Griefjoy ✖︎ Cigale ✖︎ Paris

Un soir d’octobre, nous étions à La Cigale pour le festival des Envolées. Le concept de ces 3 concerts étaient apparemment d’être français tout en jouant aux anglais. Ce qui me va parfaitement puisque je n’apprécie que moyennement les chansons francophones. Constat bien regrettable je vous l’accorde en ces temps de Goldman Génération.

The Lanskies essuie les plâtres de ma première fois à La Cigale. Un rugbymen ayant vite quitté les vestiaires pour la 3ème mi-temps se présente au micro dans une chemise serrée et s’élance avec sa bande dans une pop dansante très british très, trop, référencée. Comme dans un blind-test, on s’amuse à piocher l’origine de chaque morceau : Bloc Party, Talking Heads, The Smiths, The Cure… L’ensemble est loin d’être désagréable mais le frontman a tendance à oublier l’expression « trying too hard ». Un comble pour un anglophone, qui s’époumone après chaque morceau à force de demander l’engouement de la foule. Celle-ci réagit pourtant plutôt bien, sachant qu’on ne pense pas qu’elle se soit déplacée pour eux. Ces ¾ d’heures de show, un brin fatigant se termine et j’aurais bien du mal à me souvenir quelques jours après de leur prestation. C’est triste à dire mais ils font partie de ces groupes que l’on voit une fois une après-midi de festival l’été ou comme là en première partie et qu’on oublie dès le véritable plat de résistance entamé.

Les Von Pariahs prendront la suite et je les attend au tournant. Ces Caennais exilés à Nantes ont bien un point commun avec le groupe précédent : leur chanteur est anglais et les autres non. Leur premier album est sorti à la rentrée et a cassé mes habitudes. Je regarde toujours d’un œil torve les sorties « rock » françaises et les derniers winners de cette scène (Lescop ou Fauve par exemples) me donnent encore moins envie de m’y intéresser. A travers un lien de Nico Prat sur Twitter, j’ai changé mon fusil d’épaule et la quinzaine d’écoutes d’Hidden Tensions ne m’a jamais déçu. Inspiré et racé, ils ont quelque chose d’authentique et apportent vraiment quelque chose de nouveau. Bien sûr pour emmerder le monde, il serait compliqué de ne pas citer Joy Division quand on les cite mais à l’inverse de ces voisins rockeurs un poil trop pompeurs, ce serait à la fois réducteur et con de s’arrêter là. Après cette longue mise à jour contextuelle, quel résultat en live ? Comme leur sortie studio, les VP ne sont pas là pour nous faire marrer. La communication est limitée, les sourires sont restés backstage et les morceaux s’enchaînent. Ca tombe bien, on est partisan de ceux qui la ferment et qui jouent. La voix est toujours aussi grave et puissante, tout comme le mix entre le rock nerveux et les légères nappes de claviers se mixent bien dans l’acoustique de la salle. L’exercice du live est totalement validé au vu de la rapidité à laquelle défile le set et « Trippin« , « Skywalking » ou encore « Under The Guns » suffisent à chauffer la fosse. Charisme, maîtrise et classe sont les trois mots-clés à taper si vous voulez parler d’eux les prochaines fois. Ca laissera Ian Curtis tranquille.

Griefjoy est né sur les cendres de Quadricolor. Outre être l’ancêtre d’un meme avec Bruno Vandelli, ce mot désignait l’ancien groupe des niçois connu pour ses covers Youtube de morceaux connus passant des Strokes à Nirvana. Sous cette nouvelle mouture, l’électro se mêle clairement à leurs compos avec un nombre de potards à agiter largement supérieurs aux cordes des guitares. Ayant déjà vu Quadricolor il y a quelques années chez les amis du Grand Mix lors du festival Radar avant une certaine Anna Calvi inconnue à ce moment, j’avais découvert Griefjoy lors d’une vidéo Mikrosession filmé par l’ancien Le Hiboo. Etonné à l’époque, j’ai hâte de voir leur prestation même si je ne suis pas convaincu à 100 % par leur album. Même si je l’ai pu écouté une dizaine de fois en prévision du live et qu’il garde ses aspects catchy et bien produit, des sonorités mielleuses et quelques fautes de goûts viennent casser la bonne impression générale. Par exemple, comment ne pas penser aux intonations du Thom Yorke d’In Rainbows en écoutant l’hyper référéncée « Blind Visions » et ses longues notes aiguës ? Certains passages électro de l’album font aussi penser à Robert Miles mais nous ne sommes pas sûrs que c’est volontaire. De la même manière que sur album, ils entament leur set par une longue intro de clavier et c’est parti les notes hautes et tenues de la part de Guillaume Ferran au chant. Là encore, les structures de Griefjoy ne trompent pas et on sent que l’accalmie ne durera pour laisser place tranquillement à un morceau plus pêchu. Le groupe use et abuse des montées crescendo pour faire grimper la tension et se prendra d’ailleurs, un peu, les pieds dans le tapis en faisant s’asseoir toute la salle pour une explosion qui n’en portait que le nom. A me lire, vous pourrez croire que je suis parti déçu de leur concert et je dois avouer que non. Le rendu était comme pour Von Pariahs plutôt fidèle à ce que j’espérais. Entre rock propre et soigné et électro remuant gentiment, le résultat est convaincant mais on se demande toujours pourquoi ils ont l’air d’en garder sous le pied. A l’image du look du batteur qui porte la panoplie complète du hipster parisien qui habite à Brooklyn dans sa tête avec son bonnet sur le dessus de la tête, on reprochera aux Griefjoy d’avoir une attitude de poseurs. Musicalement, les bons points sont là avec des morceaux comme « People Screwed Up » et « Kids Turn Around » pour ne citer qu’eux. Il suffit de voir à quel point « Touch Ground » a été rapidement adopté par le public pour se dire que l’avenir ne devrait pas leur poser de problème. Comme ils n’ont pas l’air d’être de mauvais bougres, on attendra la suite des événements afin de voir comment les choses évoluent. A peine leur concert fini, mon voisin de derrière m’apostrophe. Son visage m’est familier. Il s’agit de Christophe Crénel, l’ancien Monsieur Plus Vite que la Musique dorénavant animateur de Rodéo sur Le Mouv’. Le bonhomme que je regardais lorsque j’avais une petite dizaine d’années n’a pas trop changé. Ce qui ne m’empêche pas de prendre un coup de vieux. Il nous demande à moi et ma demoiselle ce qu’on pense du son de Griefjoy. Verdict: musique efficace bien exécutée aux références bien digérées. Pour l’instant, le constat n’a pas changé.

Amateurs de rock sanguin ou de mélodies plus sirupeuses teintées de beats électro, la rentrée 2013 est plutôt placée sous de bonnes auspices et cette soirée l’a démontré. Mon cœur balance pour l’un d’entre eux, il n’est pas difficile de le deviner.

Pour une raison indépendante de notre volonté, les photos prises ce soir là se sont volatilisées entre un lien WeTransfer, un dossier précocement effacé et un appareil photo défectueux renvoyé au SAV. Ca vous épargne des photos de mecs en sueurs, dommage non ?

Merci à Fanny de chez Arista !