noir et blanc fantomatique. C’est affreusement sombre et déchiré côté son, avec un chanteur/guitariste qui s’arrache sur chaque titre. Hanno de son prénom est un mélange entre une figurine en latex pour sa souplesse anormale et une sorte de Gollum possédé hurlant au micro (merci l’éclairage tout en contraste). Erinc à la batterie, avec ses gants de mec qui se donne, fait ce qu’il faut pour accompagner Hanno dans ses sombres errements. Belle claque sur des titres comme “Era Borealis” ou “Cross the Cross”.

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Quelques titres de Sixx AM en dégustant un délicieux rougail saucisse (pas aussi bon que celui de ma cousine-par-alliance-qui-est-mauricienne-et-pas-réunionnaise-mais-c’est-pas-loin-donc-elle-s’y-connait-quand-même), histoire de se dire que non, le heavy-californien-lunettes de soleil ce n’est toujours pas ma came. On se remet donc à l’abri du soleil sous la Valley. Valley qui est pleine pour accueillir Torche, le très bon « Restarter » de l’année dernière a fait son effet. Énorme mur de son en pleine face et aucun répit de tout le concert : le public est aussi compressé que les guitares.

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Petite balade sur le site, déjà plein en ce début de fin d’après-midi, jusqu’à Foreigner sur la Main Stage. Timing parfait pour tomber sur “I Want to Know What Love Is” : câlins collectifs et amour partout, c’est beau. Mais trêve de joyeusetés, il est temps de retrouver la veillée funéraire de With the Dead, toujours sous la Valley. Costume noir de rigueur respecté, avec l’ajout du chapeau de même ton pour le bassiste. Le groupe est vraiment classe et sur un air assuré et détendu balance ses hymnes d’enterrement.

Vous avez dit soirée Stoner ?

Pour une fois que Zack Wylde n’est pas là, la dose de branlette est assurée par Satriani, je passe. A l’opposé, c’est un grand plaisir que j’éprouve devant Goatsnake et son stoner avec du vrai bon chant dedans. Pas d’énormes riffs aphrodisiaque, plus orienté blues et basses, mais prenant. Et Peter Stahl est bluffant.

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La dose de John Garcia cette année est assurée grâce à la venue d’Hermano. Avec un dernier album qui aura 10 ans l’année prochaine et aucune actu particulière, c’est surprenant mais on ne va pas se plaindre : c’est MAGIQUE. Placé devant la régie pour quelques photos, j’ai vite regretté de ne pas plus profiter de l’ambiance quelques mètres devant moi. Les titres font mouche, mélangeant groove, riffs, puissance et trips aériens.

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Tout est bien rangé et harnaché donc pas de photos pour Fu Manchu, histoire de ne pas répéter l’erreur d’Hermano et profiter à fond d’au moins un gros concert de cette énorme soirée stoner. Et il fallait assurément être préparé, entre la température bouillonnante et l’énergie dans la fosse, allant jusqu’au circle pit. Le son moins acéré mais plus fuzz que le concert précédent est plus dansant et parfait pour s’agiter. J’en ressors détrempé et fatigué mais comblé.

What the ?!

Le désormais traditionnel feu d’artifice est cette année forcément consacré à Lemmy. Rien à redire, le son et l’image se mélangent toujours aussi bien, un sacré boulot qui épate tout le site qui s’est mis sur pause pour apprécier. Ils parviennent même à finir en affichant un “RIP LEMMY” et un “HELLFEST”, joli.

Après un gros marketing en 2015 pour Gutterdämmerung, on en a très peu entendu parlé depuis. Personne ne sait trop à quoi s’attendre dans le public, qui est resté divisé sur tous les points. Il y a d’abord les assis (bah quoi, c’est un film) et les debouts (bah non, c’est un concert), qui ont eu bien du mal à s’entendre à la frontière qui les sépare. Il y a ensuite ceux qui sont dedans (plutôt les debouts) et ceux qui s’ennuient sévèrement (les nombreux qui sont partis en route). Dans ceux qui, assis ou debouts, sont restés, il y a ceux qui ont trouvé ça très bien et ceux qui ont trouvé ça tout pourri et peu d’entre deux. J’ai trouvé l’expérience intéressante et originale, même si les changements d’ambiance, avec par moments de longues séquences sans musique, ont entraîné des longueurs. Le concept a le mérite de proposer une nouvelle expérience en festival. Il y a bien un groupe derrière l’écran, mis en avant et en lumière par moments, et pas mal d’interactions entre le film et le direct (elles pourraient être plus nombreuses). Le ballet de stars est éclectique et permet de satisfaire tout le monde. Et le best-of rock/métal est parfait pour tout amateur de rock : Black Sabbath, Led Zeppelin, Deftones, Queens of the Stone Age, Nirvana et autres joyeusetés populaires. Par contre l’insistance sur le fait que Gutterdämmerung est pour son créateur l’oeuvre de sa vie, que ça lui a pris plus 5 ans à le faire était un poil lourde. Malgré ces quelques critiques, c’est un concept original, à apprivoiser mais qui mérite de s’y attarder.

