Lives au Pont ✖︎ Autre ✖︎ Ailleurs

Cette année, pour ma part, pas de gros festoches bien juteux étalés sur 4 jours, avec des artistes à foison, de la boue, des tentes, de la bière… J’ai préféré le format plus synthétique et accessible des Lives Au Pont (du Gard), où l’on peut retrouver le deuxième jour une soirée plutôt confortable avec La Femme, Metronomy, Phoenix et Todd Terje, dit le tiercé gagnant du bobo-hipster sur le déclin. Ajouté au cadre idyllique du Pont du Gard, c’est le jackpot.

Pour lancer les hostilités l’organisation laisse faire Mummy’s Gone, un groupe local qui joue un truc quelque part entre le grunge et le blues rock, un pied dans la gueule de Kurt Cobain et l’autre dans celle de Dan Auerbach. On a même parfois l’impression d’entendre le chanteur de Nickelback faire vibrer sa glotte sur un titre des Black Keys. Pas dégueu mais loin d’être enthousiasmant en somme.

Sur la vague : des creux et des sommets

Ensuite ce sont les mecs de La Femme qui débarquent sur scène avec leurs 12 claviers Korg et leurs looks discount, entre babacool, punk étiolé et hipster en fin de vie. Les ayant adorés lors de leurs deux dates marseillaises, mais n’ayant pas été complètement emballé par leur premier album, “Psycho Tropical Berlin”, c’est avec une demi-molle craintive que j’aborde ce live. Il y a de quoi se poser quelques questions quand on subit des titres largement dispensables, comme “La Femme Ressort”, “Le Blues de Françoise” ou un “It’s Time To Wake Up” un poil trop long, mais le reste est bien au niveau des précédentes expériences. Malgré un son un tantinet inégal, on ne peut s’empêcher de dévisser du bassin sur “Amour dans le Motu”, “Paris 2012”, “Télégraphe”, “Nous Étions Deux” et l’inévitable “Sur la Planche” notamment. Pour la prestance scénique, les deux “frontmen” que sont la chanteuse et le claviériste/chanteur font le taff gentiment, entre danses voodoo et commentaires à côté de la plaque (le chanteur parlant de la rivière le Gardon : “On s’est baignés tout nus dans l’étang” puis “On ira courrir nu près du lac”). Par contre le batteur est la chose la plus stoïque que j’ai vu en concert : il n’a pas bougé d’un poil de couille en une heure. C’est bien simple, on aurait pu lui dessiner des bites sur le front et faire une pile de gobelets de bières sur la tête que le mec n’aurait pas bronché.

Metronomy-boulot-dodo

On passe aux rois déchus de la pop anglaise, passés de l’ombre à la lumière puis à la pénombre en 3 albums. Joseph Mount et ses comparses débarquent en costard blancs et balancent d’entrée le duo “Holiday”/”Radio Ladio” qui met l’ambiance direct. On notera un ajout un peu WTF de bongos sur certains titres, et un rendu beaucoup plus disco qu’avant. Néanmoins on prend globalement son pied, malgré quelques choix de chansons peu judicieux dont le morceau le plus invraisemblable de “Nights Out” : “Side 2”. Le petit dernier “Love Letters” est plutôt à l’honneur, avec la délicieuse “Reservoir”, l’agréable “Month of Sundays”, mais aussi les bizarreries “I’m Aquarius”, “The Upsetter”, et un pont “Boy Racers” assez décevant. Le moment le plus intense du concert sera la seule rescapée de l’époque “Pip Paine”, la saillie rock/kitsch “You Could Easily Have Me”, qui gagne en puissance ce qu’elle perd en spontanéité. Un set bien mené, parfois assez délicat mais globalement décevant par rapport à ce à quoi ils nous ont habitué.

Phoenix, jamais mort

Le concert de Phoenix tiendrait une nouvelle fois en une phrase, voire en un mot : parfait. Pas nécessairement dans le sens où il n’y a rien à reprocher, mais plus que tout est bien géré, bien joué, avec une setlist cohérente et une prestance scénique appliquée. Malgré son charisme d’huître, Thomas Mars en impose et chante de façon aussi nette qu’en studio, avec sa voix d’éternel ado. Le batteur se dépense plus que n’importe quel kayakiste ayant descendu la rivière cet aprem, et surtout plus que celui de La Femme. Niveau chansons on brasse absolument tout ce qui fait bouger un minimum dans leur disco (quasiment tout quoi) : “Consolation Prizes”, “1901”, “Entertainment”, “Lisztomania”, “Armistice” et bien entendu l’inévitable “If I Ever Feel Better” jouée juste après l’atmosphérique “Love Like a Sunset”. Thomas se fend même d’un crowdsurfing debout, micro à la main, comme un vrai bonhomme. Même si la musique de Phoenix m’a rarement fait dresser les poils, je suis obligé de reconnaître que ces mecs-là sont immanquables en concert.

Todd rien à ter-je

Pour finir la soirée en beauté, j’ai décidé que la barbe rousse la plus réputée de Norvège ferait l’affaire. Après son délicieux EP “It’s the Arps”, on l’avait retrouvé en haut de l’affiche avec son premier album, réunissant notamment quelques-uns de ses meilleurs tubes. Dès son arrivée Todd envoie la pâtée avec des morceaux nu-disco dont il a le secret mais bien plus rentre-dedans que ce qu’on peut imaginer. “Strandbar”, “Napoleon Dynamite”, étayés dans un mix un peu monochrome cassent la baraque, de même que tous les titres un peu dépaysants aux accents cubains. Mais ce qui restera le point d’orgue de ce set et de la soirée en général, c’est bel et bien cet exquis “Inspector Norse” lâché en fin de set qui fait danser toute la foule massée face aux lumières aveuglantes de la scène. On se retourne une dernière fois pour admirer le Pont du Gard éclairé, et on quitte ce merveilleux cadre les pattes encore fourmillantes.

Merci à l’orga qui a été au poil, une des meilleures rencontrées, pour une soirée qui frôle les 100% de réussite.