Moi et Trunks, c’est une longue histoire d’amour. Bon au début c’était Dragon Ball et tout, une fascination très précoce pour les hommes à moitié nus et en sueur, s’envoyant des mandales Mach 3 en bombant le torse façon images du cahier de textes de Marku. Pas étonnant que ce fantasme m’ait conduit jusqu’aux extrémistes de la débauche que représentent mes gentils et forcenés compagnons de chez Visual Music Fist Inc.
Ensuite, Trunks, c’est un frisson qui vient de Rennes et qui m’a traversé il y a quelques années au hasard d’un concert destiné à faire oublier mon envie très solitaire de stupre un soir de mai. Les bourgeons bourgeonnais, l’air était frais, j’étais propice et ouvert à tout proposition sonique. La jolie pop free et déviante du quintet breton m’a rappelé les regrettés Rosa ou Electrelane sans les crescendos chiants. Depuis, Trunks m’a blessé, a disparu, puis je l’ai abandonné, sans prendre de nouvelles, puis je l’ai retrouvé, et ça m’a quand même fait l’effet d’honorer une ex en écoutant ces deux titres : ‘Kniee’ et ‘Journey To The Line’.
Bordel (me dis-je, car même la gueule en fleur je reste vulgaire) : ils n’ont pas changé, et pourtant c’est pas pareil. Tu m’étonnes, la formule « rock atmosphérique à sax » s’est transformée en belle opération indie. ‘Kniee’ est une perle dans la veine d’un Sonic Youth jamais tranquille, chevauché sans pitié par la voix de Laetitia Sheriff, gorgée d’émotion jusqu’aux lèvres. Presque kraut, ‘Kniee’ hypnotise et pousse au coït toute personne exposée à ses radiations noisy. Utile.
‘Journey To The Line’, c’est la redescente après le trip. Les horloges d’Alice Au Pays Des Merveilles qui aspirent, puis trébuchent et pètent en mille morceaux. Planant et vicieux à la fois, il fait office de négatif de ‘Kniee’ : ça c’est un 45tours qui sait ce que « envers » et « endroit » veulent dire.
Dans cette saloperie de miroir, une seule ombre : un mixage paresseux qui ne cogne pas assez fort à l’estomac. Le reste est presque divin, personnel et intelligemment taré.