Je retiens de ce deuxième jour Mantar et le triptyque Goatsnake / Hermano / Fu Manchu, avec une dernière séance sur Gutterdämmerung.

Le samedi de FooFree

Comme tous les samedis du Hellfest, le réveil se fait plus douloureux et donc plus tardif. Heureusement, il est accompagné par la douce lourdeur des français de Hangman’s Chair. Puis vient l’heure de l’obligatoire rendez-vous avec la jolie Myrkur, excellant tant dans son chant clair que dans ses cris de banshee.

C’est sur les conseils de Boris que je vais ensuite voir les rois du groove Crobot, qu’on retiendra surtout pour leur style vestimentaire et leur incroyable jeu de scène. Puis toujours sur les conseils du même Boris et dans la même vallée, les guerriers de Mantar, qui forment à eux deux une armée dépourvue de toute forme de pitié qui viole la convention de Genève sept fois en quarante minutes.

Les très attendus Torche nous offriront un son assez insoutenable, mais cette fois dans l’acception littérale du terme. C’est carrément trop fort et presque inaudible dans les premiers rangs. Heureusement ça n’aura pas empêché le public de fous furieux de faire la fête comme si on entendait quelque chose.

Enfin vient ce qui était pour moi le concert de la journée : celui des assez rares With The Dead, dont vous avez compris l’importance si vous avez suivi l’épisode précédent. C’était donc Lee Dorrian de Cathedral avec Tim Bashaw et Mark Greening du true Electic Wizard, mais sans Mark Greening et avec Leo Smee de Cathedral et Alex Thomas de Bolt Thrower. Déguisés en créateurs de mode, la petite famille recomposée a réussi à créer une ambiance malgré un son perfectible, les si fameuses danses de Lee Dorrian aidant.

Fait drôle : le groupe a par la suite partagé le report d’un mec qui affirmait sans honte aucune que Mark Greening était avec eux sur scène ce jour-là (et qu’il voyait pas pourquoi Ramesses jouait la veille vu qu’il restait personne lol). J’ai donc corrigé le mécréant, puis eu l’agréable surprise de voir que le groupe avait supprimé mon commentaire. Il faut donc comprendre soit que la tension est telle qu’on ne peut plus prononcer son nom, soit qu’ils voudraient faire croire que Mark est encore dans le groupe.

Petit passage de tête devant le long solo de Satriani avant de retourner se payer l’intégralité de la leçon de rock n’ roll offerte par Goatsnake, puis nouvelle randonnée éclair pour capter quelques notes de Bad Religion et plaçage pour ce qui était sans doute l’événement du festival : la reformation d’Hermano.

Une grande claque dans la gueule. Les gars sont à fond et semblent vraiment heureux de rejouer ensemble. John Garcia présente ses collègues, précisant à chaque fois que chacun a pris l’avion depuis chez lui spécialement pour Clisson… et c’est à ce moment-là qu’on réalise que si les autres dates de la tournée de reformation ne sont jamais tombées, c’était parce qu’il n’y avait pas de tournée de reformation. Hermano ressuscitait le temps d’un soir pour nous et rien que pour nous. Coachella tu peux pas test.

Retour sur les mainstages pour la fin de Bring Me The Horizon et un set plus convainquant que ce à quoi ils nous avaient habitué. Oli ayant réalisé que sa voix ne tenait pas en live assume à présent ses (très nombreux) samples, pour un résultat assez réjouissant.

Nous voilà donc en place pour la toute dernière de Twisted Sister, un événement que je ne serais jamais allé voir en salle et que permet ainsi le Hellfest. Pendant un peu plus d’une heure ça saute, ça chante, ça tacle Scorpion et on passe au final un très bon moment.

Un feu d’artifice mémorable et un bel hommage à Lemmy plus tard, direction la Warzone pour l’ovni du festival : le film/concert Gutterdämmerung, présenté par le père Henry Rollins. Je fais partie des enthousiastes (debout) qui auraient bien aimé un peu plus de participation du public. Si la collection de scènes était sans conteste très stylée, le montage assez dégueulasse pouvait rendre l’histoire difficile à suivre. Bon, c’était pas aussi dégueulasse que Batman v Superman, mais presque. Bref, le concept était assez génial et reste pour moi une réussite.

Petit ciné-concert avec monsieur #HenryRollins. #Gutterdammerung #Hellfest #Hellfest2016

Une photo publiée par @visualmusic le