Defeater – Letters Home

Depuis que Comeback Kid se fait de moins en moins convaincant et que Verse et Bane semblent péricliter, Defeater s’est imposé comme un acteur majeur du hardcore moderne avec deux albums et un EP remarquables en tout point. Si le quintet de Boston se distingue, ce n’est pas tant par ses compositions, mais par ses textes : Tous les albums du groupes racontent les déboires d’une famille américaine ancrée dans l’après-guerre – l’occasion d’aborder divers thèmes intemporels comme la violence domestique, la ségrégation, la misère et ici plus particulièrement les addictions et les traumatismes des soldats vétérans.

Letters Home‘ s’attarde sur la vie du père de cette famille qui écrit (et reçoit) des lettres du front à ses amis et sa famille. Comme sur les albums précédents c’est magistralement raconté. Pour peu que l’on soit anglophone, c’est le réel point fort du disque. Niveau instru c’est tout à fait correct : Defeater livre un hardcore rageur, mélodique et maîtrisé. Le titre d’ouverture ‘Bastard‘ règle la mire d’office, le gros tempo et les riffs acérés sont de sortie, ce qui se confirme avec les titres suivants (un ‘Blood in my eyes‘ vraiment puissant, ‘Hopeless again‘ frôlant la perfection dans sa première partie)

Mais la bande de Derek Archambault ne se contente pas d’une attitude bovine, bien au contraire. En avançant dans l’album, l’ambiance se fait plus pesante, les propos plus graves et le rythme s’en ressent. Le groupe avait déjà exploré cette voie un peu maladroitement sur Empty Days and Sleepless Nights et s’est bien amélioré sur ce point, même si certaines transitions paraissent assez pataudes (Death Set, pas très convaincant). Cela donne quelques jolies perles, comme le très mélodieux et varié ‘No Faith‘.

Globalement, ‘Letters Home‘ est un album qui se tient bien. Nerveux, racé, investi, il offre une panoplie flatteuse d’un groupe sûr de ses capacités. Néanmoins il souffre grandement de la comparaison avec les sorties précédente du groupe : ‘Travels‘ avait tapé très très fort, ‘Lost ground‘ avait enfoncé le clou et ‘Empty Days and Sleepless Nights‘ avait su habilement brouiller les pistes en proposant notamment des plans acoustiques de toute beauté, étonnamment absent de ce ‘Letters Home‘. Defeater avait habitué à du caviard, c’est normal qu’on fasse les fines bouches aujourd’hui.